Saison 2017/2018 : Six mois de football en Hongrie

En 2016-2017, le championnat de Hongrie avait tenu en haleine supporters et observateurs jusqu’aux derniers instants de l’ultime journée. Cet exercice 2017-2018 est parti sur de mêmes bases, le suspense étant toujours de mise aussi bien en haut qu’en bas de tableau. La renaissance de Ferencváros, le retour sur terre du Budapest Honvéd, le jeu dangereux de Vasas… Voici ce qu’il faut retenir après six mois de compétition.

Le groupe de tête

1. Ferencváros – 41 pts
2. Videoton – 38 pts
3. Debrecen – 31 pts
4. Budapest Honvéd – 28 pts

Il y a un an, à pareille époque, trois équipes (Videoton, le Honvéd et Vasas) occupaient le podium avec exactement le même nombre de points. La donne est cette fois différente car deux duels semblent se dégager. L’un oppose Ferencváros et Videoton dans la quête du titre, l’autre voit Debrecen et le Budapest Honvéd se disputer la troisième place.

Ferencváros – Videoton, un mano a mano palpitant

Le principal enseignement à tirer de cette première partie de saison est que le Ferencváros TC est de retour aux avant-postes. Sacré champion de Hongrie avec une avance indécente sur ses rivaux en 2016, Fradi est tombé de haut en 2016-2017, finissant à une décevante quatrième place. Thomas Doll est cependant resté à son poste et a brillamment redressé la barre, contre vents et marées. L’entraîneur allemand est à la tête d’une formation à la fois solide défensivement (dix-sept buts encaissés, meilleure arrière-garde de l’élite) et inspirée offensivement (38 buts marqués, seul Videoton fait mieux).

Il faut dire que les Aigles verts disposent de joueurs très à l’aise balle au pied, à l’image de Roland Varga. Agé de 27 ans, l’ailier formé au MTK réalise pour l’instant une saison époustouflante, sans doute la plus aboutie de sa carrière. Le meilleur buteur de NB I (treize réalisations) fait aussi bien parler sa technique en un contre un que sa précision sur coups de pied arrêtés. Son rôle est donc prépondérant, tout comme celui du gardien Dénes Dibusz, régulièrement décisif devant sa ligne de but. Respectivement arrivés à Budapest en février et août 2017, Amadou Moutari et Joseph Paintsil mettent eux aussi les défenseurs adverses en difficulté, grâce à leur petit gabarit et leur pointe de vitesse. A vrai dire, même si Thomas Doll peine à trouver un attaquant de pointe fiable et régulier dans ses performances (Dániel Böde, Tamás Priskin et Balázs Lovrencsics se relaient sans réellement convaincre), cela n’est pas préjudiciable au FTC. Pour l’instant du moins.

Seulement défait à deux reprises en NB I, Ferencváros s’avance ainsi comme un prétendant plus que crédible au trône de Hongrie. Pour le plus grand plaisir de ses ultras qui, et c’est un petit événement, ont d’ailleurs décidé d’arrêter de boycotter la Groupama Aréna (boycott instauré en raison des contrôles d’identité à l’entrée de l’enceinte, comparés à du fichage). Un retour célébré en grandes pompes lors de la réception de Debrecen le 4 novembre (2-1) et malheureusement marqué par quelques affrontements violents dans la foulée. Eliminé par Midtjylland en deuxième tour préliminaire de la Ligue Europa (2-4, 1-3), Fradi a été battu par Kisvárda en Magyar Kupa (1-0), compétition dont il était pourtant le double tenant du titre. Mais cet accroc sera sans doute très vite oublié en cas de sacre en championnat…

Videoton ne compte cependant pas laisser filer la couronne nationale une fois de plus. Coiffé sur le poteau par le Honvéd lors du précédent exercice, le club de Székesfehérvár a su conserver ses meilleurs éléments pendant le mercato estival et a enregistré l’arrivée de Marko Nikolić sur son banc. Auréolé d’un doublé coupe-championnat avec le Partizan Belgrade, l’entraîneur serbe a très vite imposé sa patte sur sa nouvelle équipe, qui s’est distinguée sur la scène européenne en éliminant les Girondins de Bordeaux en troisième tour préliminaire de C3 (1-2, 1-0). Les Vidi ont confirmé leurs bonnes dispositions en championnat et ont occupé la première place de longs mois durant, puis l’ont abandonnée suite à deux défaites juste avant la trêve.

