On connait tous l’histoire du grand Yashin ou encore celle de Rinat Dasaev, deux grands gardiens soviétiques qui ont su marquer l’histoire du football mondial. Mais l’Union soviétique a connu de nombreux gardiens de talent. Ce dossier est l’occasion de porter l’attention sur les autres gardiens qui ont évolué à travers l’histoire de l’URSS. Vous allez faire connaissance avec l’école soviétique des gardiens de but, véritable fabrique à talents. De Nikolaï Sokolov, fondateur de la marque soviétique, à Stanislav Cherchesov, ce dossier s’annonce comme un véritable voyage dans le temps. Sortez les gants, c’est l’heure de sortir une main opposée. Richard. Episode 4.


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Les successeurs

Les années 50-60 ont vu évoluer des gardiens de légende. Elle permit à l’école soviétique de prospérer et de sortir par la suite des gardiens fantastiques. Que ce soit au Dinamo Moscou (Vladimir Puilguy) ou au Dynamo Kiev (Viktor Bannikov et Yevhen Rudakov), le niveau des gardiens en URSS ne faiblissait pas. Il permit même d’atteindre, avec le Dynamo Kiev, le sommet des compétitions européennes.

Vladimir Pilguy, passage de témoin

Yashin laisse les commandes de la Sélection soviétique à partir de 1967. Mais qu’en est-il au Dinamo Moscou où Lev Yashin détient les clés des cages depuis… 1952 ? C’est sur un gardien ukrainien, Vladimir Pilguy, que le dévolu est lancé.

Vladimir Mikhaïlovich Pilguy est né le 26 janvier 1948 à Dniepropetrovsk et, comme on peut l’imaginer, il commence sa carrière dans le club principal de sa ville, le Dnipro ! Chez les jeunes jusqu’à 19 ans, il intègre l’équipe première en 1967. Deux ans plus tard, Valery Lobanovsky prend les commandes du Dnipro. Le tout jeune entraîneur de 30 ans met en place une équipe offensive et fait confiance à Vladimir Pilguy. Mais au terme de la saison, le gardien quitte l’Ukraine pour la capitale soviétique et pose ses valises au Dinamo Moscou. Il y restera 11 ans…

Vladimir Pilguy arrive au Dinamo alors que Lev Yashin vit sa dernière année de joueur professionnel. Une année pour passer le témoin et au final remporter un dernier trophée avec la Coupe d’URSS. Pour Vladimir Pilguy, c’est une année pour apprendre, pour observer une légende du football, s’entrainer à ses côtés. Dans une interview, il exprima d’ailleurs leur relation :

« Je n’ai jamais senti un sentiment de supériorité de la part de Yashin. J’ai vu au contraire un support paternel de sa part, même dans le cas où j’agissais mal. N’importe quel gardien sent qu’il se trompe. À la suite d’une erreur sur le terrain, je m’assieds dans un coin du vestiaire, la tête sur la poitrine. Lev Yashin arrive : « Pourquoi tu fais la tête ? Jusqu’à ce que tu ne prennes pas tes 500 buts, tu ne seras pas un gardien. » Yashin était un fan de foot et souhaitait que celui qui devient gardien ait la même passion. Il ne supportait pas le laxisme et la présomption. »

De son côté, Yashin n’est pas moins élogieux lorsqu’il parle de son successeur :

« Je restais attentif en me penchant sur le jeu de ma jeune doublure. Il ne m’a pas fallu beaucoup de temps pour juger ses possibilités. Rapide, intelligent, bon sauteur, possédant une réaction immédiate, avec une coordination étonnante, il annonçait de grands espoirs. »

Lev Yashin sait qu’il a trouvé en Vladimir Pilguy un successeur digne de lui. Et le jour de son jubilé en mai 1971, dans un stade Lénine plein à craquer avec 100.000 spectateurs, Lev laisse sa place à Vladimir Pilguy à la 70e. La passation de pouvoir se passe dans l’allégresse et les larmes. La longévité de sa carrière au Dinamo est la preuve que l’araignée noire ne s’était pas trompée sur son compte.

