Les fidèles lecteurs de ce site ne sont pas sans connaître la fameuse CONIFA, qui organise chaque année une compétition réservée aux équipes de nations et de peuples non représentés, de dépendances, d’Etats non reconnus, d’autonomistes, de minorités et d’Apatrides qui ne sont pas affiliés à la FIFA. Nous étions à la Coupe du Monde à Londres en 2018. Cette année, pour le championnat d’Europe, nous avons sauté le pas et emprunté la sinueuse route nous menant au Haut-Karabagh, ou Artsakh comme le nomment les Arméniens.

En organisant son Euro dans cette région disputée entre l’Azerbaïdjan et l’Arménie, la CONIFA nous a offert une belle opportunité d’aller voir ce qu’il s’est passé depuis le conflit du début des années 1990, opposant les sécessionnistes soutenus par les forces arméniennes aux autorités azéries. Le bilan est lourd : 30 000 morts, des centaines de milliers de réfugiés et un héritage lourd à porter. Et même si un cessez-le-feu fut signé en mai 1994 entre l’Azerbaïdjan, l’Arménie et le Haut-Karabakh, aucun règlement politique n’a été trouvé à ce jour. Le Haut-Karabagh n’est reconnu par aucun Etat officiel, pas même l’Arménie. 

Un endroit bien vivant

D’Erevan, sous une chaleur écrasante, nous prenons une des deux seules routes qui mènent à Stepanakert, la capitale. Le chauffeur a choisi la nouvelle, inaugurée en 2017, longeant le lac Sevan, perle bleue d’Arménie. Après 3 heures de route, un panneau nous indique « Welcome to Artsakh ». Pourquoi Artsakh ? En 2017, le Haut-Karabakh s’est rebaptisé République d’Artsakh, nom qui désignait autrefois la dixième province du royaume d’Arménie. Tous les Arméniens parlent d’ailleurs d’Artsakh et non du Karabagh, le nom azéri. C’est pourquoi nous utiliserons cette appellation tout au long du récit.

Le poste frontière, situé en Azerbaïdjan selon le GPS, est vite passé. Les douaniers ne sont pas embêtants malgré la problématique. Nous nous enfonçons ensuite dans les montagnes : « Tu vas voir, la nature ici est superbe, » annonce le chauffeur. Et nous aurons tout le temps de l’admirer. De la frontière à Stepanakert, il n’y a aucune ville, et presque aucune trace d’habitation humaine pendant 2 heures 30 de route sinueuse à flanc de montagne. Ancien chef-lieu méconnu durant l’époque soviétique, Stepanakert est devenue la capitale de la République de l’Artsakh mais n’en reste pas moins totalement enclavée. La ville est seulement accessible depuis l’Arménie, au prix donc d’une longue route. L’aéroport n’est pas utilisable en raison du blocus azéri : tout appareil qui se poserait sur la piste serait ouvertement menacé d’être abattu.

Arrivé à 23h, nous filons directement au concert en plein air d’un chanteur pop d’Artsakh, Andreï Hovnanyan, alias « André ». L’ambiance est vivante, la foule composée surtout de jeunes chante, danse, crie, sourit. La première soirée à Stepanakert nous donne l’impression d’être dans une ville jeune et dynamique. Même si les nombreuses fresques à la gloire de l’armée et quelques hommes avec un moignon visible nous rappellent une autre réalité, l’impression positive nous sera donnée toute la semaine.

Le lendemain, au réveil, nous filons le ventre vide vers le Media Center pour essayer d’organiser notre semaine. Par chance, nous sommes accueillis par des jeunes volontaires de la CONIFA, qui nous offrent leur fameux jengyalov hac à manger, dont les habitants sont si fiers. Ce pain dans lequel sont fourrées une vingtaine d’herbes sauvages est le principal plat traditionnel d’Artsakh. La télévision locale, nous voyant avec, nous a même interviewé pour savoir ce que l’on en pensait !

