Un week-end, une ville, un stade, deux matchs ; voilà une partie de mon week-end footballistique, mais surtout le contenu d’un article : j’ai vécu deux matchs d’Erovnuli Liga à Samtredia, à la frontière entre Imérethie, Gourie et Mingrélie.

Welcome to hell ! | © Adrien

Samtredia. Samedi midi. Tout commence ici. Pour la première fois depuis mon installation en Géorgie, je décide de me rendre à Samtredia, petite bourgade industrielle sinistrée depuis la fin de l’ère soviétique comme beaucoup d’autres dans le pays. Samtredia se situe à une grosse trentaine de minutes de Kutaïsi, ancienne capitale du royaume et capitale parlementaire de Géorgie. C’est ici, dans cette région, que je parcours cette route à la recherche du stade Erosi Manjgaladze. Ce dernier, originaire d’une village très proche de Samtredia, fût un acteur soviétique assez connu après-guerre ainsi qu’un commentateur sportif reconnu. Cette reconnaissance faisant de lui la seconde personne la plus connue de la ville, après l’actuel ministre de l’Energie, un certain Kakhaber Kaladze, lui aussi né sur cette terre.

Malgré cette belle journée ensoleillée, le match du jour n’a rien pour exalter les locaux. En effet, c’est le Shukura Kobuleti qui reçoit, en exil, suite à une longue période de disqualification de son stade. Ainsi, tout le monde utilise l’enceinte de Kobuleti, que ce soit le Dinamo Batumi ou le Kolkheti Poti, pas le Shukura lui-même. Un comble. Heureusement, cette situation s’arrêtera prochainement puisqu’il s’agit du dernier match en exil ; le club, dernier au classement, pourra retrouver sa Chele Arena après avoir affronté un Locomotive Tbilisi en pleine forme, les cheminots venant d’en mettre six au Kolkheti Poti …. à Kobuleti, précisément.

C’est par 25 degrés à l’ombre et une affluence clairsemée d’une centaine de personnes, principalement liées aux deux clubs, en plus de quelques curieux, que le coup d’envoi est donné. Le match se montre vite à sens unique tandis que les joueurs de la capitale font le siège des buts d’Azamat Dzhioev, ancien gardien de l’académie du Spartak. Si Sikharulidze ouvre le score assez vite, le Loco se montre longtemps maladroit à l’image de son attaquant Gavashelishvili. Mais ce dernier réussit tout de même à pousser le ballon dans les filets suite à une belle combinaison sur corner pour continuer de conjurer le sort. En effet, maladroit et très souvent individualiste, il n’avait jamais marqué en championnat jusqu’à son triplé de la semaine. Et de quatre, donc, pour l’ancien du Torpedo Kutaisi. C’est sur ce score de deux buts à zéro que les deux équipes rentrent aux vestiaires, le Shukura n’étant dangereux que grâce à l’ancien du Lokomotiv, Irakli Klimiashvili, qui a trouvé la barre sur ses nombreuses tentatives de corners directs.

Shukura – Locomotive | © Adrien

À la reprise, rien ne change vraiment et les encouragements du nouveau venu de l’arrière garde maritime, Aleksandr Klevtsov, international ouzbek en son temps, n’y font rien. Après quelques maladresses, les visiteurs prennent le large avec tout d’abord un bijou de Nodar Kavtaradze, avant que les deux premiers buteurs doublent leurs compteurs respectifs, ce qui porte à cinq la marque du jour ainsi que le total personnel de Mamia Gavashelishvili. Le Shukura n’a toujours pas remporté un seul match, et la colonie russophone peine à apporter quelque chose (le club possède de nombreux Géorgiens passés par la Russie, formés en Russie ou ayant même la nationalité russe ; en plus de ses deux étrangers russophones) alors que le Brésilien Jefinho a l’air perdu sur le terrain et ne fait jamais les efforts défensifs. Il a tout de même régalé d’un très joli double contact et a été à l’origine d’une superbe combinaison sur coup franc qui aurait mérité bien meilleur sort que le poteau.

Le Locomotive est de son côté leader devant les deux autres clubs de la capitale et va pouvoir rentrer serein de son « back to back » à l’ouest du pays. Pour moi, il est aussi temps de rentrer après un détour par Gelati avant de revenir vingt-quatre heures plus tard pour un tout autre match… à savoir le derby d’Iméréthie, la revanche en quelque sorte de la Supercoupe de Géorgie que nous avions vécu ensemble. Et pour rendre la revanche la plus complète possible, la météo estivale de ces derniers jours a décidé de revêtir ses habits de février et nous voilà sous la pluie par cinq degrés Celsius pour admirer la vue sur l’immeuble d’en face, époque Staline, les nuages nous cachant les sommets enneigés de Svanétie.

