18e titre pour le Sheriff, saison historique pour le Sfântul Gheorghe, le Dinamo-Auto à deux doigts de l’Europe et un Zimbru au fond du trou. Retour sur l’année footballistique 2019 en République de Moldavie.

Etat des lieux

On s’y attendait depuis le début du championnat, le Sheriff Tiraspol a survolé la concurrence cette saison et s’adjuge ainsi le 18e titre de sa jeune histoire. Libéré de ses prérogatives européennes dès le mois d’août suite à une élimination contre l’AIK au 3e tour préliminaire de la Ligue Europa, le Sheriff n’a laissé que des miettes à ses concurrents. 70 points en 28 matchs, meilleure attaque avec 60 buts marqués, meilleure défense avec neuf pions encaissés, autant dire qu’il n’y avait pas photo cette saison. Comme l’an dernier, le Sheriff était au-dessus de tout le monde.

C’est lors d’un match nul arraché à Orhei, face au Milsami, que le Sheriff a assuré son 18e titre de champion.

L’homme de la saison, du côté de Tiraspol, vient de Minsk, en Biélorussie. Yuri Kendysh, globetrotter de ce côté-ci du mur (il a joué au Partizan Minsk, au Torpedo Zhodino, au Dinamo Brest, à Trakai, au Zalgiris Vilnius et au BATE Borisov, entre autres), termine la saison meilleur buteur avec 13 buts au compteur, plutôt pas mal pour un box-to-box. Kendysh a d’ailleurs décidé de retourner au pays cet hiver, où il fera le bonheur du Shaktyor Soligorsk.

Derrière le Sheriff, le Petrocub-Hîncești a terminé troisième, à trois points de son rival surprise, le Sfântul Gheorghe Suruceni, auteur d’une saison fantastique. Milsami continue à être sur la pente descendante en finissant cinquième sur le gong, offrant la quatrième place, potentiellement qualificative pour la Ligue Europa en fonction du vainqueur de la Coupe, au Dinamo-Auto.

L’une des deux seules défaites du Sheriff s’est produite à Hîncești, sur le terrain du Petrocub, en avril dernier. © facebook.com/FCPetrocub

Le Speranța Nisporeni termine à sa place préférée, à savoir le ventre mou, trop bon pour ne jamais être embêté par la relégation, mais trop irrégulier pour venir chatouiller les places européennes. L’écart est en effet énorme entre leur 6e place et l’avant-dernière, occupée par le Zimbru Chișinău, qui s’est quelque peu remis d’un début de saison catastrophique mais sans pour autant chasser tous les doutes. Il termine à onze unités de la place de lanterne rouge, dévolue au FC Codru Lozova. On notera que les hommes de Valeriu Andronic ont remporté leur barrage face aux Spartanii et restent donc en Divizia Națională, tandis que le FC Florești et le Dacia-Buiucani sont promus dans une élite qui passe à dix clubs la saison prochaine.

La belle surprise : Sfântul Gheorghe Suruceni

Le petit village de Suruceni connaîtra donc la Coupe d’Europe en 2020 ! Situé à deux pas de la capitale, Suruceni n’est pas à proprement parler un lieu de villégiature mais plutôt un lieu de passage sur la route Leușeni-Chișinău. Un joli petit monastère y a été érigé au 18e siècle, peuplé aujourd’hui par des nonnes après avoir servi de centre fermé pour narcomanes durant l’époque soviétique. Reste à voir si le stade municipal répond aux normes de l’UEFA pour l’accueil du premier tour préliminaire de la Ligue Europa – nous l’espérons de tout cœur !

Le Sfântul Gheorghe Suruceni est revenu dans l’élite en 2017 et a dépassé toutes les attentes cette saison. Avec un effectif expérimenté où Suvorov, Istrati, Ojog, Cemîrtan, Plămădeală et Focșa ont réussi à faire fructifier leurs qualités dans un collectif bien rodé et difficile à bouger, le SGS a surpris son monde et a gagné contre toutes les équipes hormis l’intouchable Sheriff (quatre défaites). Cemîrtan, Istrati et Mandrîcenco terminent meilleurs buteurs du club avec six réalisations chacun, signe que le collectif a davantage primé sur les individualités. Il faudra désormais confirmer et combler les retours de joueurs prêtés (Cebotari, Focșa, Rozgoniuc) dans leurs clubs respectifs.  Une belle bouffée d’air frais en tout cas pour ce jeune club fondé en 2003 !