Lev Yashin et Vladimir Pilguy | © Donskoy Dmitryi / RIA Novosti / Sputnik via AFP Photos

Onze années au Dinamo avec lequel il jouera 223 matchs et remportera 2 Coupes d’URSS. Il terminera sa carrière de joueur au Kuban Krasnodar. Il sera sélectionné 16 fois au cours de sa carrière (dont 4 fois avec la Sélection olympique avec laquelle il sera 2 fois médaillé de bronze aux Jeux de Munich 72 et aux Jeux de Moscou 80). Membre du « club Yashin », il est considéré comme l’un des meilleurs gardiens des années 70.

Viktor Bannikov et Yevhen Rudakov, l’émergence des gardiens du Dynamo Kiev

Le Championnat d’URSS, comme son nom l’indique, a la grande particularité de rassembler une multitude de clubs de tous les États socialistes. Nous avons pu voir qu’à travers l’histoire, différentes Républiques socialistes soviétiques, telles que la Géorgie ou l’Ukraine, ont façonné une quantité importante de gardiens aux spécificités propres. Mais peu de clubs hors Russes ont mis la main sur l’évolution de l’école soviétique des gardiens. Le Dynamo Kiev est l’un de ces clubs par l’intermédiaire de deux gardiens, Viktor Bannikov et Yevhen Rudakov.

Cette évolution est à mettre en corrélation avec les performances du club de la capitale ukrainienne. Le Dynamo Kiev est le premier club non russe à remporter le Championnat soviétique, en 1961. Sous l’impulsion de Vyacheslav Solovyov, le Dynamo réalise une saison quasi parfaite en ne perdant que trois matchs durant la saison. Disposant de joueurs tels que Valery Lobanovsky, Jozef Szabo ou encore Oleg Makarov que nous avons évoqué auparavant. Ce dernier tient les cages bleue et blanche depuis plus d’une décennie et à 32 ans, le besoin de renouveau se fait sentir. Le Dynamo porte ainsi son dévolu sur un gardien ukrainien de 24 ans, Viktor Bannikov.

Viktor Bannikov, c’est l’histoire d’une légende du football totalement atypique ! Né le 28 avril 1938 à Luginy dans la région de Zhitomir (nord-ouest de l’Ukraine), il connaît une enfance plus que mouvementée. Perdant son père très jeune à la guerre, il vécut son enfance au rythme des évacuations. De retour chez sa mère en 1946 à l’âge de 8 ans, Victor Bannikov n’a pas le temps de penser à jouer au football dans la cour avec ses copains, obligé de travailler la journée dans une fabrique de chaussures et d’aller à l’école le soir. D’ailleurs, le football n’est pas sa priorité. Il préfère le saut en hauteur, le Basketball puis le volley-ball. Sa carrière de footballeur ne débute qu’à partir de ses 20 ans, lorsqu’un inconnu lui propose le rôle de gardien de but dans l’équipe de son usine. Le jeune Viktor accepte l’offre et s’aperçoit vite qu’il a tout ce qu’il faut pour devenir un grand gardien.

Et cela ne passe pas inaperçu puisque dès 1959, l’Avangard Zhitomir le prend sous son aile et moins de 3 ans après, le « jeune » Viktor Bannikov signe au Dynamo Kiev. Au côté d’Oleg Makarov, Bannikov devient rapidement un élément important de l’équipe. La présence de Boris Razinsky et de Yevhen Rudakov dès 1962 ne peut que l’amener vers les sommets. Ce sera le cas dès 1964 lorsque Bannikov est un des artisans majeurs de la victoire du Dynamo en Coupe d’URSS. Durant cette même année, il connaît sa première sélection avec l’URSS et est élu meilleur gardien de l’année. Et dire qu’il y a cinq ans, le football ne faisait pas partie de sa vie !

Mais pour y arriver, Bannikov a enchaîné les séances de travail : « Pas un jour, il se permettait de se détendre. En plus des entraînements de football, il courait, travaillait à la barre, nageait des heures à la piscine ». À l’instar de Yashin, son jeu simple et efficace impressionne.

Viktor Bannikov remporte par la suite trois autres championnats soviétiques (1966, 1967 et 1968) même s’il déclarera ne pas avoir reçu de médaille pour le Championnat 1966, n’ayant pas joué suffisamment de matchs… Combiné à une deuxième Coupe d’URSS en 1966, Bannikov évolue dans ce Dynamo Kiev qui gagne tout à la fin des années 60. Sous la houlette de Viktor Maslov, Bannikov devient un gardien influent… sur la scène nationale. Car sur la scène internationale, Yashin est toujours là. Sa convocation pour la Coupe du monde 1966 en Angleterre ne lui permettra pas de se montrer puisqu’il ne jouera aucun match de la compétition. Une frustration qu’ont connu pas mal de ses collègues… et qui s’accentuera par la suite le concernant en voyant Yevhen Rudakov lui prendre progressivement sa place de titulaire au Dynamo.