Finalement, nous n’organisons pas grand-chose, mais nous profitons de ce lieu central pour rencontrer du monde, entre les volontaires, les journalistes et ceux qui travaillent pour la CONIFA. Nous en profitons aussi pour revivre la cérémonie d’ouverture de l’Euro de la veille. Haig, jovial Brésilien globe-trotter qui vit en Arménie (et parle arménien) a été impressionné : « L’ambiance était géniale, tout le monde était à fond pour cette cérémonie ! Le stade ne peut contenir que 7 000 – 8 000 sièges, mais il y avait 10 000 personnes. Les gens s’asseyaient sur les escaliers, sur l’herbe autour du stade. Tout le monde était heureux, dansait et interragissait avec ce qu’il se passait. Il faut dire que la cérémonie et les feux d’artifice étaient superbes. »

Natali, 18 ans, était à cette cérémonie, en tant que volontaire de la CONIFA. Comme beaucoup de jeunes qui viennent assister à la cérémonie ou aux matchs, elle aime bien le foot mais est surtout attirée par l’évènement et toute l’attention qu’il draine dans la République : « J’aime bien le football, je supporte l’Allemagne à l’Euro ou la Coupe du Monde. Mais je suis surtout heureuse que ce soit le premier tournoi européen qui se joue en Artaskh. C’est trop cool que ça se passe ici ! Pour nous les jeunes, c’est une super occasion de voir comment une compétition de ce type se déroule et bien sûr, de pouvoir discuter avec plein de personnes de cultures différentes. » Même s’il y avait des Azéris ou des Turcs présents ? « J’essaye de voir les choses de façon positive. S’ils voulaient venir ici, j’aurais discuté avec eux. Tu sais, ces histoires sont politiques. Les guerres font toujours des victimes, dans les deux camps. » Est-elle représentative des jeunes du pays ? « Oui, nous voulons la paix et avancer. Les nouvelles générations sont moins agressives que les précédentes. »

Un son de cloche effectivement partagé par les 18-25 ans avec lesquels nous avons pu discuter tout au long de la semaine. Pourtant, ils n’ont pas un choix immense. En plus des cours de préparation militaire au collège (garçons et filles), deux ans de service militaire sont obligatoires pour les garçons. L’armée est le premier employeur de la région et la ligne de front est à seulement 50 kilomètres de la capitale. Natali nous a raconté que sa famille et elle ont eu peur en entendant les bruits d’obus et les snipers lors de la Guerre de 4 jours en 2016 sur le front (350 morts des deux camps). Encore aujourd’hui, environ une fois par mois, un soldat est tué à la frontière.

La déception sportive

Le lendemain de la cérémonie, Artsakh-Sapmi lance officiellement la compétition dans le stade de la capitale. Pour cet Euro, le stade a été rénové à l’image de la ville qui s’efforce d’effacer les stigmates de la guerre depuis plusieurs années, reconstruisant de nombreux immeubles détruits pendant le conflit. Beaucoup de bâtiments neufs, comme le Parlement, nous interrogent sur la source du financement de cette République, où l’armée et l’agriculture sont les principaux fournisseurs d’emplois. Visiblement, la réponse se trouve du côté de la diaspora française, américaine ou russe qui investit en contrepartie d’avantages fiscaux.

C’est devant un stade rempli et totalement acquis à la cause de l’Artsakh que les locaux s’imposent 3-2, avec un penalty généreux en fin de match. La performance ne nous éblouit tout de même pas, sachant que Sapmi est une des équipes les plus faibles de la compétition. Mais il faut être réaliste : la sélection n’en est qu’à sa deuxième participation à un tournoi CONIFA après la Coupe du Monde à Östersund (Suède). Une participation d’ailleurs validée au tout dernier moment, la faute à quelques coups de fil azéris tentant de dissuader la CONIFA de les inscrire. Deuxièmement, l’équipe n’a pas eu le temps de se préparer : « Les gars se sont rassemblés 15 jours avant le tournoi, c’était très compliqué ». Troisièmement, les joueurs, venant principalement du championnat arméniens, ne sont pas aussi cotés que ceux de l’Arménie de l’Ouest, par exemple. D’autres joueurs jouent dans le championnat local (reformé en 2018, avec huit équipes). Le premier championnat a été remporté par le Lernayin Artsakh FC, basé à Stepanakert. Ce club historique, fondé en 1927, a participé à la troisième ligue soviétique. Depuis, Lernayin a vogué entre le championnat arménien et les différents championnats locaux, faits et défaits au fil des années et de l’argent qu’il y avait (ou non).

Le lendemain, la sélection locale joue à Martouni contre Chameria. Nous prenons le bus affrété par la CONIFA pour effectuer les 50 minutes de trajet. Là encore, les paysages époustouflants font passer le trajet presque trop rapidement. Sur place, une belle arche d’entrée nous attend. On apprend que le stade, sorti de terre pour la compétition, a coûté 300 000€, une somme réglée par un Russe de la diaspora. 1 500 locaux impatients se massent dans le petit stade, dont Artak, la quarantaine : « C’est un événement crucial pour notre nation, nous voulons être reconnus. Grâce à cette compétition, on est heureux, on se sent comme si on faisait partie du monde. »

Artak nous explique fièrement la spécificité de cette petite ville de 5 000 habitants, située dans la deuxième région la plus développée de l’Artsakh : « Durant la guerre, notre région a fait la fierté de la nation car elle n’a jamais abandonné, a lutté jusqu’au bout pour protéger le pays. Dans l’imaginaire, la région de Martouni est héroïque. L’un de nos héros de guerre a aussi combattu ici ». Effectivement, aux alentours, des traces ici et là nous rappellent que Martouni et son district étaient une ligne de front lors de la fin de la guerre. Les Arméniens ont remporté cette bataille décisive, laissant dix villages azéris brûlés derrière eux.