Le Sfântul Gheorghe a assuré sa deuxième place lors d’une victoire 2-1 face au Zimbru, sous la grisaille de Suruceni, en novembre dernier. © Footballski

La déception : Zimbru Chișinău

On pouvait s’attendre à une saison compliquée pour le Zimbru lorsqu’à la veille de celle-ci, l’incertitude régnait quant à la poursuite des activités de l’équipe première, faute d’argent. La plupart des joueurs partis, il a fallu bricoler pendant les premières semaines, sous la houlette d’un Sorin Colceag impuissant. Ce sont donc les jeunes du cru qui ont peuplé le onze chișinăuen, pour des résultats faméliques et une avant-dernière place bien méritée à la trêve.

Un regain de forme s’est fait sentir à la reprise, notamment grâce au renforcement de l’entrejeu avec l’arrivée de Patraș et Calugher, permettant d’assurer un maintien face à un concurrent direct inattendu pour un club du standing du Zimbru, à savoir le Codru Lozova. On notera les belles performances notamment d’Anatolie Prepeliță, qui lui ont valu une sélection en équipe nationale, et les belles découvertes de Victor Bogaciuc, Ion Postica, Alexandru Graur ou Petru Neagu. Le MVP de la saison restant Dan Pîslă, infatigable et déterminant dans la construction offensive, il termine meilleur buteur du club avec 5 buts, dont le plus beau de la saison (voir ci-dessous).

Des lumières sous la pluie, au stade Zimbru, où quelques centaines de spectateurs sont venus subir une nouvelle défaite des leurs, face au Milsami Orhei. © Footballski

Le joueur majeur : Maxim Mihaliov

On aurait pu mettre Kendysh mais on a décidé de rendre hommage à un héros discret mais ô combien précieux pour toute équipe. Arrivé au Dinamo-Auto à la trêve estivale l’an dernier, Maxim Mihaliov s’est vite acclimaté au plan de jeu de Dobrovolsky et cette saison, il a annoncé la couleur dès la première rencontre, lors d’une victoire 3-0 contre le Codru Lozova avec deux splendides banderilles du numéro 19 local.

Mihaliov, à l’instar de Pîsla, fait partie de cette gamme de joueurs pour lequel tu payes ta place le samedi après-midi. Dans la mesure où la majorité des matchs de Divizia Națională sont gratuits, c’est un cadeau venu directement de Bender, où le joueur est né en 1986 et où il a débuté sa carrière avec les Jaune et Noir du FC Tighina. Agé de 33 ans, son style de jeu devrait lui permettre de régaler les amateurs de football pendant encore une ou deux saisons.

Mihaliov se défait d’un autre vétéran de la Divizia Nationala, Andrei Cojocari, lors d’un Petrocub Hîncești – Dinamo-Auto. © facebook.com/FCPetrocub

La Coupe

Les demi-finales se dérouleront au printemps et opposeront le Sfântul Gheorghe au Speranța Nisporeni, ainsi que le Petrocub Hîncești au Sheriff Tiraspol. Si le Speranța remporte la Coupe, il retournera en Ligue Europa cet été. Dans tous les autres cas, la quatrième place européenne serait alors dévolue au Dinamo-Auto.

Avant la finale, il y a les 1/32e de finale comme ici, à Milești Mici, où l’ARF Ialoveni (D3) s’est incliné 0-2 contre le Vitoria Bardar (D2), à deux pas de la plus grande cave à vin au monde. © Footballski

Les Féminines

A la trêve, c’est l’Agarista-Ecole sportive d’Anenii Noi qui mène la danse en première division, avec cinq points d’avance sur le Real Success et sept sur le Noroc Nimoreni d’Alina Stețenco. L’Agarista a d’ailleurs enfoncé le clou juste avant la trêve avec une victoire 2-4 à Chișinău, face au Real Success.