Après 8 ans de loyaux services et 151 matchs avec les couleurs bleues et blanches, Viktor Bannikov rebondit au Torpedo Moscou, avec lequel il remporte une 3e coupe d’URSS (1972). Il ramène par ailleurs une médaille d’argent lors des Championnats d’Europe 1972 en Belgique. À la fin de sa carrière, il aura quelques expériences en tant qu’entraineur, mais c’est surtout du côté des instances qu’on le retrouve à partir des années 90. Comme Président (1991-1996), puis vice-président (1996-2001) de la Fédération ukrainienne de football.

Mais revenons à la période de gloire du Dynamo Kiev si vous le voulez bien. Sous Bannikov, le Dynamo pose sa main sur le Championnat, mais c’est avec les gants de Yevhen Rudakov que le club ukrainien va atteindre les sommets de l’Europe.

Yevhen Rudakov né à Moscou le 2 janvier 1942. À l’inverse de Bannikov, Rudakov commence sa carrière dans l’équipe réserve du Torpedo Moscou. On lui fait comprendre qu’il ne fera pas partie de l’équipe première et qu’il est préférable qu’il aille s’affermir ailleurs. Le choix se porte sur le club ukrainien du Sudostroïtel de Nikolaïev qui lui assurerait du temps de jeu. Mais comme on peut l’imaginer, le Dynamo, qui avait vent de toutes les bonnes pépites sur le territoire ukrainien, même russes, n’hésite pas en 1963 à le signer.

En concurrence avec Bannikov, le Moscovite prit au fur et à mesure l’ascendant jusqu’à ne plus quitter les cages. Malgré les défaites et les erreurs, comme ce but entre les jambes en 1967 contre le Dinamo Moscou, Rudakov impose sa classe, tant dans les airs qu’au sol. Remportant les trophées comme on empile des cubes (Championnats d’URSS 66, 67, 68, 71), Rudakov et les siens dominent presque sans partage le football soviétique de la fin des années 60 (Le Spartak remporte le championnat 1969). Mais sa carrière est interrompue à la suite d’une grave blessure à l’épaule lors d’un match de préparation pour la Coupe du monde 1970 au Mexique face à la Colombie.

Malgré le pessimisme des médecins quant à son retour, Rudakov revient au top de sa forme et réalise en 1971 l’une des plus belles saisons de sa carrière permettant au Dynamo Kiev, par ses grandes prestations, de remporter le championnat d’URSS. En octobre 71, il dégoûte à lui tout seul la sélection espagnole lors du match de qualification pour la Coupe d’Europe 1972, effectuant des arrêts prodigieux et permettant à la sélection soviétique de quitter Séville sur le score de 0-0. Ce match sera considéré comme l’un des plus aboutis de sa carrière.

Ayant raté la Coupe du monde 1970 au Mexique, il se fait connaître aux yeux du monde lors de la Coupe d’Europe 1972 en Belgique. L’Union soviétique parvient jusqu’en finale, mais doit s’incliner face à la RFA et son incontournable buteur Gerd Müller, qui y va de son doublé, sur le score de 3-0. Rudakov finit dans l’équipe type du tournoi et, pour la 3e fois, est sacré meilleur gardien de l’année par le journal « Ogonyok ». Rudakov est aussi le gardien de la sélection olympique soviétique lors des Jeux de Munich 1972 où il remporte la médaille de bronze. À cette occasion, Rudakov peut prendre sa revanche sur Gerd Muller…

Côté club, les choses évoluent dès 1973 avec l’arrivée de Valery Lobanovsky comme entraîneur. Le début de l’âge d’or du Dynamo Kiev peut ainsi commencer. Disposant d’une équipe redoutable avec Viktor Maslov, Leonid Buriak ou encore l’incontournable Oleg Blokhin, le Dynamo va d’abord remporter le doublé Coupe/Championnat en 1974. Mais c’est l’année suivante, en 1975, que le club de la capitale ukrainienne entre dans l’histoire en remportant la Coupe d’Europe des vainqueurs de Coupe et la Supercoupe d’Europe face au Bayern de Gerd Muller, les premiers trophées de l’histoire du football soviétique ! L’occasion pour Rudakov de prendre sa revanche sur l’allemand, 3 ans après la désillusion de 1972. Solide sur sa ligne, quasi imprenable, Rudakov aura été avec Blokhin et les autres un des artisans majeurs de l’une des plus belles épopées européennes de l’histoire du football soviétique.