Sur le terrain, la guerre n’est pas à l’avantage des joueurs de l’Artsakh, qui s’accrochent à un match nul 1-1 à 10 minutes de la fin contre une équipe technique de Chameria. Laquelle se voit accorder un pénalty. Après la transformation, l’Artsakh sombre totalement et encaisse deux autres buts. La surprise est totale pour les spectateurs qui s’attendaient à une démonstration de leur équipe. Alors que Chameria marque le troisième but, les gens commencent déjà à quitter le stade.

Le troisième et dernier match de groupe est joué le lendemain, toujours à Martouni, contre l’ogre d’Abkhazie qui a gagné ses deux premiers matchs. La victoire est donc impérative, alors que Chameria joue contre Sapmi. La tribune est de nouveau pleine malgré la déception de la veille. Tous s’égosillent, comprenant peut-être que le rêve allait prendre fin. L’Abkhazie joue sereinement et ne prend aucun risque. Mieux organisés, plus techniques, meilleurs dans la construction, les Abkhazes ouvrent le score. Au courage, l’Artsakh égalise avant la mi-temps. Mais de l’autre côté, Chameria mène 3-0. Il faudrait donc que l’Artsakh gagne avec trois buts d’écart pour se qualifier au dépend de son adversaire du jour. Une mission bien trop compliquée malgré une volonté et un courage inébranlable. Le score ne bouge plus. Au coup de sifflet final, les joueurs s’écroulent sur le terrain, épuisés et défaits. On les retrouvera totalement abbatus à la sortie du terrain pour débriefer le match.

Une région marquée au fer rouge

Le lendemain, il n’y a pas de match et la CONIFA organise une sortie culturelle avec les médias et toutes les équipes. Direction Chouchi, une des villes organisatrices. Et son histoire est celle de sa région et celle de la souffrance arménienne. Déjà, au début des années 1800, la ville est divisée en deux parties, l’est étant réservé aux Azéris et l’ouest aux Arméniens. Au fil des années, la tension monte et c’est au début des années 1900 que les révoltes éclatent avec des meurtres et des maisons brûlées. La région, mise sous contrôle azéri, devient ingérable. Les Arméniens se révoltent, l’armée azérie réplique. Mais la situation s’envenime et 20 000 Arméniens périssent dans ce qui est connu comme le pogrom de mars 1920. L’ouest arménien de la ville est entièrement détruit.

Peu de temps après, l’URSS envahit l’Azerbaïdjan et l’Arménie et la région devient autonome au sein de la nouvelle RSS d’Azerbaïdjan. Mais Chouchi, passée de 25 000 à 5 000 habitants, n’est plus que l’ombre d’elle-même. C’est ainsi que Stepanakert récupère le titre de capitale de la région. L’histoire s’inverse en 1992 suite à l’opération « Mariage dans les montagnes », menée par les forces arméniennes. Si l’appellation est romantique, les faits le sont moins. Les Arméniens reprennent la ville, et commettent à leur tour des massacres. Les Azéris fuient, leurs maisons brûlent. La prise de ce point de base de la force militaire azérie est un tournant de la guerre et conduit à une série de victoires militaires.

Aujourd’hui, la ville se remet difficilement de tous ces conflits. Les ruines font partie intégrante du paysage, ce qui a inspiré à Liliane de Kermadec son film de 2008 intitulé Le murmure des ruines, qui se passe justement à Chouchi. Une visite d’un musée d’art plus tard, un buffet royal rempli de nourriture arménienne nous attend au coeur des montagnes. L’occasion de lever un toast avec un ancien champion de lutte soviétique reconverti ministre des sports de l’Artsakh et avec la première ministre qui passait par là, détendue et sans garde du corps. Nous nous laissons ensuite entraîner au rythme des danses traditionnelles arméniennes, main dans la main avec un joueur de Chameria et un joueur de l’Abkhazie. Cette journée se termine dans le canyon et un rafraichissement mérité à la « Cascade Parapluie ». En une journée, l’Artsakh nous aura fait passer de l’horreur à l’enchantement.

