La période de janvier est propice aux tournois des sélections de jeunes en Europe de l’Est. Après le Mémorial Granatkin (U18) et avant la Coupe du Commonwealth (U21), ce sont les moins de 17 ans qui sont mis à l’honneur à Minsk, durant une semaine, pour la Coupe du Développement. La douzième édition commence dès ce dimanche et promet d’être particulière au vu des équipes qui y participent cette année. Coup de projecteur sur les talents de demain!
Qu’est-ce que la Coupe du développement ?
Ce dimanche 17 janvier, à la Minsk Arena, va avoir lieu le coup d’envoi de la Coupe du développement qui, comme son nom l’indique, concerne les équipes de jeunes de plusieurs pays, à savoir les moins de 17 ans. Principalement est-européens, les participants accueillent cette année deux invités de marque: Israël et l’Iran. Oui, en ce mois de janvier 2016, les ennemis régionaux du Moyen-Orient – ceci est un euphémisme – ont la possibilité de se rencontrer lors d’un tournoi de football de jeunes dans la capitale biélorusse, qui l’eut cru ? Placés dans des groupes différents, ce n’est que la suite de la compétition qui nous dira si l’improbable se produira dans la capitale biélorusse.
A l’instar du Memorial Valentin Granatkin qui se déroule quelques jours plus tôt en Russie, le tournoi est une belle occasion pour les équipes juniors de la région de se confronter aux meilleurs et de garder le rythme pendant une trêve hivernale où on n’allume aucun spot durant trois mois. Auparavant dénommé sobrement le tournoi international de Minsk, un partenariat contracté avec la Banque du développement biélorusse, en 2014, a entraîné l’adaptation de son blaze. La Banque indique que « L’organisation et la tenue de tels événements contribuent à améliorer les qualités des jeunes footballeurs et de la sélection des meilleurs athlètes au sein des équipes de jeunes de la République du Belarus » rajoutant que « dans l’histoire du tournoi, Minsk fut visité par beaucoup d’équipes intéressantes et de joueurs talentueux« .
Voir aussi : Valentin Granatkin, l’esprit soviétique oublié
En 2005, la première édition du tournoi international de Minsk a vu la Serbie-Monténégro remporter le trophée face à la Biélorussie (qui présentait une équipe U16 outre celle des U17), la Pologne, la Lituanie et la Lettonie. Le Belarus s’est ensuite invité au palmarès, suivi par la Russie (qui tient le haut du pavé avec quatre victoires), l’Ukraine et la Belgique qui l’a emporté en 2011, lorsque Julien De Sart, Nathan Kabasele ou encore Nikola Storm étaient du voyage, et en 2013 où un certain Zakaria Bakkali fut élu meilleur joueur du tournoi. Parmi d’autres joueurs talentueux, citons la présence en Biélorussie d’Egor Filipenko, Stanislav Dragun, Denis Polyakov, Davide Santon ou encore Alexander Kokorin.
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En 2013, la Belgique de Zakkaria Bakkali l’emportait aux tirs aux buts face à la Russie
D’année en année, le tournoi s’est étendu géographiquement (la France, la Chine ou le Japon y ont déjà participé) et par la même occasion son format fut modifié à de nombreuses reprises puisqu’il est passé de six équipes au départ à douze actuellement. Déjà en 2012, Yulia Zenkovich, membre de la BFF (Fédération biélorusse de football), déclarait que « l’intérêt des spectateurs et des médias est également croissant, tandis que lors des deux dernières éditions, certains matchs clés, ainsi que les cérémonies d’ouverture et de clôture, étaient diffusés en direct sur Internet« , on vous donne d’ailleurs rendez-vous sur ce lien pour les prochaines retransmissions durant le tournoi. Zenkovich ajoutait alors : « Cela nous rend fier de voir la joie des joueurs participants et nous fait comprendre que ce genre de tournois est vraiment intéressant » et il est difficile de le contredire vu l’invité de marque qui s’est rendu à la Minsk Arena l’année passée.
Le 19 janvier 2015, en effet, le président de l’UEFA, Michel Platini, avait rendu visite au président Lukachenko pour inspecter le développement du football chez les jeunes auquel l’UEFA participe à hauteur de 100 millions d’euros. La visite était également l’occasion d’évoquer les bons liens qui unissent la Biélorussie et l’UEFA à l’image du prochain championnat d’Europe féminin des moins de 17 ans qui s’y déroulera cette année, en mai. Il s’agira donc d’une répétition générale pour la République qui avait par ailleurs organisé d’une main de maître les championnats du monde de hockey sur glace en 2014.