On note la saison catastrophique du Narta-ȘS Drăsliceni – situé sur les hauteurs du lac Ghidighici et qui joue dans le village voisin de Ratuș. Quadruple vainqueur du championnat et de la Coupe à la fin des années 2000, quand elles jouaient dans la capitale, le Narta n’est plus que l’ombre de lui-même. Aucun point au compteur, 23 buts encaissés en 7 matchs pour 1 petit but marqué… On leur souhaite de retrouver un peu de sérénité dès la reprise !

Enfin, on signale la victoire de l’Agarista en finale de la Coupe, en juin dernier (3-1 contre Noroc).

Victoire en finale pour l’Agarista-Şcoala Sportivă d’Anenii Noi, leur deuxième d’affilée. © facebook.com/agaristaoficial

Lire aussi : On a discuté avec Alina Stețenco, entraîneure du FC Noroc Nimoreni


Coup de projecteur sur la Divizia A

Le suspens a duré une saison entière et finalement, c’est le FC Florești qui l’emporte. Dans un mano-à-mano déjà légendaire avec le Dacia Buiucani, le hasard du calendrier nous a offert une « finale » lors de la dernière journée à la Joma Arena. Le défi était simple : le vainqueur gagnait la Divizia A. Les deux équipes étaient déjà assurées de monter dans l’élite, grâce à l’élargissement de celle-ci à dix clubs, mais ça n’a pas empêché d’avoir tous les ingrédients d’un match au sommet : des fumis et un soutien constant de la part des ultras du Dacia, un minibus venu de Florești avec ses quelques supporters et leur tambour, un beau soleil de novembre et un scénario de match fou avec rebondissements, exclusions, pénalty raté, décisions d’arbitrage litigieuses, etc.

Derrière le duo de promus, le CSF Spartanii pensait avoir fait le plus dur en arrachant la troisième place au FC Tighina, lors de la dernière journée. Cela lui permettait de jouer un match de barrage contre la lanterne rouge de l’élite, à savoir le Codru Lozova. Malheureusement pour les Spartanii – qui comme leur nom l’indique jouent à Selemet, dans le raion de Cimișlia, le Codru l’emporte avec un but dans les arrêts de jeu. Ils seront dans tous les cas parmi les favoris, en compagnie de Tighina, du Cahul-2005 et du Victoria Bardar pour lutter pour la montée la saison prochaine. En espérant la renaissance du Zaria Bălți, qui termine la saison à une indigente dixième place.

On notera également les vainqueurs des divisions régionales (D3) qui montent donc dans l’antichambre : le FC Falești au Nord, le FC Sucleia au Centre et le FC Olimp au sud.

Un déplacement compliqué mais bien maîtrisé du Dacia-Buiucani au Real Success, dans l’un des « derbys » de la Divizia A. © Footballski

Le chiffre : 39

Il s’agit du nombre de joueurs ayant porté les couleurs du Zimbru cette saison. Un autre signe de l’instabilité qui a régné au club, et particulièrement dans l’équipe première, tout au long de la saison. De nombreux jeunes et de nombreuses recrues n’ont pas permis de trouver un onze de base plus ou moins défini.

Le but : Dan Pîslă

Le onze-type

L’instant Vitalie Damașcan

Tout roule pour le #DamascanPower aux Pays-Bas. Arrivé au Fortuna Sittard cet été, en prêt depuis le Torino, Vitalie Damașcan est l’un des principaux atouts du club limbourgeois, actuel co-meilleur buteur de celui-ci en compagnie de l’élégant Mark Diemers, avec sept buts chacun. Une blessure à la cheville l’a éloigné des terrains durant l’automne – et notamment pour les matchs internationaux des Tricolorii, mais il est parvenu à regagner sa place petit à petit grâce aux qualités qu’on lui connaît : un flair incroyable, un jeu de tête excellent et un danger permanent devant. Il est pour l’instant l’un des protagonistes, tout comme son compatriote Koșelev dans les cages, de la bonne saison du Fortuna dans sa lutte pour le maintien en Eredivisie.

Le 2-0 inscrit en Coupe face à l’ADO Den Haag, en octobre dernier (à 7’15 ») :

Par Thomas Ghislain


Image à la une : en Divizia A, le FC Sireți accueillait le FC Tighina la veille de Pâques, dans le petit village de Sireți, l’occasion de passer un bon moment entre voisins. | © Footballski

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