Ce mardi 20 octobre, le Stade Rennais, qui découvre la Ligue des champions, reçoit le FK Krasnodar, qui jouera lui aussi son premier match de poules de C1. Vieux de seulement 12 ans, le FKK a enfin atteint son objectif de participer aux poules de la Ligue des champions. Il était particulièrement question de cet objectif depuis la saison 2014-2015, qui avait vu le club manquer un ticket pour les préliminaires de la C1 à la dernière minute.
Avant de parler de l’histoire de ce club, il est opportun de se rappeler que Footballski a consacré plusieurs articles sur le FK Krasnodar :
- Le FK Krasnodar, petit nouveau de la scène européenne
- Que vaut le FK Krasnodar en 2015 ?
- La Trilogie du FK Krasnodar :
- FK Krasnodar vs. Real Madrid, un match de Youth League qui sent la poudre
- Coupe du monde 2018 – Russie : Krasnodar, place forte coupée du monde
Après quelques brefs rappels sur les premières années du club, cet article reprend l’histoire où on l’avait laissée dans le troisième épisode de la trilogie de 2016.
De la fondation à l’Europe : quelques rappels
Lire aussi : La triologie du FK Krasnodar – Episode I : un peu d’histoire
Le FK Krasnodar a été fondé le 22 février 2008 par Sergei Galitski, un oligarque russe originaire de la région du Kouban. Celui-ci est un passionné de football. Après une tentative échouée de l’acquisition du Kuban Krasnodar, club historique de la ville, il fonde son propre club et le dirige selon plusieurs idées directrices : le club recrutera intelligemment en favorisant le recyclage de joueurs expérimentés et le suivi de championnats moins huppés, ce qui exclut l’arrivée de grandes stars internationales ; le club misera sur la formation de la jeunesse en investissant dans des infrastructures ultra modernes, qui inclut le Krasnodar Stadion avec son grand écran 360° mais surtout une académie de football dotée d’un complexe très avancé ; le club essayera de développer du beau jeu.
Krasnodar est promu dans la plus haute division russe dès 2011 en profitant des difficultés financières de plusieurs autres clubs qui se désistent. En 2013, Sergei Galitski nomme Oleg Kononov, l’entraîneur qui fait progresser le club du ventre mou du championnat russe à un poids lourd européen. C’est en 2014 que Krasnodar fait ses débuts dans la Ligue Europa en prenant de vitesse le Spartak Moscou en RPL et en écartant joliment la Real Sociedad en barrages (3-0 ; 0-1). Il ne parvient pas à sortir du groupe de la mort avec le LOSC (1-1 ; 1-1), Everton (1-1 ; 1-0) et Wolfsbourg (2-4 ; 1-5) tout en pratiquant un très intéressant jeu offensif, y compris lors des deux défaites contre Wolfsbourg (alors dauphin de Bundesliga) mais aussi de la victoire à Liverpool contre Everton. En championnat, Krasnodar manque de très peu de se qualifier pour les préliminaires de la Ligue des champions. La saison suivante, Krasnodar se qualifie à nouveau pour la Ligue Europa et parvient à battre et devancer le Borussia Dortmund (1-0 ; 1-2) lors d’un gros temps fort de l’automne 2015. Mais le FKK ne résiste pas à sa première expérience d’un match joué en pleine trêve hivernale et s’incline sèchement contre le Sparta Prague en seizièmes de finale(0-3 ; 0-1).
Lire aussi : La Trilogie du FK Krasnodar – Épisode 3 : La situation actuelle
Au début de la saison 2016-2017, alors que la fin de saison précédente avait vu l’émergence d’un duo Pavel Mamaïev – Fyodor Smolov, une épidémie de blessures fragilise les résultats. Oleg Kononov démissionne et est remplacé par Igor Shalimov. Krasnodar retrouve un semblant de solidité qui lui permet de s’imposer à Salzbourg (1-0) et de battre largement l’OGC Nice (5-2), mais la blessure de Fyodor Smolov lance une période d’instabilité qui va durer tout l’ère Shalimov, même une fois les blessés revenus. La réception de Schalke 04 est le premier match dans le nouveau Krasnodar Stadion flambant neuf et se solde par une défaite (0-1), tout comme le match retour en Allemagne (0-2) avant deux matchs médiocres contre Salzbourg qui qualifie le club (1-1) et une défaite sans enjeu à Nice (1-2).
