Temps de lecture 8 minutesOn a discuté avec Omar El Kaddouri, milieu de terrain du PAOK

Ce jeudi 7 avril, le PAOK dispute son quart de finale aller de Conference League au Vélodrome, face à l’Olympique de Marseille. Un match historique pour le club grec, qui s’avancera avec ambition et détermination dans la cité phocéenne. L’occasion de présenter l’équipe, le style de jeu, et Razvan Lucescu avec Omar El Kaddouri, milieu de terrain marocain du PAOK.

Tu es arrivé au PAOK en 2017. Considères-tu que cette double confrontation face à Marseille représente les deux matchs les plus importants que tu aies eu à jouer ?

Non, je ne vais pas dire ça. Il y a eu des matchs aussi importants avant. Je me rappelle de celui face à l’Olympiakos l’année où on a été champions (en 2018-2019, NDLR). Après, je pense aussi au match retour face à Krasnodar (saison 2020-2021, NDLR) qui était au moins aussi important, parce qu’on pouvait se qualifier pour la Ligue des Champions. Mais celui de jeudi, face à l’OM, est au même niveau que ceux que j’ai cités.

Comment l’équipe aborde ce match aller ?

L’équipe est assez sereine. C’est sûr que l’on n’aborde pas ce match en étant favoris, donc on est un peu plus tranquilles. Mais le coach (Razvan Lucescu) est très confiant. Lui, son objectif n’est pas de faire un bon match ou que le monde connaisse un peu mieux le PAOK. Lui, il veut gagner la Conférence League. On sait que ça va être une rencontre très difficile, mais, par le passé, on a montré que le PAOK est capable de faire des exploits. Je connais l’OM, et c’est une très bonne équipe, mais ce n’est pas impossible. On va essayer de faire quelque chose de beau !

La Conference League est une nouvelle compétition. Dirais-tu qu’elle est différente de l’Europa League, ou est-ce qu’elle s’en rapproche ?

Je dirais que c’est une compétition excitante pour les clubs comme le PAOK, ou comme Bodø/Glimt par exemple. En Europa League, on a eu quelques difficultés auparavant. Là, on peut faire voir le PAOK en Europe. C’est une compétition qui peut donner de l’expérience à des clubs comme le nôtre, ainsi qu’à certains jeunes joueurs. Avec cette saison et ce qu’on a pu produire, notre prochaine étape doit être de faire aussi bien – ou mieux – en Europa League, voire en Ligue des Champions. Cela fait longtemps qu’un club grec n’y a pas brillé.

Grâce à un but de Rémy Cabella, Krasnodar avait décroché son ticket pour la LDC en Grèce.

Tu évoquais Krasnodar : il y a eu pas mal de déceptions en Europe pour le PAOK ces dernières années. Qu’est-ce qui a changé cette année ?

En dehors des joueurs, je ne pense pas qu’il y ait eu de gros changements. L’équipe a un peu changé en deux ans. Après, pour en revenir à Krasnodar, on a toujours pensé qu’on était maudits pour la Ligue des Champions. La saison où on perd, tout était fait pour qu’on se qualifie : on élimine Besiktas, puis Benfica. On fait un bon résultat en Russie, et ce malgré la défaite et le pénalty raté. Il nous a manqué un peu de chance. On en a un peu plus cette saison. Quand on voit le match face à La Gantoise chez eux, on avait besoin d’un peu de réussite parce qu’on n’a pas fait un très bon match. On a tenu défensivement, et on a réussi à se qualifier sans pour autant plus le mériter cette saison que sur celles d’avant. Il faut un peu de tout pour créer des exploits en Europe.

Vous n’êtes pas présentés comme des favoris sur cette double confrontation. Est-ce un avantage qui peut être utilisé pour surprendre l’adversaire ?

Oui, je pense qu’on peut jouer sur ça. J’ai un peu regardé les émissions de foot françaises, et je pense qu’on nous sous-estime beaucoup. Mais bon, d’un côté, ce n’est pas un problème. Je pense qu’on peut faire mal à l’OM, y compris au Vélodrome. On a une équipe qui aime ces gros matchs, surtout cette saison. Donc c’est peut-être un avantage pour nous d’être sous-estimé. Les clubs français ne nous connaissent pas, et beaucoup pensaient qu’on était le tirage le plus facile. Mais je pense que quand ils vont venir au stade Toumba, qui sera rempli, ils ne vont pas être aussi contents de leur tirage. Et on va leur montrer que ce n’était pas un tirage facile.