Malgré la météo, on sent dès une heure avant le coup d’envoi que l’affiche que propose le stade Erosi Manjgaladze en ce dimanche intéresse beaucoup plus la population locale. Si les grenouilles omniprésentes autour du stade ne se sont pas arrêté de chanter, elles seront cette fois recouvertes par les tribunes du petit stade en synthétique de Samtredia. Les gens sont arrivés assez tôt au stade, à en juger par le nombre de voitures déjà présentes aux abords du stade. Tout le monde a son équipement : serviettes pour les sièges, parapluies et Semechki (graines de Tournesol), signe des grands après-midi de football.

Les ultras du Torpedo mettent l’ambiance sous le regard de la police| © Adrien

L’ambiance de derby se fait ressentir à l’arrivée. En chantant, les ultras du Torpedo se déplacent à une petite trentaine (moins nombreux que pour la Supercoupe à Martvili) et tentent tant bien que mal d’installer leurs bâches juste à côté de nous tout en disposant leurs fumis et pétards sur le premier rang sous le regard approbateur de la police. Autre pays, autres mœurs, ici cela semble permis et il n’y a aucune séparation entre supporters des deux camps. La police n’interviendra seulement qu’au coup d’envoi alors qu’une bagarre manque d’éclater après quelques invectives verbales. Pour le reste, les pétards explosent sur la pelouse, et les fumigènes verts accompagnent l’entrée des joueurs comme à l’accoutumée.

Cela fait du bien de voir de l’ambiance dans un match d‘Erovnuli Liga et même s’il n’y a pas beaucoup plus à dire que lors de la Supercoupe, le soutien de leurs ultras va cette fois porter chance au Torpedo qui va s’imposer deux buts à zéro grâce à Nikoloz Sabanadze et Bidzina Makharoblidze, alors que le beau jeu pourtant entrevu en Supercoupe et par intermittence contre le Locomotive semble avoir quitté le Torpedo. Côté Samtredia, on a laissé passer sa chance en début de matchs et l’exode hivernal de certains des artisans du titre se fait nettement ressentir, la saison d’après risque d’être très difficile pour ce club peu habitué aux succès.

Changement de décor pour le derby Samtredia – Torpedo. | © Adrien

Pour nous, il est l’heure de rentrer en faisant un détour par d’autres stades pour finir le week-end en beauté avant d’affronter la neige qui a recouvert la montagne qui sépare l’Iméréthie de Tbilisi. On se sépare donc pour quelque temps avant de nouvelles aventures footballistiques géorgiennes.

Les notes Footballski :

Standing du Stade (2,5/5) :

Pas grand-chose à dire sur ce stade si ce n’est la moyenne. Un vieux synthétique qui limite les problèmes d’entretien, des infrastructures qui paraissent correctes, mais des tribunes inconfortables avec des sièges qui se cassent au contact du ballon (vécu le samedi).

Les sièges d’Erosi Manjgaladze, tout un concept. | © Adrien

Disponibilité des billets (5/5) :

Le stade n’est pas plein, même avec la gratuité donc aucun problème de ce côté-là.

Tarifs (5/5) :

Pour Kobuleti comme pour Samtredia, ce fût gratuit et c’est un plaisir comme bien souvent en Géorgie même si l’on peut se demander si une somme symbolique n’aiderait pas le développement des clubs locaux.

Ambiance (3/5) :

Bien-sûr pour l’ambiance, on ne va regarder que le match de Samtredia ou le soutien était présent et les chants également (principalement côté Torpedo), mais il faut noter cela dans un championnat où les tribunes sont les plus souvent amorphes quand elles ne sont pas simplement vides.

Risque (3,5/5) :

Même si on apprécie le côté football vrai des tribunes locales, le début de bagarre manqué et le manque de dispositif de sécurité peuvent faire craindre si quelqu’un perd son self-control. Un risque à prendre en considération, même si la mentalité bonne enfant des tribunes et des locaux permet de mériter cette note positive de 3,5.

Accessibilité et transports (2,5/5) :

C’est une toute petite ville donc on n’y dort pas forcément. Difficile de juger. Néanmoins le stade se trouve assez proche du centre-ville et la ville de Samtredia en elle-même est désormais reliée à la nouvelle autoroute, ce qui rend le stade aisément accessible en voiture.

Boissons (0,5/5) :

Toujours pas de buvette, mais un demi-point pour les quelques bouteilles d’eau à vendre…

Petit aperçu du quartier environnant. | © Adrien

Quartier environnant (2/5) :

Samtredia est une ville industrielle laissée en grande partie à l’abandon donc il n’y a pas grand-chose à dire sur elle. Par contre vous trouverez les magnifiques caves de Tskaltubo à proximité et cela vaut quelques points. On notera tout de même que dans l’ambiance de village dégagée par Samtredia, le stade se trouve à un endroit agréable avec une très belle vue sur les monts du Caucase.

Adrien 


Image à la une : © Adrien 

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