Depuis 2016 : vers la Ligue des champions
La stagnation sous Igor Shalimov
Krasnodar, qui a signé l’arrivée de Viktor Claesson et de Cristian Ramirez à cette période, se qualifie pour les huitièmes de Ligue Europa en éliminant Fenerbahçe (1-0 ; 1-1), mais se fait éliminer par le Celta Vigo en se faisant nettement dominer à l’aller (1-2) tout en passant totalement au travers lors du match retour (0-2). Au moins, Krasnodar participe avec Rostov à placer la Russie devant le Portugal au classement UEFA, libérant une troisième place pour la Ligue des champions à partir de 2018.
À partir de ce moment, Krasnodar déchante et ne parvient jamais à retrouver la stabilité. Avec seulement cinq victoires en treize matchs dont une triste série de quatre matchs sans victoires, il frôle la non-qualification pour l’Europe et est sauvé par le faux-pas du FK Rostov à la dernière journée. Mais la qualification européenne restera sans suite. Aux tours préliminaires de la Ligue Europa, le FK Krasnodar connaît son premier échec puisqu’après avoir éliminé les Danois de Lyngby, ils s’inclinent contre une bonne équipe de l’Étoile rouge de Belgrade en étant totalement submergés en Serbie, entraînant des appels au départ de l’entraîneur. Le FKK se fait éliminer dès son entrée en lice de Coupe de Russie par Tomsk et enchaîne cinq défaites consécutives pendant l’automne 2017, la pire série du club. Au printemps 2018, après trois faux-pas importants contre le Dinamo Moscou (0-0), Oufa (0-1) et l’Anji (1-1), ces deux derniers encaissés à domicile, Igor Shalimov est finalement remercié (bien que Galitski lui apporte son soutien).
Le nouvel élan de Murad Musayev
Murad Musayev, entraîneur de l’équipe de jeunes qu’il a mené en Youth League (qui partage avec Julien Stéphan sa jeunesse – les deux sont nés dans les années 1980 – et sa vision d’un football moderne), remplace Shalimov. Il redresse rapidement les résultats. Les Byki (taureaux en russe) commencent par battre le Zenit à Saint-Pétersbourg (2-1). Ils obtiennent 13 points sur 18 possibles pour une défaite honorable à Moscou contre le CSKA et un nul au dernier match contre le Rubin Kazan, où le stade est décoré de deux t-shirts dessinés sur le pelouse en hommage aux historiques Andreas Granqvist et Joãozinho qui quittent le club. Smolov quitte lui aussi le club pour rejoindre le Lokomotiv Moscou alors que Ricardo Laborde retourne à Chypre.
Suite au départ de l’emblématique Granqvist, le FK Krasnodar se renforce en défense centrale avec le Serbe Uroš Spajić et l’Islandais Jón Guðni Fjóluson tout en recrutant le Péruvien Christian Cueva. Krasnodar commence par une défaite à Kazan et met du temps à trouver son rythme même si Pavel Mamaïev, qui peinait à retrouver son niveau de 2015-2016 depuis sa très longue blessure de l’été 2016, remonte en puissance pendant cette période.
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Un mois en apothéose, la fulgurance de septembre 2018
Consacrer une section entière à un seul mois d’histoire peut surprendre car cela peut sembler disproportionné. Pourtant, force est de constater que le FK Krasnodar a connu une période de référence pendant le mois de septembre 2018. Cet élan, malheureusement interrompu par un événement extrasportif pendant la trêve internationale d’octobre(cf. infra), représente l’idée parfaite de ce que Krasnodar peut proposer dans ses meilleurs moments. À ce jour, les Byki n’ont encore jamais remporté de trophée malgré de nombreuses promesses (point commun avec Rennes). Nul doute que s’ils arrivent un jour à développer le même jeu et à maintenir le rythme sur l’ensemble de la saison, ils y arriveront.