Ces deux revers, face à Ferencváros (3-1) et Haladás (1-0) ne doivent surtout pas remettre en cause la qualité du jeu développé par Videoton, qui est certainement l’une des équipes d’OTP Bank Liga les plus agréables à regarder. Si importants en 2016-2017, Danko Lazović (dix buts) et Marko Šćepović (neuf buts) sont toujours aussi redoutables face au but. Arrivé pendant l’été en provenance du Lokomotiv Moscou, Ezekiel Henty dispose d’un profil assez différent de celui des deux artilleurs serbes et offre une alternative intéressante en attaque, où il se montre à son aise pour prendre la profondeur. L’avant-centre nigérian serait d’ailleurs, selon certaines rumeurs, dans le viseur de Dijon. La meilleure attaque du championnat (41 buts marqués) s’appuie également sur une défense peu perméable, et ce malgré les pépins physiques rencontrés par Paulo Vinícius. Les latéraux Stopira et Loïc Nego se projettent toujours très vite vers l’avant, offrant ainsi des solutions de dédoublement. Tous ces éléments font du VFC une formation assurément capable de lutter jusqu’au bout pour le titre. A noter que tout comme Ferencváros, Videoton a connu une fâcheuse déconvenue en Magyar Kupa en se faisant sortir par Vác, pensionnaire de deuxième division (3-1).


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Debrecen est de retour aux affaires

Club phare des années 2000 (sept titres de champion de Hongrie entre 2005 et 2014), Debrecen a frôlé la correctionnelle la saison passée, échappant de peu à la descente. Le DVSC semblait parti pour encore vivre de longs mois de galère (aucune victoire sur les cinq premiers matchs), avant d’entamer une belle remontée (cinq succès d’affilée) et de se stabiliser dans le wagon de tête (invaincu entre mi-août et début novembre). Ce regain de forme coïncide de manière très paradoxale avec le transfert de Dávid Holman au Slovan Bratislava. La perte du talentueux milieu de terrain aurait dû être difficile à digérer pour les Loki, mais il n’en fut rien, au contraire. Le capitaine Dániel Tőzsér a les choses en mains dans l’entrejeu, alors que Tamás Takács sait faire preuve d’adresse face au but (sept réalisations). Au regard des prestations effectuées jusque-là, Debrecen mérite d’occuper cette troisième place qui, rappelons-le, est qualificative pour les tours préliminaires de la Ligue Europa.

La troisième marche du podium, ce sera vraisemblablement l’unique objectif que le Budapest Honvéd pourra avoir en NB I. Car force est de constater que le champion sortant n’a pas montré qu’il était en mesure de conserver son bien. Marco Rossi ayant claqué la porte juste après le sacre en raison de revendications salariales rejetées par sa direction, il incombait à Erik Van der Meek de poursuivre l’œuvre du coach italien. Plutôt bien partis, les Rouge et Noir ont connu un trou d’air (aucune victoire entre fin août et mi-octobre) qui leur a valu d’être décramponnés, ce que leurs trois défaites de rang en décembre n’ont fait qu’entériner. Si solides à domicile par le passé, les Budapestois se sont déjà inclinés à quatre reprises dans leur antre du József-Bozsik Stadion, notamment face aux mal classés Vasas (1-4) et Mesőkövesd-Zsóry (1-2). La défense est bien plus poreuse que l’an dernier (trente buts encaissés) tandis que le meilleur réalisateur du précédent exercice, Márton Eppel, a incontestablement perdu en efficacité (sept buts marqués). D’une manière générale, seul le fougueux Davide Lanzafame paraît ne pas avoir accusé le coup après la pause estivale (onze réalisations). Van der Meek a été remplacé par Attila Supka, à qui il reste quatorze rencontres de championnat, ainsi que la Magyar Kupa, pour aider le Honvéd à retrouver des couleurs.