Il remporte un dernier Championnat d’URSS en 1977, année où il prend sa retraite professionnelle, faisant de lui l’un des joueurs soviétiques les plus capés de l’histoire. Il consacrera le restant de sa vie au centre de formation du Dynamo Kiev. Rudakov restera comme un des gardiens les plus spectaculaires du football.

Le Dynamo Kiev au travers de Bannikov et de Rudakov aura posé sa main sur l’école soviétique des gardiens, confirmant, tant d’un point de vue du palmarès que du jeu, son hégémonie sur le football soviétique des années 60-70.

En 1977, à Moscou, un jeune gardien en provenance du Volgar Astrakhan dépose ses valises à Tarasovka, centre d’entrainement du Spartak Moscou. Il sera le chef de file de l’école des gardiens soviétiques durant les années 1980.

Rinat Dasaev, l’autre légende

Tout comme Lev Yashin, je ne rentrerai pas dans la biographie détaillée du gardien. Je vous conseille de vous référer à notre article déjà publié.


Lire aussi : Rinat Dasaev, le maître en son temps


Rinat Dasaev, c’est deux championnats soviétiques (1979, 1987) en termes de palmarès. Pas fantastique pour un des gardiens que l’on retrouve souvent dans les classements des meilleurs portiers de l’histoire. Deux choses peuvent l’expliquer.

Tout d’abord le fait que Rinat Dasaev est, durant sa carrière, fidèle au Spartak Moscou (hormis ses dernières années au FC Séville) ainsi que l’importance du Dynamo Kiev durant cette période. Il connait la remontée du club rouge et blanc à son arrivée en 1978 sous l’autorité de Konstantin Beskov. Leur relation est la clé de son ascension. C’est le tacticien qui va lui faire confiance et influencer grandement son style de jeu :

« Je n’étais pas mauvais dans les sorites. Konstantin Ivanovich m’a appris à ne pas relancer la balle au pied, mais à lancer la balle à mes partenaires à la main de manière plus précise. Cela permet les contre-attaques rapides. J’ai aussi appris à diriger les joueurs, non seulement les défenseurs, mais aussi l’ensemble de l’effectif, les milieux comme les attaquants. En effet, un gardien est placé idéalement pour voir le jeu »

À travers ces déclarations, on retrouve celles de Lev Yashin où le besoin de voir le gardien comme un acteur à part entière du jeu était présent. Dasaev a permis de faire évoluer les préceptes de son illustre prédécesseur. Il développa par exemple la pratique du lancé « enroulé » au lieu du lancé « cassé » (manière de lancer le ballon en le balançant par dessus la tête). Cette technique permettait d’envoyer le ballon bien plus loin et ainsi d’atteindre les milieux de terrain ou les attaquants. Les contre-attaques pouvaient ainsi se développer directement en sautant les premières lignes adversaires.

Rinat Dasaev a, durant sa carrière, côtoyé des gardiens d’expériences qui lui ont permis de progresser rapidement. Il a profité de s’entraîner aux côtés de Yuri Makov durant ses années au Volgar Astrakhan. Mais c’est surtout au Spartak avec Aleksander Prokhorov qu’il peut vraiment côtoyer le haut niveau. Durant sa carrière, Aleksander Prokhorov a lui aussi connu la joie de gagner sous les couleurs du Dynamo Kiev, en 1971. Son arrivée coïncide avec la blessure de Rudakov. Il parvient à jouer 18 matchs sous le maillot de la capitale ukrainienne, mais le retour en forme de Rudakov l’oblige à quitter le club pour espérer du temps de jeu. Le Spartak Moscou saute alors sur l’occasion et c’est avec les rouges et blancs qu’il put s’exprimer de la plus grande des manières. En revanche il ne put éviter l’ascension fulgurante de Dasaev au Spartak.