Lorsque le jeune Magomed-Shapi Suleymanov, tout droit sorti de l’académie de Krasnodar et souvent envoyé en renfort en deuxième mi-temps, permet au FKK de battre le Lokomotiv Moscou d’un but en fin de match juste avant la trêve internationale (2-1), il lance une série dorée pour son club qui dure un mois. Pendant cette période, le FKK est emmené par une attaque exceptionnellement remuante qui parvient à enthousiasmer tous les spectateurs. Dès lors, la déferlante des Byki écrase tout sur son passage dans le score et dans le jeu juste après la trêve internationale. À un rythme effréné de deux matchs par semaine, elle atomise l’Anji Makhatchkala (4-0), puis s’impose en Turquie contre Akhisar en compétition européenne (1-0), avant de battre nettement le Krylia Sovietov Samara (3-0), puis élimine l’Avangard Koursk, finaliste sortant, en Coupe de Russie (2-0) et bat le Dinamo Moscou (3-0) pour se hisser à trois points du Zenit Saint-Pétersbourg, le leader. Pour un observateur extérieur, toutes ces victoires contre des adversaires a priori clairement inférieurs peut sembler aller de soi. C’est méconnaître la difficulté pour n’importe quel club russe d’enchaîner les victoires sur une période si longue, sans encaisser de but, avec un calendrier si chargé et en maintenant un niveau de jeu spectaculaire.
Car sur le terrain, c’est l’extrême facilité avec laquelle Krasnodar est capable de créer des occasions dangereuses toutes les trois minutes qui saisit le spectateur. Longtemps resté l’ombre de celui qu’il a été, Pavel Mamaïev est revenu à un niveau de jeu très élevé qui le voit capable d’assurer le rôle de plaque tournante pour mener les assauts dans le secteur offensif. La qualité et la précision de ses passes permet aux Byki de compenser leur habitude d’attaquer par les couloirs et de peiner dans l’axe. Contre Samara, après que les Byki ont passé la majeure partie du match à faire des centres depuis les couloirs, c’est justement son entrée en fin de partie qui permet de décanter la rencontre.
Pour l’adversaire, les attaques viennent de partout et à un rythme soutenu. Il est aidé par tout un secteur offensif à la créativité en ébullition et dont les lignes coulissent avec une fluidité digne du plus beau football. Au milieu, l’Uruguayen Mauricio Pereyra ainsi que Iouri Gazinski sont très rapides dans les projections vers l’avant, tout comme Wanderson sur le couloir. En attaque, les jeunes de l’académie, Ivan Ignatiev et Shapi sont remarqués pour leur dangerosité et leur capacité à marquer beaucoup de buts. Les arrières-latéraux Cristian Ramirez et Sergei Petrov remontent souvent pour soutenir l’attaque tandis que la charnière Martynovitch-Spajic arrive à ce moment à faire oublier le départ de Granqvist et de son plus lointain partenaire Sigurdsson.
Lors de la journée suivante en Ligue Europa, le FKK reçoit le FC Séville, qui à ce moment-là est en pleine bourre et totalise quatre victoires consécutives, 17 buts marqués, 4 buts encaissés, un triplé et quatre doublés sur les quatre derniers matchs, dont une victoire sensationnelle 3-0 contre le Real Madrid. Loin d’être impressionnés, le FK Krasnodar domine nettement les débats dès les premières minutes dans un Krasnodar Stadion bouillant. Bien qu’ils encaissent un but contre le cours du jeu, les Byki frappent la barre transversale à trois reprises, puis égalisent grâce à Mauricio Pereyra avant que Tornike Okriashvili, déjà auteur d’une action similaire face au Zenit deux ans plus tôt, ne donne un avantage décisif à Krasnodar d’un retourné acrobatique (2-1). Les Byki s’emparent seuls de la tête de leur groupe de Ligue Europa.