Turcs, Azéris, même combat

L’Artsakh éliminé, c’est au tour de l’Arménie occidentale, qualifié en demi-finales, de faire plaisir à la foule. Tout le stade vibre dès les premières minutes pour l’Arménie. Mais le but de l’adversaire, l’Abkhazie, refroidit l’atmosphère. Le jeu est léché, les actions sont construites des deux côtés. Nous assistons sans aucun doute au meilleur match de la compétition. Les Arméniens parviennent à égaliser et à tenir jusqu’aux tirs aux buts. Invincibles et poussés par leur public, ils marquent tous leurs tirs au but, alors que leurs adversaires les ratent tous. Les joueurs et le staff courent tous vers le public pour une joie collective intense.

Il n’est pas très difficile de comprendre pourquoi les Arméniens de l’Artsakh supportent les Arméniens occidentaux autant que leur propre sélection. Le concept d’Arménie occidentale est historiquement le nom relié à la portion de l’Arménie intégrée à l’Empire ottoman. Elle se réfère aujourd’hui à un espace géographique incorporé à la Turquie, situé sur le haut plateau arménien. Davit, journaliste arménien venu d’Erevan pour la compétition, n’hésite pas au moment d’aborder le sujet : « Le mont Ararat est à nous, les Turcs nous l’ont volé, comme ils nous ont volé toutes ces terres. Comme ils ont commis un génocide qui a tué un million et demi d’Arméniens… La victoire dans la guerre contre l’Azerbaïdjan nous a rendu une partie de notre fierté. Mais les Turcs sont la cause de beaucoup de maux. »

Le lendemain, une nouvelle sortie culturelle nous conduit au monastère de Gandzasar. Une guide nous accompagne, elle se présente comme « Culture Manager », embauchée par la société d’évènementiel d’Erevan qui organise la compétition de la CONIFA. Une société qui maîtrise visiblement bien les principes modernes d’organisation au sein des entreprises puisque les managers de tous les domaines cohabitent avec les Team Leader, tandis qu’au bas de l’échelon, les volontaires appliquent bénévolement les ordres donnés.

Notre « Culture Manager » donc, nous informe sur l’histoire catholique du lieu qui existe depuis le XIIIe siècle. Après nous avoir montré des symboles architecturaux arméniens et des écrits en ancienne langue arménienne, elle dévie de façon assez surprenante sur le monument « Nous Sommes Nos Montagnes » de Stepanakert : « Comme les étoiles, symbole d’éternité, ce monument signifie que nous vivons ici de par nos racines et nous nous battrons toujours pour notre pays ». Ce monument est très connu par les Arméniens et il n’y a pas une personne qui ne nous l’a pas mentionné durant notre périple. Cette sculpture massive, construite en 1967, est devenu le symbole de l’Artsakh.

Notre guide poursuit : « Quand il a été construit, les Azéris étaient contre car c’est un symbole national. Et les Azéris étaient ici seulement 70 ans, mais en fait ils vivaient chez nous, en Arménie. Maintenant ils utilisent ce monument lors d’expositions ou d’exhibitions internationales, comme si c’était le leur, c’est fou non ? Avant qu’ils vivent avec nous, il n’y avait pas de nation comme l’Azerbaïdjan. Ils sont apparus avec l’URSS. Mais nous sommes 2 nations différentes, 2 cultures différentes qui ne peuvent pas cohabiter. C’est comme un mariage avec deux personnes aux caractères opposés. Ca ne peut pas marcher. »

We are our mountains

Après avoir admiré une dernière fois ce sublime monastère niché dans les montagnes, nous reprenons la route direction Tigranakert. Peu à peu, les forêts verdoyantes laissent place à la steppe. Puis, d’un coup, le chauffeur du van nous annonce qu’à l’endroit où nous venions de passer était établie une frontière pendant la guerre. Il ajoute que dans ces villages, des Azéris vivaient et avaient fui, brûlant leurs maisons au passage. Pendant de longs kilomètres, on observe un paysage de maisons détruites, brûlées ou bombardées entre des champs d’herbes sauvages, à peine troublé par un peu de vie animale (des vaches ou des moutons qui traversent la route) ou humaine (des paysans immobiles, faux à la main). Les villages détruits s’enchaînent les uns après les autres. Au détour d’un virage, une mosquée qui a subi le même sort que les maisons s’offre à nos yeux.