Tout comme l’ « araignée noire », Dasaev a toujours eu un impact direct sur ses coéquipiers, tant dans le jeu que dans la motivation. Rinat perdurait la tradition des gardiens « capitaine ». Le fait qu’un portier soit capitaine n’a rien d’anodin. De par sa position, il est l’homme idéal pour prendre le relais de l’entraineur sur le terrain.

Durant les années 80, il est le principal gardien du Spartak Moscou et de la Sélection nationale soviétique, comptabilisant 91 sélections. Au cours des différentes compétitions internationales, Rinat Dasaev représente grandement l’école soviétique des gardiens de but.

« Après tant d’années, j’ai vu dans les buts de la Sélection soviétique un gardien dont la confiance et le courage m’ont rappelé le grand Yashin contre lequel j’ai eu la chance de jouer il y a 16 ans à Londres. »

La déclaration d’Eusebio pose évidemment la question de la possible comparaison entre Dasaev et Yashin. Difficile de comparer deux gardiens qui ont évolué durant deux différentes périodes. On dira plutôt que le premier est le prolongement du deuxième, tant d’un point de vue temporel que dans le jeu. Il n’a pas reçu le Ballon d’or, mais il fut de nombreuses fois récompensé en URSS et au niveau mondial. Un maître en son temps qui a fait le saut de jouer à l’étranger, chose peu courante et toute nouvelle pour un joueur soviétique, qui plus est avec l’aura qu’il avait.

Mais tout comme Yashin, Dasaev a accaparé durant ses années d’activité la place tant convoitée de portier de la sélection nationale. Des gardiens tels que Viktor Chanov en ont fait les frais.

Viktor Chanov, une dynastie de gardiens

Pour tous ceux qui connaissent l’histoire du football soviétique, Chanov n’est pas un nom étranger. C’est d’abord Viktor Gavrilovich Chanov, gardien ukrainien du TsDKA de 1948 à 1952 avec lequel il remporte deux Championnats soviétiques (1950,51) et une coupe d’URSS en 1951. À la suite de la dissolution du TsDKA en 1952, il joue jusqu’en 1959 au Shakhtar (ancien Stalino) avec lequel il est consacré deux années de suite meilleur gardien ukrainien (1958, 59).

Chanov c’est aussi son fils, Viacheslav Viktorevich Chanov, qui débute sa carrière au Shakhtar puis, de 1979 à 1984, évolue au Torpedo Moscou. Il aura durant les années 80 quelques sélections avec l’URSS, notamment avec la Sélection olympique. Joueur du CSKA de 1987 à 89, il devient après sa carrière entraineur des gardiens de but au club de l’Armée. Il est l’un des artisans de la formation d’Igor Akinfiev, gardien emblématique du club et de la Sélection russe depuis les années 2000.

Mais celui qui nous intéresse plus particulièrement ici, c’est Viktor Viktorevich Chanov, petit frère de Viacheslav. Tout comme son frère ainé, Viktor Chanov démarre sa carrière au Shakhtar Donetsk de 1978 à 1981. Durant ces années, il se fait remarquer lors de la victoire de la Sélection jeune lors des Championnats d’Europe de 1978 puis en 1980 avec les Espoirs.

Installé au poste de titulaire, le Dynamo Kiev ne tarde pas à s’intéresser à lui. Le grand Lobanovski va même le harceler pour qu’il intègre l’effectif. Il faudra sept entretiens et la pugnacité du tacticien ukrainien pour faire signer Chanov au Dynamo Kiev en 1982.

Il fait alors partie de cette équipe du Dynamo qui met de nouveau à mal la suprématie russe sur le Championnat soviétique en remportant notamment le doublé Coupe/Championnat 1985. Son palmarès au Dynamo est à l’image du club à cette époque, intenable tant en URSS (Championnats 1985,86, 90, Coupe 1982, 85, 87, 90) qu’en Europe où il remporte la Coupe des vainqueurs de coupe en 1986. Période dorée du Dynamo à laquelle participe grandement Chanov, comptabilisant pas moins de 202 matchs en 8 ans (1982-1990) sous le maillot bleu et blanc.