Ci-dessous le résumé du match, à regarder absolument :
Les Byki abordent ensuite la rencontre suivante face au leader russe, le Zenit Saint-Pétersbourg, qui a trois points d’avance au classement. Au terme d’une rencontre extrêmement disputée qui voit le FKK manquer beaucoup d’occasions contre un adversaire très averti, déterminé et vigilant, Krasnodar s’inclince sans démériter à Saint-Pétersbourg (1-2).
Michel Preud’homme, l’entraîneur du Standard de Liège, le futur adversaire de Krasnodar en Europe, a analysé le FKK en regardant les matchs de cette période faste. Lors de la conférence de presse d’avant-match, il parle des Byki en ces termes : « Leur jeu est de qualité. Si tu bats Séville méritoirement, si tu vas au Zenit et que tu les colles à leur but pendant 45 minutes, ça veut dire que tu es une équipe du top. Ils ont des qualités défensives en perte de balle, avec beaucoup de courses, et beaucoup de joueurs techniques, qui changent de position. Leur arme la plus flagrante, c’est le pressing. Sur ce point, c’est l’équipe analysée cette saison qui nous a le plus impressionnés. Elle nous laissera très peu de temps pour faire les bons choix. »
Malheureusement, comme cela a déjà été le cas par le passé, Krasnodar ne parvient pas à maintenir ce rythme jusqu’au bout de la saison. Cette fois, c’est un déboire extrasportif qui casse la dynamique. L’apothéose s’arrête dès la trêve internationale qui suit lorsque Pavel Mamaïev, l’un des plus importants artisans (voire le plus important) des derniers succès mais aussi l’un des joueurs les plus problématiques en terme comportemental, est vu avec Aleksandr Kokorin adopter un comportement violent qui conduit le duo des affaires extra sportives, déjà épinglé en 2016 après l’Euro, en prison pour les prochains mois. L’affaire est retentissante dans les médias russes. Le FK Krasnodar annonce tout de suite son intention de se séparer de Mamaïev, chose qu’il fera effectivement à sa sortie de prison un an plus tard, avec le soutien probablement important d’un public loin de cautionner de tels comportements. On peut se demander si le FKK de 2018-2019 aurait pu décrocher davantage de succès qu’il n’en a obtenu sans cette triste affaire, tant il semblait avoir atteint un niveau de jeu remarquable. Car même si le FK Krasnodar reste solide et parvient à décrocher des résultats historiques pendant la suite de la saison, l’épisode peut être érigé en symbole de l’incapacité du club à maintenir une dynamique sur le long terme, une fois la recette idéale trouvée. Qu’il s’agisse de problèmes de quotas ou d’un retour de trêve hivernal mal géré comme en 2015-2016, d’épidémie de blessures malheureuses comme en 2016-2017 ou d’affaires extra sportives comme ici. C’est pourtant une dynamique semblable qui permettrait aux Byki de décrocher un premier trophée qu’ils ne sont pas encore parvenus à décrocher malgré les progrès affichés.
L’atteinte de la Ligue des champions
Dès le match qui suit le retour de trêve internationale et l’arrestation de Pavel Mamaïev, le FKK s’incline à domicile contre l’Akhmat Grozny (0-1), comme un mauvais signal pour le reste de la saison. Il parvient néanmoins à garder un niveau de jeu tout à fait intéressant. En Europe, même si le club rencontre plus de difficultés face au Standard de Liège (2-1 ; 1-2), Akhizar à domicile (2-1) et Séville au retour en Espagne (0-3), il parvient à se qualifier avec 12 points et éliminer un Bayer Leverkusen en pleine forme en dominant joliment le match aller malgré l’absence de but (0-0) et en marquant à l’extérieur par le jeune Shapi (1-1). Les Byki passent à un rien de battre leur meilleur parcours de 2016-2017 contre Valence au tour suivant. Battus par la plus petite des marges en Espagne pour trente premières minutes mal gérées (1-2), Shapi ouvre le score à la 85e au match retour sous l’euphorie des spectateurs avant que le FKK n’encaisse un but fatal dans les dernières secondes du match (1-1).