Le (petit) ventre mou

5. Újpest – 26 pts
6. Diósgyőr – 25 pts
7. Paks – 24 pts

Derrière, trois équipes se tiennent en deux points. Ces clubs ont su garder leurs distances vis-à-vis de la zone rouge mais ne sont pas suffisamment réguliers pour se rapprocher du podium. La situation pourrait évoluer après la trêve, dans un sens comme dans l’autre…

Újpest, par exemple, pourrait être tenté de regarder vers le haut. Désormais orphelins de Kylian Hazard (qui a rejoint son frère à Chelsea), de Souleymane Diarra (transféré à Lens) et surtout d’Enis Bardhi (parti à Levante), les Lilák ont vécu une entame de championnat morose, laissant présager une saison sans saveur. Mais la réception de Videoton, le 28 octobre, fut un tournant pour les hommes de Nebojša Vignjević. Rapidement menés 0-2, ils ont su profiter de leur supériorité numérique pour revenir à hauteur après la pause… et ont manqué le penalty de la gagne dans le temps additionnel (2-2). Qu’importe, car le déclic a bien eu lieu. Trois victoires ont suivi, et l’UTE a pu se replacer. Les arrivées de Dániel Nagy, indiscutable au poste de numéro 10, et de Soma Novothny (dix buts) sont pour l’instant couronnées de succès. Si cela se confirme à partir de février, Újpest peut envisager de contrarier le Honvéd et Debrecen.

Alternant entre victoires enthousiasmantes (5-0 contre Vasas, 2-1 face au Honvéd) et défaites peu reluisantes (4-0 à Balmazújváros), Diósgyőr se situe logiquement en plein milieu de tableau. Si sa défense laisse à désirer (trente buts encaissés), le DVTK peut s’appuyer sur sa force de frappe offensive pour faire le spectacle. Le recrutement de Nikolaos Ioannidis et la montée en puissance de Carlos Vela n’y sont certes pas anodins, mais celui qui a vraiment crevé l’écran, c’est Roland Ugrai. L’attaquant hongrois a fait oublier Novothny (neuf buts) et a même effectué ses premiers pas sous le maillot de la sélection nationale. Obligé d’évoluer au Nagyerdei Stadion de Debrecen en attendant que sa nouvelle enceinte soit livrée, Diósgyőr semble en tout cas se diriger vers un maintien plus facile à décrocher que l’an passé. C’est déjà ça.

Septième, Paks trace sa route sans faire de bruit, en prenant des points face aux équipes qu’il aperçoit dans le rétroviseur mais en ratant systématiquement le coche contre les grosses écuries. Les victoires de Videoton (1-4) et de Ferencváros (0-2) sur la pelouse du champêtre Fehérvári úti Stadion, citadelle longtemps imprenable en 2016-2017, sont là pour en attester. L’Atomcsapat est toujours portée par son virevoltant ailier gauche László Bartha (5 buts), tandis que Kristóff Papp et Lajos Bertus s’avèrent très précieux au milieu de terrain. Outre le maintien, qui reste probablement son principal objectif, le PFC peut miser sur la Magyar Kupa pour ajouter un peu de sel à sa fin de saison. La double confrontation face à Újpest fin février à l’occasion des huitièmes de finale de la compétition sera, en ce sens, déterminante.

La lutte pour le maintien

8. Puskás Akadémia – 23 points
9. Vasas – 21 pts
10. Szombathelyi Haladás – 20 pts
11. Balmazújváros – 19 pts
12. Mesőkövesd-Zsóry – 16 pts

A l’instar des joutes de haut de tableau, la lutte pour le maintien s’annonce elle aussi très indécise. Elle concerne notamment la Puskás Akadémia, reléguée il y a deux ans et qui n’a eu besoin que d’une saison pour reprendre l’ascenseur. Ce « Clairefontaine à la hongroise » (qui en réalité comporte davantage de joueurs expérimentés que de jeunes éléments issus du centre de formation) a pris un bien mauvais départ en n’engrangeant que deux points sur ses cinq premiers matchs, mais une série de quatre victoires d’affilée lui a ensuite permis de mieux respirer. Les hommes d’Attila Pintér ont ensuite connu deux mois de disette (aucun succès entre mi-septembre et mi-novembre), ce qui les a empêchés de réellement s’extirper de la zone de turbulences. L’Akadémia, située à Felcsút (village dans lequel un certain Viktor Orbán a grandi) a eu le nez creux en s’attachant les services d’Ulysse Diallo et surtout de Josip Knežević (dix buts), tous deux très précieux dans l’animation offensive de l’équipe. Ils pourront être d’une aide précieuse lors des affrontements à couteaux tirés du sprint final.