Mais encore et toujours, c’est une autre affaire en Sélection nationale. Durant la même période, il ne connait « que » 21 sélections en ayant participé à trois Coupes du Monde (1982, 1986, 1990), mais ne jouant en définitive qu’un match en phase finale contre le Canada en 1986. Et même lorsque Lobanovsky détient la Sélection entre ses mains, rien ne change. Le tacticien construit son effectif autour de son club, le Dynamo, sélectionnant 9-10 joueurs de Kiev, mais cela n’empêche pas de voir Dasaev sélectionné. Il est clair que Lobanovsky a dû faire une concession vis-à-vis des autres clubs. Ne sélectionner que des joueurs du Dynamo aurait fait tache. Elle fut fatale à Viktor Chanov. Et peu importe que les résultats de l’ukrainien soient bons…

Comme les autres, Viktor Chanov donne tout pour son club et en 1990, il quitte Kiev pour le Maccabi Tel-Aviv avec lequel il remporte entre 1990 et 1993, deux championnats d’Israël (1990, 91) et deux Coupes d’Israël (1991, 93). Comme on peut le constater, le palmarès ne décidait en rien d’une place comme portier de l’équipe nationale. Viktor Chanov a dû se résoudre à voir Dasaev représenter les couleurs de la Nation.

© Djvigrid

Cherchesov, le losange dans la peau

En club, Dasaev ne laisse que peu de place. Stanislav Cherchesov peut le confirmer. Né à Alaguir en Ossétie du Nord, c’est là qu’il commence à jouer au foot, d’abord comme attaquant et ensuite comme gardien. Dès sa tendre enfance, il ne cache pas son envie de jouer un jour pour le Spartak Moscou. À partir de 1981, son rêve se réalise. Enfin, pas totalement, puisqu’il signe pour le Spartak… Ordzhenikidze (Alania). Son rêve devient réalité trois ans plus tard lorsqu’il rejoint le Spartak Moscou.

Mais comme on peut l’imaginer, la concurrence est totalement déséquilibrée face au « rideau de fer » qu’est Dasaev. Konstantin Beskov le garde tout de même dans l’effectif et le jeune ossète joue quelques matchs (13). Mais comme si le losange était trop lourd à porter, Cherchesov ne performe pas vraiment durant ces quelques miettes de jeu.

En 1988, Cherchesov est proposé au Lokomotiv, pas tellement heureux de l’accueillir. Au final, il jouera 30 matchs pour revenir au Spartak Moscou avec le plein de confiance, d’autant plus que la légende Dasaev a quitté Moscou pour rejoindre Séville, laissant la place de titulaire vacante. Durant les quatre années suivantes, il jouera 121 matchs sous le maillot rouge et blanc, consécration pour celui qui par la suite, connaîtra une période au Dynamo Dresde puis au Tirol Insbruck où il est considéré comme une idole.

Cherchesov est l’exemple du gardien qui effectuera la transition entre une formation soviétique et une carrière dans le nouveau championnat russe.

Conclusion

Une grande histoire que l’école soviétique des gardiens de but. Des légendes qui ont marqué le football mondial et des gardiens de talent qui ont laissé leurs traces dans leur club respectif. Tout ce beau monde a cohabité dans un championnat qui a connu de nombreux soubresauts, tant dans son organisation que dans la place qu’il eut dans l’histoire de l’Union soviétique.

Ces gardiens ont su développer leurs théories et les adapter à leur jeu. Le football moderne que l’on connaît aujourd’hui est en partie grâce à eux, ne l’oublions pas. Ces gardiens tels Akimov ont écrit des livres théoriques sur le rôle du gardien, ses manières, son placement ou encore les programmes des entraînements spécifiques. Une vraie mine d’or…

qui a repris le flambeau ? Incontestablement Igor Akinfiev qui, depuis les années 2000, laisse des miettes à ses homologues, tant en club qu’en Sélection. Et la Coupe du Monde  2018 approchant à grands pas, on voit mal quel gardien pourrait lui prendre sa place. Non, à 31 ans, à moins d’une blessure, le gardien emblématique du CSKA gardera les portes de la Sélection russe.

Yashin sauvera-t-il Akinfiev d’un but probable en stoppant le temps ? Non, mais la mémoire de ces légendes du sport soviétique raisonnera durant la compétition, du moins lors de la cérémonie d’ouverture. Comment pourrait-il en être autrement ?

Vincent Tanguy


Image à la une : © RIA Novosti archive, image #103489 / Alexander Makarov / CC-BY-SA 3.0

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