Alors que l’on reste scotché devant ces scènes apocalyptiques, le chauffeur nous annonce que l’Artsakh avait construit ici un pont qui passait au dessus des collines mais que les Azéris l’avaient fait sauter. Alors que l’on veut en savoir plus, on se rapproche de lui. Tout d’un coup, l’homme se ferme et nous annonce : « On ne parle pas du passé ». Il nous montre tout de même quelques photos de ce passé, où on le voit jeune à l’armée. Il refuse également de nous en dire plus sur son tatouage à la main, ressemblant à ceux que portent de nombreux hommes de son âge. Nous n’aurons pas plus d’informations. Le passé, enfoui, restera secret.

Des plaques azéries affichées comme un trophée de guerre

A peine quelques kilomètres après avoir quitté un paysage ravagé, dans un décor steppique, s’élève une forteresse aux puissants remparts. C’est en réalité une reconstitution de la forteresse qu’aurait érigée le fameux empreur arménien Tigrane le Grand (95-55 av. J.-C.) il y a plus de 2 000 ans pour défendre l’une de ses quatre capitales. Les fondations ont été découvertes suites aux fouilles réalisées en 2005. Notre guide nous annonce que de récentes découvertes ont d’ailleurs concerné les fondations de deux églises. Au cas où nous en douterions encore, on fait tout pour nous rappeler que l’Artsakh a toujours été Arménien, preuves à l’appui.

Côté Azéri, le son de cloche est forcément différent : « On sait que les Arméniens, avec leur ingéniosité caractéristique, recourent à diverses astuces pour tenter de justifier leurs revendications territoriales à propos du Karabakh. L’un des exemples est la falsification de faits liés à des découvertes sur le territoire de la ville de Tigranakert. Cette idée a été implantée dès le début par les Arméniens à des fins politiques. La communauté scientifique mondiale est depuis longtemps habituée à de telles « découvertes étonnantes » de pseudo-scientifiques arméniens. » Nous finissons de visiter le musée à l’intérieur du château, contenant des fouilles archéologiques faisant la fierté des autorités locales.

La dernière danse

9 Juin 2019. Tout Stepanakert est en fête pour conclure un chapitre de l’histoire de la région. La ville se pare de ses plus beaux apparats. C’est l’occasion pour tout le monde de se rassembler et de vivre un dernier grand moment de joie partagée. Le stade se remplit peu à peu et le bonheur est partout. Les enfants sont joyeux, crient, s’amusent sous les yeux d’adultes heureux d’assister à une fête dans un endroit qui a plutôt l’habitude de la sinistrose. Les groupes d’adolescents rient, le coeur léger. Ce soir, beaucoup de personnes se sont parées aux couleurs de l’Arménie pour supporter la sélection d’Arménie occidentale.

Mais le match ne se passe pas comme prévu. Les Arméniens, pourtant si plaisants à voir jouer pendant ce tournoi, n’arrivent pas à produire leur jeu. Peut-être crispés par l’enjeu mais aussi bloqué par des Ossètes aggressifs et très bien organisés. Ils s’énervent et accumulent les cartons jaunes. Ce qui devait arriver arriva. A la 63e minute, Bazaev inscrit le seul but du match pour l’Ossétie du Sud. Le public finira par acclamer le succès de ses adversaires. La cérémonie de clôture est chargée en émotions. Après la remise du trophée et de belles célébrations, il est l’heure du dernier tour d’honneur. L’heure de saluer la grande famille de la CONIFA, les volontaires et nos collègues de la semaine, devenus amis pour certains. Les derniers adieux se concluent par un rappel : « On se retrouve au Somaliland dans un an pour la Coupe du Monde ! »

Le trajet vers Erevan est l’occasion de repenser à tout ce que nous avons vécu, en espérant que les personnes que nous avons rencontrées, si accueillantes et hospitalières, ne vivront plus avec les démons du passé. En espérant que le vecteur d’espoir qu’a représenté l’accueil de cette compétition puisse être suivi de jours heureux. L’Artsakh s’éloigne, mais un refrain continue de trotter inlassablement dans la tête, celui de l’hymne de la CONIFA :

Run run run run because the time is right.
Win win win win because the game is on.
Roll Roll Roll Roll as we cheer along.
And go, and go and go.


Tous propos receuillis par Damien F. et Rémi L. Nous tenons à remercier tous les membres de la CONIFA pour leur bienveillance et leur aide, les organisateurs, les volontaires qui ont été incroyablement serviables, nos camarades franco-belges Emilien et Nicolas, tous les journalistes avec qui nous a vonseu le plaisir d’échanger autour d’un verre et enfin Valeri, Nikita, Maksim et Alexei pour leurs traductions et leur folie qui a rendu notre séjour si mémorable.

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