La suppression de la règle du but à l’extérieur change-t-elle la donne ?

On a souvent été éliminés à cause de cette règle. Je pense que c’est un avantage pour nous sur cette confrontation, mais aussi pour le football. Tout est possible, comme on l’a vu face à Midtjylland : on a perdu 1-0 là-bas, et avec la règle d’avant, on aurait été éliminés (victoire 2-1, qualification aux tirs au but). Je n’ai jamais été trop d’accord avec cette règle, et ce n’est pas une chose qui me déçoit qu’elle ait été enlevée. On l’a vu en Afrique, avec ce Algérie-Cameroun, où ça a été un peu cruel.

Razvan Lucescu est présenté comme un entraîneur ayant une forte appétence pour le football italien. Dirais-tu que le PAOK ressemble à une équipe italienne dans le style ?

Je pense qu’on est plus une équipe avec un style de jeu italien, oui. C’est peut-être péjoratif pour quelques personnes, parce que beaucoup pensent que le football italien est ennuyeux. Mais tactiquement, on est très forts. Tout le monde sait ce qu’il doit faire. Défensivement, on est costauds, et on est l’une des meilleures défenses en Conférence League. C’est notre force. Toutefois, on essaie aussi de produire du beau jeu. À Marseille, on sait que ça sera un match difficile, mais on va essayer de produire quelque chose. On va devoir souffrir, en courant et en défendant beaucoup. Mais si on nous laisse un peu d’espaces, on peut faire mal aux équipes adverses.

« On va essayer de rendre nos fans heureux. Il y a des personnes au club qui vivent pour le PAOK, et leur joie peut dépendre de nous, donc on va essayer de faire quelque chose d’énorme. »

Une autre qualité de ce coach est qu’il est un vrai meneur d’hommes, un meneur de collectifs.

Je pense que Razvan est le meilleur coach que j’ai eu dans ma carrière concernant la capacité à motiver. (Il réfléchit). Il y a peut-être Hervé Renard en équipe nationale, même si avec moi, ça n’a pas toujours été top. Lucescu essaie de donner de l’importance aux 25 joueurs. À l’entraînement, il ne fait aucune différence : tout le monde est traité de la même manière et tout le monde a sa chance. C’est pour ça que sur le terrain, on essaie de tout donner. On a une très bonne relation avec lui, même s’il s’énerve assez fort de temps en temps. Il nous transmet beaucoup d’affection, et il aime avoir cette relation père-fils. En tant que joueur, je n’ai jamais eu une relation pareille avec un entraîneur.

Le système tactique le plus utilisé par le PAOK est le 4-2-3-1. Au-delà de ça, quels sont les principes tactiques majeurs ?

Il y a des règles, et il faut les respecter ; surtout en phase défensive. Offensivement, on a un peu plus de libertés. Défensivement, on sait ce que chacun doit faire à chaque instant. On travaille beaucoup sur ça, et comme le coach le dit : l’équipe qui gagne, c’est souvent celle qui encaisse le moins de buts. On part de ce principe, et avec nos qualités offensives, on peut marquer contre n’importe quelle équipe. L’entraîneur est très attentif à ça, et il veut que tout ce qu’il nous dit la semaine à l’entraînement sur le plan tactique soit reproduit en match. Et si ça n’est pas fait, il ne sera pas content (rires).

Une autre caractéristique qui frappe, c’est l’efficacité sur coups de pied arrêtés. Il y a notamment eu beaucoup de penaltys. Comment expliquer cette réussite ?

Pour dire la vérité, on travaille énormément sur cela avec Cristiano Bacci, l’adjoint de l’entraîneur, qui est un ancien joueur italien. Chaque semaine, on a de nouveaux schémas, de nouvelles tactiques défensives et offensives. Et souvent, cela nous a sauvés de situations délicates où l’on jouait un peu moins bien. En ce qui concerne les penaltys, on attaque souvent dans le championnat grec, donc on a plus de possibilités d’en avoir.

Vous deviez affronter l’Olympiakos entre les deux rencontres face à l’OM, mais le match a été reporté. Est-ce un avantage pour vous ?

