On avait eu l’occasion de vous parler de la rencontre opposant l’Allemagne et l’Ukraine à travers une vidéo analysant la sélection ukrainienne et sa probable tactique. Retour sur les faits.
La surprise tactique
Nous avions insisté dans notre briefing tactique sur l’importance du troisième milieu et avions prédit avec justesse dix joueurs sur onze. Il restait cette énigmatique troisième place au milieu. Celle habituellement dévolue à un milieu plutôt relayeur et faux meneur de jeu.
L’oeil du recruteur #5 : Viktor Kovalenko
On attendait Rotan pour son expérience voire Rybalka pour la frilosité de Fomenko mais espérions secrètement Garmash pour son abatage défensif et offensif. Et bien rien de tout ça. Pas de faux meneur non plus, mais un vrai pur 10 : l’élégant et brillant Kovalenko ! Deux sélections au compteur, une cinquantaine de matches professionnels et un talent à éclabousser le désert.
Une surprise énorme. Pour sa première sélection (en mars dernier) contre le Pays de Galles, la pépite du Shakhtar avait évolué au poste de Konoplyanka. Cependant, Fomenko l’avait fait rentrer dans le dernier match amical de l’Ukraine en remplacement de Garmash. Un amical sans grand intérêt face à une Albanie pas franchement fringante ce soir-là. On pouvait à la rigueur s’attendre à le voir rentrer comme troisième milieu pour prendre une option offensive en cas de résultat défavorable. Cette option offensive a été prise d’entrée.
Kovalenko au milieu, qu’est-ce que ça a changé ?
Beaucoup, le coup tactique était beau même si le jeunot a mis vingt minutes avant de pleinement entrer dans son match (avec notamment un joli coup de coude de Kroos pour le baptiser). Une fois que Viktor s’est lâché, l’Ukraine a dominé le match. Pendant les 25 dernières minutes de la première période, en fait. Il est évident que la Mannschaft n’avait pas prévu de bloquer un quatrième joueur pleinement offensif. Ses déplacements entre les lignes ont permis aux ailiers ukrainiens de mieux percuter et causé de gros problèmes aux Allemands.
Le problème c’est que Löw semble s’en être aperçu à la mi-temps. Et semble s’être également aperçu du trou dans le milieu de terrain ukrainien à la droite de Stepanenko. Pire encore, le brûlant Draxler était dans cette zone. Toutes les offensives allemandes en seconde période se sont déroulées ou sont parties de cette zone. Un calvaire pour un Fedestkiy (ArD) abandonné. Il aurait fallu à ce moment-là ramener de la présence au milieu pour reprendre un ballon que les jaunes et bleus ont très peu vu en seconde période. Ce que n’a pas fait Fomenko en ne remplaçant Kovalenko qu’à la 74ème minute par le jeune ailier Zinchenko. Dommage…
Footballski avait vu juste sur…
La défense puissante mais stupide
Rakitskiy et Khacheridi, ça ferait reculer une horde de hooligans avinés. Par contre, ça se fait systématiquement prendre par des appels en diagonale, des contre-appels… Si Hector avait assuré sa reprise alors qu’il était absolument seul dans la surface (les deux grands dadais s’étaient jetés au second poteau), l’Allemagne aurait mené plus tôt. Lorsque Khedira part en plein milieu de l’axe défensif, aucun des deux ne se décide à y aller. Résultat ? Le joueur de la Juve se présente en un contre un face à Pyatov. Un Kucher plus expérimenté mais moins physique mériterait d’avoir sa chance.
Sydorchuk plus vraiment dans le bon ton …
mais toujours titulaire. C’est lui qui lâche le marquage sur le but de Mustafi. C’est aussi lui qui perd un ballon dangereux dans son propre camp qui profite à Kroos. Le milieu a du talent mais n’y est pas cette saison. Fébrile défensivement et inutile offensivement malgré un bon débordement en fin de première mi-temps.
Pyatov comme une boîte de chocolats
Le gardien du Shakhtar est une énigme ceci dit plusieurs médias ukrainiens l’ont couronné homme du match. Son face à face remporté sur Khedira et les frappes lointaines sorties en seconde période ont pesé dans ce jugement. Le dernier rempart ukrainien aura été au niveau sur ce match.
Même si une sortie exceptionnellement ratée sur corner en seconde période a rappelé qu’avec lui tout est toujours possible.
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Si « l’expérience Kovalenko » a eu ses plus et ses minus, elle aura au moins permis de placer les deux ailiers là où ils sont les plus dangereux : dans les quarante derniers mètres adverses. Bien sûr le temps que les Allemands s’aperçoivent du placement nouveau de Kovalenko. En seconde période, lorsque les allemands ont muselé le jeune meneur et insisté sur la zone habituellement couverte par un milieu relayeur droit dans le schéma traditionnel ukrainien, les deux esthètes n’ont fait que courir derrière le ballon. Si seulement Fomenko avait réajusté son équipe à ce moment précis….
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On attendait la tête brulée patriote, au moins dans l’élan qu’il est capable d’apporter à son équipe. Il s’est échiné à bien rester en place pour ne pas marcher sur les plates-bandes de Kovalenko. Son remplaçant, le déserteur Seleznov, aura plus apporté en vingt-cinq minutes que lui en soixante-cinq. Fomenko (qui aime beaucoup Seleznov) va-t-il continuer avec le coucou ?
Mourad Aerts
Image à la une : © PATRIK STOLLARZ/AFP/Getty Images