En championnat, le retour de trêve hivernale est assez irrégulier. Malgré une deuxième place au classement pendant l’hiver, les Byki ne remportent que trois matchs sur leurs dix premiers (dont certains péniblement arrachés comme Samara sur penalty en fin de match) sont devancés par le Lokomotiv Moscou qui obtient l’avantage à la différence de buts particulière (0-1). On peut néanmoins noter le match très spectaculaire face au Zenit Saint-Pétersbourg que plusieurs médias ont considéré comme le plus beau match que la Russie n’ait jamais proposé (2-3).
Bénéficiant d’une troisième place qualificative pour les préliminaires de la C1 qu’il a aidé à obtenir par ses campagnes européennes, le FKK obtient sa qualification historique pour les tours préliminaires de la Ligue des champions via sa place sur le podium de la RPL (troisième). La fin de saison 2018-2019 voit le départ de Charles Kaboré et surtout Mauricio Pereyra, que de récents sondages ont porté en tête des meilleurs joueurs de l’histoire de Krasnodar devant Granqvist.
C’est à ce moment que le FK Krasnodar recrute son premier Français : Rémy Cabella arrive de l’AS Saint-Étienne pour 12 millions d’euros. C’est le plus gros investissement jamais réalisé par le FKK sur le marché des transferts. Dans la même période, les Byki recruent Tonny Vilhena, Younes Namli, Manuel Fernandes, Marcus Berg et le défenseur central Caio. En début de saison, malgré une défaite d’entrée contre l’Akhmat Grozny (0-1), les Byki trouvent leurs repères. Ils parviennent à éliminer le FC Porto au troisième tour préliminaire avec à nouveau un rôle décisif du jeune Suleymanov (0-1 ; 3-2) et à obtenir le nul à Saint-Pétersbourg face au Zenit (1-1). Point noir, l’UEFA prive Murad Musayev du banc, faute d’avoir une licence appropriée. Il mettra près de deux ans à l’obtenir.
Alors qu’une dynamique positive s’enclenche, la grave blessure de Rémy Cabella (qui avait pris beaucoup d’importance offensive dans le jeu de l’équipe) au barrage aller contre l’Olympiakos change la donne. Alors que Krasnodar faisait jeu égal avec l’équipe de Mathieu Valbuena, l’Olympiakos déroule après la blessure de Cabella, mettant en avant les problèmes défensifs de l’équipe russe lorsqu’elle n’arrive pas à compenser par l’attaque. Quasiment éliminé après une raclée en Grèce (0-4), le FKK se donne l’illusion quelques secondes au retour avant de vite concéder l’égalisation puis un second but (1-2).
Ce n’est que partie remise. Krasnodar, touché par d’autres blessures longues et importantes comme celles de Claesson, de Gazinski puis plus tard de Spajic, se fait éliminer de sa poule de Ligue Europa 2019-2020 contre le FC Bâle (1-0 ; 0-5), Getafe (1-2 ; 0-3) et Trabzonspor (3-1 ; 2-0), malgré le bilan pas si mauvais de neuf points. Même si le club n’arrive pas à trouver une formule durablement gagnante, il arrive en seconde position en championnat à la trêve hivernale. À cause des parcours catastrophiques des clubs russes en Europe cette saison-là, la Russie perd une place au classement UEFA et c’est donc la dernière fois avant une éventuelle réaction russe en Europe que la seconde place est directement qualificative pour la C1 – et la troisième pour les tours préliminaires.