C’est clair que c’est mieux pour nous. Jouer à Marseille le jeudi, voyager, puis recevoir l’Olympiakos le dimanche et rejouer l’OM le jeudi, ça reste trois matchs de très haut niveau. Avoir une semaine de libre pour préparer le retour, c’est positif pour nous. On va pouvoir être concentrés sur ce match les jours d’avant, sans rencontre entre les deux. Après, je ne sais pas comment ils vont réussir à gérer le calendrier en Grèce. Mais on ne s’occupe pas de ça.

Pour finir sur le calendrier, vous avez disputé deux tours préliminaires au cœur de l’été. Comment gère-t-on cela sur la fin de saison, avec une fatigue éventuelle face à des équipes qui ont repris plus tard ?

Oui, cela peut faire une différence, mais plus mentalement que physiquement. Physiquement, on est au top, et on a fait une bonne préparation. Mais quand on n’est pas habitués à jouer autant de matchs, ça peut fatiguer mentalement quelques joueurs. C’est difficile de rester concentré et à 100% sur 50-55 matchs. Tout se passe dans la tête, en fait. Et mentalement, il faudra qu’on soit prêt pour ces matchs-là.

Pour cela, vous pouvez compter sur Vieirinha (36 ans), qui est votre capitaine et aussi le joueur le plus expérimenté en Ligue des Champions. Quel est son rôle au sein de l’effectif ?

Vierinha, c’est la légende du club. C’est le capitaine, mais aussi un modèle pour les jeunes joueurs du club. Ce n’est pas quelqu’un qui gueule beaucoup ou qui se fâche souvent. Il est très posé, qui aide tout le monde. C’est un capitaine qui me fait penser à Hamsik, que j’ai connu à Naples. Il est là pour l’équipe, et il aime le club. Il donnera toujours tout pour lui. C’est un joueur que j’admire sur beaucoup d’aspects : sa carrière, sa personne, et tout ce qu’il a fait. Je joue avec lui depuis cinq ans, donc je le connais un peu mieux que d’autres. C’est un plaisir de le côtoyer chaque jour.

À 36 ans, Vierinha est le joueur emblématique du PAOK, club où il a effectué deux passages distincts.

Beaucoup de joueurs au PAOK sont au club depuis plusieurs saisons, toi y compris. J’imagine que c’est un socle important sur lequel s’appuyer.

Il faut toujours garder une sorte de colonne vertébrale. De l’équipe championne et vainqueur de plusieurs Coupes, il reste, en plus de moi, Vierinha, Paschalakis, Crespo, Varela ou encore Biseswar. On peut transmettre aux arrivants ce que c’est de jouer PAOK. On peut dire ce que l’on veut sur nous, mais on est les joueurs les plus titrés au club. On peut transmettre cette mentalité de gagnant, surtout dans cette ville où ce n’est pas facile : ici, quand tu gagnes, tu es le roi du monde, mais quand tu perds, tu es le pire joueur qui soit. On essaie de donner l’exemple, et de montrer comment être prêt mentalement.

La balance de l’expérience penche pour l’OM, mais le PAOK a gagné plusieurs titres ces dernières années. Penses-tu que cela peut faire une différence sur ce type de matchs ?

Oui, parce que face à Marseille, c’est un peu comme une finale. Et des finales, ces dernières années, on en a joué beaucoup. On est habitués à gagner ces dernières saisons, même si en France, ils diront que ce n’est que la Grèce. Mais on sait ce que ça veut dire de gagner. Cela peut être un plus pour nous, parce qu’à Marseille, si je ne me trompe pas, peu ont gagné des titres. Guendouzi ou Kamara, par exemple, sont des top-joueurs, mais ils sont jeunes et n’ont pas encore gagné. Peut-être qu’on peut jouer sur cette expérience. 

Pour finir, quelle est l’atmosphère à Salonique avant cette double confrontation historique ?

Cela fait depuis le tirage au sort que ça ne parle que de ce match. Partout où on marche, on nous parle de Marseille, parce que cette rencontre est quelque chose d’unique pour les supporters du PAOK. Les 3.000 billets mis en vente pour le Vélodrome ont été directement vendus, donc il y a un gros enthousiasme dans la ville. C’est un match face à un club mythique, dans un stade qui l’est tout autant. On va essayer de rendre nos fans heureux. Il y a des personnes au club qui vivent pour le PAOK, et leur joie peut dépendre de nous, donc on va essayer de faire quelque chose d’énorme.

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