Mais que se passe-t-il du côté de Vasas ? En mai 2017, le club budapestois parvenait à s’emparer de la troisième place, soit son meilleur classement depuis des lustres. Rien ou presque n’a changé pendant l’été. Michael Oenning est toujours sur le banc, l’effectif n’a pas subi de saignée lors du mercato. Et il est difficile de considérer que la brève campagne européenne a nécessité un investissement considérable (élimination dès le premier tour préliminaire de C3 par le Beitar Jérusalem). En réalité, le VSC ne surfe juste plus sur la formidable dynamique qui lui a permis de se maintenir in extremis en 2015-2016 et qui a perduré sur l’exercice suivant. La réussite fuit désormais Mohamed Remili et ses coéquipiers, qui n’ont plus gagné depuis mi-octobre. Le peu rassurant L’uboš Kamenár est le dernier rempart de la pire défense de l’élite (37 buts encaissés) et le 3-4-2-1 souvent aligné par l’entraîneur allemand ne donne pas, dans l’ensemble, réellement satisfaction. Pour couronner le tout, les Rouge et Bleu ont été boutés hors de la Magyar Kupa par Dunaújváros, équipe de troisième division (2-1).

© Szombathelyi Swietelsky-Haladás / Facebook

Dixième, le Szombathelyi Haladás a donc le privilège de passer la longue trêve au-dessus de la ligne de flottaison. Cela paraissait pourtant loin d’être évident fin novembre. Gábor Király (41 ans maintenant) et consorts ont enchaîné les déconvenues cinq mois durant, ce qui a causé le départ de deux entraîneurs. Arrivé fin août en remplacement de Géza Mézsöly, Bálint Pacsi n’a pas tenu longtemps puisqu’il a été démis de ses fonctions début novembre. Michal Hipp a visiblement trouvé la solution pour remobiliser les Hali, qui ont rapidement renoué avec la victoire. Un regain de forme qui a également coïncidé avec leur emménagement au sein du Haladás Sportkomplexum, leur nouvelle enceinte, où Ferencváros (2-1) et Videoton (1-0) ont chuté juste avant la pause hivernale. Le coach slovaque a néanmoins encore du pain sur la planche. Il pourra notamment s’appuyer sur l’Australien David Williams en pointe et le Brésilien Myke, éléments les plus offensifs de la pire attaque de NB I (dix-neuf buts marqués).

Créé en 2011, le Balmazújváros FC a obtenu sa montée en OTP Bank Liga pour la première fois de son histoire au printemps de 2017. Le baptême du feu du promu a commencé de manière très délicate, avec une seule victoire sur les douze premières journées de championnat. Le spectre du calvaire perçait à l’horizon. Les Orange et Noir se sont cependant ensuite ressaisis et ont empoché treize points en huit matchs. L’équipe de Ferenc Horváth est sans doute un peu moins bien armée que ses rivaux mais tente de compenser avec son enthousiasme et son cœur, particulièrement à domicile. Transfuge du Dinamo Tbilissi, l’attaquant Bachana Arabuli (qui faisait d’ailleurs à l’époque partie de nos cinq espoirs du championnat géorgien) a vite trouvé ses marques (six buts). Cette bataille pour le maintien sera encore longue et rude. Charge à Balmazújváros d’être dans le coup jusqu’au bout.


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Terminons ce bilan intermédiaire avec la formation qui clôt la marche, à savoir Mesőkövesd-Zsóry. Auteur d’une belle opération sur le marché des transferts en attirant Márk Koszta (Budapest Honvéd), le MSE a remporté ses deux premières rencontres de NB I, à Debrecen (1-2) et contre Paks (3-2). Et puis, plus rien, si ce n’est une très longue traversée du désert (aucun succès entre fin juillet et fin novembre) durant laquelle Miklós Radványi a été remplacé par Attila Kuttor. Les Jaunes ont malgré tout bien terminé l’année 2017 (quatre matchs sans défaite) et ne sont pas encore décrochés, loin s’en faut. Comme quoi, de la première à la dernière place, tout reste encore à faire…

Raphaël Brosse


Image à la une : © AFP PHOTO / ATTILA KISBENEDEK

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