Qui va l’emporter en 2016 ?
Le format du tournoi est simple : trois groupes de quatre équipes avec le vainqueur de chaque poule qui dispute un tour final, et les autres se bagarrent pour les places 4 à 6, 7 à 9 et 10 à 12.
Pour cette 12e édition, le groupe A comporte les hôtes, le Belarus, accompagné de l’Iran, de la Lettonie et de la Slovaquie. Dans le groupe B, l’Arménie, Israël, la Lituanie et la Russie forment ce qu’on pourrait appeler « le groupe de la mort ». Enfin, dans le groupe C, la Moldavie tentera de faire bonne figure face à la Finlande, la Géorgie et l’Ukraine, alors qu’elle avait terminé troisième l’année dernière.
Dans tous les cas, on s’intéressera évidemment à la réaction d’Israël et/ou de l’Iran au cas où les deux pays sont amenés à s’affronter. Généralement, le boycott des athlètes israéliens par ceux de la République islamique entraîne leur disqualification mais les athlètes des deux pays ont montré cet été aux Jeux Olympiques spéciaux qu’il était possible de passer outre les recommandations diplomatiques en prenant plusieurs photos bras dessus bras dessous sous le slogan « faites du sport, pas la guerre » (Make sport, not war). Une amitié qui a pris naissance durant le trajet en avion et auquel le comité organisateur a donné un nouvel élan en organisant le passage de la torche olympique entre les deux pays : Iran et Israël.
Le dernier match officiel de football entre les deux équipes date de 1974 lors des Jeux asiatiques, où l’Iran l’avait emporté 1-0 lors de la finale. Ce match est également le dernier d’Israël en zone Asie : épuisé par les boycotts répétitifs des adversaires de la jeune République, l’AFC les exclut et pousse alors Israël à rejoindre l’UEFA (via la zone… Océanie), mais cela interviendra seulement deux décennies plus tard. Entre-temps, la révolution iranienne est passé par là et l’inimité qui existe entre les deux pays n’a besoin d’aucun dessin.
Le tournoi aura une odeur d’autant plus particulière au vu de la tension qui règne sur les relations diplomatiques entre Israël et la Biélorussie, après la récente décision de lâcher cinq ambassades israéliennes, dont celle de Minsk. Une mesure d’économies selon Israël, mais la Biélorussie ne l’entend pas de cette oreille. Le 11 janvier, peu après que l’information a fuité, le porte parole du ministère biélorusse des Affaires Etrangères avait déclaré : « Nous sommes désolé de confirmer qu’ayant pris compte de la décision de fermer l’Ambassade israélienne de Minsk, la Biélorussie était forcée de prendre une série de mesures pour achever ses activités diplomatiques à Tel Aviv, sur la base du principe de réciprocité », tout en ajoutant qu’il avait confiance dans la restauration des relations diplomatiques dans un futur proche (« ce n’est qu’une question de temps »).
Place au football !
Voilà pour l’hypothétique incident diplomatique. Le football a toujours eu des liens complexes avec la politique et il sera intéressant de voir si le tournoi sera l’occasion de surpasser les différends ou au contraire le miroir de ceux-ci. Toujours est-il que sur fond de tensions diplomatiques entre les hôtes et Israël, d’inimité exacerbée entre Israël et l’Iran et entre la Russie et l’Ukraine, les équipes de jeunes de ces quatre pays-là se réuniront sous la coupole de la Minsk Arena, avec huit autres invités, autour de ce qui nous unit tous: le ballon rond.
Le premier match aura donc lieu dimanche, à 11 heures, entre la Russie et l’Arménie, alors que le Belarus affrontera l’Iran en clôture de journée. Après cinq journées consacrées aux matchs de groupes, les play-offs se dérouleront les trois jours suivants pour déterminer, le dimanche 24 janvier, si la Russie ajoutera un cinquième titre à son palmarès, elle qui l’avait emporté face à la Lettonie l’année dernière. Ce sera en tout cas l’occasion de découvrir de nouveaux talents issus des meilleures académies de nos pays!
Thomas Ghislain
Image à la une : © mzmk.by
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