Évidemment, l’interruption forcée par la pandémie de Covid-19 rend la saison 2020 très particulière. Le FKK ne remporte que cinq matchs sur onze et ne profite pas des nombreux faux-pas du Lokomotiv Moscou dans le même intervalle. Il termine à nouveau à la troisième place qui lui donne accès aux préliminaires de la Ligue des champions.
La victoire de Séville en Ligue Europa permet à Krasnodar d’entrer dès les barrages et non au troisième tour. C’est à nouveau une équipe grecque qui se dresse sur son chemin : le PAOK Salonique. Une équipe qu’il a déjà croisé en Europe lors de saison 2015-2016, c’est d’ailleurs la première fois que le FKK retrouve un adversaire en Europe après l’avoir déjà affronté précédemment. Outre le souvenir de la déroute contre l’Olympiakos, le PAOK a toutes les raison d’inquiéter. Celui-ci est parvenu à éliminer successivement Besiktas et le Benfica Lisbonne pour se dresser contre Krasnodar. Rémy Cabella joue un rôle décisif dans la double rencontre. Alors que le FK Krasnodar est peu à l’aise contre une équipe plutôt cohérente et bien organisée, encaissant même un penalty heureusement raté et l’ouverture du score grecque à domicile, il arrive à réagir en marquant sur penalty avec Claesson, un penalty obtenu par Rémy Cabella avant que le Français ne vienne marquer le but de la victoire (2-1). Même si l’avantage est maigre, il est évident que le PAOK Salonique sera forcé de se livrer au retour, ce qui correspond moins à sa configuration la plus favorable.
Au retour, le FKK souffre par moments mais exploite ce fait et parvient à marquer lors d’un festival de six minutes, durant lesquelles trois buts sont inscrits. Encore une fois, Rémy Cabella est l’artisan du second but, ce qui fait de lui l’homme de la double rencontre (2-1). Le FK Krasnodar va participer à sa première phase de poules de la Ligue des champions, une possibilité qui était attendue depuis cinq ans !
Si l’euphorie est immense, elle n’éclipse pas un démarrage en dents de scie. Krasnodar n’a gagné que cinq matchs sur onze en championnat et ces chiffres sont conformes aux lacunes dans le jeu développé. Le FKK montre beaucoup de signes de fragilité, notamment défensives mais aussi dans l’efficacité offensive. Présentation des forces en présence dans la section suivante.
Les forces en présence
Une attaque habituellement puissante mais exsangue
La nouvelle est tombée ce lundi 19 octobre : Rémy Cabella, tout comme la recrue du mois Ievgeni Markov, sont isolés à la suite d’un test de dépistage au Covid-19 douteux (positif selon un tweet de Cabella, non concluant d’après la communication officielle du club, qui assure que les joueurs sont en bonne santé). À cela s’ajoute l’absence probable de Wanderson qui s’est blessé à la fin du mois de septembre à l’entraînement (le club communique peu à son sujet, ce qui laisse des interrogations sur la date prévue de son retour).
Ces difficultés viennent empirer un secteur offensif certes actif mais qui peine à se montrer incisif. Krasnodar est porté par les internationaux suédois Viktor Claesson (qui revient d’une longue période de blessure) et Marcus Berg, en plus du milieu Kritsoffer Olsson. À noter aussi la recrue du FK Rostov, Alekseï Ionov.
Le FK Krasnodar a pris l’habitude ces dernières semaines d’attaquer par les couloirs en faisant monter les arrières latéraux, caractéristique récurrente depuis plusieurs années. Le club a recruté l’international expérimenté Igor Smolnikov qui s’ajoute au très bon Sergei Petrov et à Cristian Ramirez. Néanmoins, Krasnodar peine à attaquer dans l’axe. Il pratique un jeu à base de passes courtes quand il essaie mais la plupart des attaques sont stoppées par interception.
La charnière, la faiblesse ?
