L’ Hajduk Split, club phare des Balkans, était en proie depuis plusieurs années à de mauvais résultats sportifs comme financiers. Depuis quelques mois, la situation semble s’améliorer avec les actions des supporters, qui semblent à nouveau se donner les moyens de songer à un futur rouge et bleu.
Un club menacé de faillite
L’ Hajduk Split a connu sa période faste dans les années 70 et 90 en gagnant de nombreux titres et en effectuant régulièrement de beaux parcours en coupe d’Europe. Naturellement, la célébrité attire les requins et la belle Split n’a pas échappé aux morsures des carnassiers lui pompant de nombreux millions de dollars. Bien sûr, les fans n’y prêtaient guère attention pendant les périodes de succès du club, débordants légitimement de fierté d’être une des plus belles princesses au bal de la Coupe des Clubs Champions. Même quand les dettes commençaient à grimper en flèche, le gouvernement s’en accommodait en les effaçant d’un coup de baguette magique. Une fois, deux fois et même trois fois. Ça aide d’être glamour et populaire mais ça ne suffit pas, surtout quand les pouvoirs magiques du gouvernement s’estompent. A partir du milieu des années 2000, les dettes se creusèrent pendant que le Dinamo Zagreb devenait la force numéro 1 du pays avec 8 titres de champion consécutifs, des parcours européens (même moyens) et les meilleurs jeunes joueurs du pays. Dépassant la dizaine de millions d’euros de dettes, ne pouvant plus emprunter ni payer ses joueurs, le club phare de Split semblait couler inexorablement dans les profondeurs de l’Adriatique.
La reprise en main de l’Hajduk Split
Arrivé à un certain point, les supporters de l’ Hajduk Split n’acceptèrent plus de voir que leur club finançait des activités criminelles, était miné par la corruption et dirigé par des incompétents. L’illustration ultime de la médiocrité qu’était devenu ce club s’est passé sous la présidence de Joško Svaguša qui n’avait aucune qualification si ce n’est d’être un bon ami du maire de Split de l’époque. Croyez le ou non, l’homme était un… boulanger de profession !
C’est dans ces conditions que le principal groupe de supporters du club (Torcida) est arrivé avec son projet d’initiative civile « Naš Hajduk » (Notre Hajduk) en comptant bien améliorer le fonctionnement du club. Le premier programme à avoir été mis en place, intitulé « kodeks » (code de bonne conduite), prescrit la manière dont les représentants du club de Split (conseil, personnel d’encadrement) doivent se comporter et les qualifications requises pour accéder aux fonctions notamment. Pour faire accepter cela, ils ont organisé des manifestations au Conseil de Ville (plus grand actionnaire du club). Le maire n’étant pas particulièrement populaire dans la ville, il décida d’accommoder ses interlocuteurs et ainsi améliorer son image. Le kodeks était dès lors accepté et mis en place sur le champ.
Des avancées significatives
Après cela, l’initiative Naš Hajduk réussit à aller encore plus loin en obtenant le droit de vote : parmi les 9 membres du Conseil de Surveillance (partie la plus importante de la structure du club), 7 sont désormais choisis par les adhérents au projet. Les supporters ont finalement trouvé un Conseil honnête qui a élu un président décent. Les finances sont toujours dans le rouge en raison des dettes massives héritées des années précédentes mais le club parvient peu à peu à les rembourser depuis que le projet a été mis en place. Le club est certes forcé de vendre ses meilleurs joueurs (Mario Pašalić, 18 ans, vendu à Chelsea cet hiver pour 3 millions d’euros en est le reflet) mais une incroyable cohésion s’est créée autour du club et de la ville. Pour preuve, l’ Hajduk Split réalise cette année une affluence moyenne de 15.000 personnes contre 2.500 pour le Dinamo qui, malgré les résultats, traverse la pire période de son histoire avec la gouvernance en place. Un supporter quadragénaire du club confiait même n’avoir « jamais eu une telle passion et un tel amour pour l’Hajduk, pas même quand il y avait une grande équipe car nous avons enfin notre club. »
Dans le football moderne, qui dit passion dit pognon. Le club a un service marketing très puissant qui génère énormément d’argent. Grâce au contrat de partenariat noué avec Carlsberg, la Hajdučko pivo (bière de l’Hajduk) est née devenant un énorme succès dans la région. De plus, des nouveaux contrats de sponsoring ont été trouvés avec de nombreuses PME locales, ce qui était impensable il y a quelques années.
En réalité, le seul problème de taille restant à régler urgemment est le développement de l’académie. Devant l’incapacité du club à acheter des joueurs de haut niveau pour le moment, l’accent doit être mis sur la formation. Nommer un directeur d’académie serait ainsi nécessaire pour donner un plan clair sur la base du développement des juniors, créer une identité unique qui permettrait aux jeunes pousses de s’intégrer plus facilement à l’équipe senior et diriger une équipe de scouts pouvant dénicher la perle rare en fonction du profil recherché.
Lire aussi : Que devient l’Hajduk Split ? (Article du 12/01/2016)
Bien que le club parte de loin avec d’immenses dettes à régler et une restructuration du club à mener, l’élan créé par les supporters permet enfin au club de s’assainir et de travailler dans la bonne direction. Et puis qui sait, si le club poursuit avec la patience et la stabilité nécessaire, peut-être qu’un jour nous réentendrons parler de la belle et populaire Hajduk Split s’invitant à la prestigieuse cérémonie de la Ligue des Champions.
Damien Goulagovitch
Photo à la une : © PortalOko.Hr
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