Aussi paradoxal que cela puisse paraître, la charnière de Krasnodar, qui a été historiquement une des plus solides de Russie quand elle était tenue par Ragnar Sigurdsson, parti en 2016, et par le capitaine Andreas Granqvist, parti en 2018, a présenté de graves signes de faiblesses en ce début de saison. Après une lutte de plusieurs mois contre une blessure, Uros Spajic est parti en prêt à Feyenoord. La défense sera donc tenue par un duo parmi le trio Aliaksandr Martynovitch (qui vieillit), Iegor Sorokin et Caio. Quel que soit le duo aligné, il commet facilement des erreurs dès qu’il est sous pression. Caio a néanmoins réalisé un bon match contre le Rubin Kazan le week-end dernier et a été désigné homme du match. Il y a toutes les chances qu’il soit l’un des deux joueurs alignés.
Le rôle de la jeunesse
En 2018, nous avions listé plusieurs jeunes joueurs du FK Krasnodar à suivre. Aujourd’hui, plusieurs d’entre eux sont des titulaires indiscutables du club. Daniil Utkin, Magomed-Shapi Suleymanov et le gardien Matveï Safonov fouleront sans doute la pelouse du Stade rennais. Si Ivan Ignatiev a quitté le FKK, faute de s’être entendu avec les dirigeants du club, Daniil Utkin brille par la précision de ses passes et sa qualité technique. Il sera une menace à suivre pour Rennes. Quand à Matveï Safonov, malgré quelques grosses erreurs ponctuelles, il cumule les arrêts décisifs et les prestations de qualité. En revanche, Magomed-Shapi Suleymanov semble traverser une mauvaise passe depuis l’interruption par le Covid-19 et marquer beaucoup moins de buts alors qu’il s’est fait énormément remarqué par le nombre de buts et de belles actions qu’il a créés comme en parlait le site Russian Football News en 2019.
La direction du FK Krasnodar espère à terme aligner un maximum de joueurs issus de l’académie ultra moderne et atteindre une dynamique de quatre nouveaux joueurs par année. On n’en est peut-être pas encore à ce stade, mais les jeunes produits du club sont assurément des joueurs à suivre, que ce soit pour les adversaires ou bien pour des clubs soucieux de recruter.
Quel résultat et quel avenir ?
Il est rare que Krasnodar termine un match sur un 0-0. Cette caractéristique le rapproche assurément de Rennes. Face à Rennes, Séville et Chelsea, groupe qui comporte beaucoup de points communs avec la saison inaugurale du FKK en Europe (Lille, Everton et Wolfsbourg) en particulier dans le calendrier, Krasnodar peut se rassurer en se disant que son passif lui est favorable :
Les Byki avaient obtenu les trois points à domicile contre Séville en 2018 au terme d’un match dantesque (cf. supra).
En quatre rencontres face à des clubs français, le FKK n’a perdu qu’un match sans enjeu contre Nice en 2016 après avoir battu cette même équipe 5-2 et avoir décroché deux nuls 1-1.
Lors de l’unique rencontre contre des Anglais en 2014, Krasnodar avait décroché quatre points contre Everton en ne passant pas loin d’en décrocher six.
Néanmoins, les nombreux doutes soulevés au cours de l’article combinés aux dernières nouvelles de l’isolement de Cabella et Markov aggravent une situation dans laquelle Krasnodar ne partait déjà pas vraiment favori. Cette nouvelle s’accompagne en plus de celle de l’angine de l’entraîneur Murad Musayev, qui le prive d’un voyage en France.
Krasnodar sera certainement très content en terminant à la troisième place. Les Byki ne sont peut-être pas prêts de revivre une expérience en Ligue des champions étant donné la position russe au coefficient UEFA et le départ irrégulier de ce début de saison. Ils aborderont sans doute la compétition dans l’intention de tenter leur chance et d’apprendre. C’est sûrement ce que la direction, les joueurs et les supporters concluront dans le cas où l’équipe terminerait dernière de sa poule. Néanmoins, le FKK essaiera d’obtenir bien mieux pour que le souvenir de sa première participation soit aussi enrichissant et riche en images.
Par Philippe Ray
Image à la une : © vk.com/fckrasnodar