A une semaine du match d’ouverture de la Coupe du Monde Croatie-Brésil, je vous propose de découvrir l’idole improbable des fans croates : Eduardo Da Silva Alves. L’histoire de cet attaquant qui a quitté très tôt son pays pour rejoindre la Croatie n’est pas ordinaire. Voyage, entre Rio et Zagreb.
Eduardo sous la neige
Alors âgé de seulement 16 ans, Eduardo, recalé du Bangu Atlético Clube, une équipe de son quartier de Rio, a écouté un agent local le poussant à conclure un accord avec le Dinamo Zagreb, largement en faveur du président Zdravko Mamic. Le jeune homme est alors arrivé seul en Croatie en 1998 sans parler un mot d’anglais ni d’allemand. A cette époque, loin de la chaleur de Rio, il ne pensait qu’à une chose : revenir chez lui. « Je pouvais à peine supporter le froid et je détestais la neige. J’étais seul et je me sentais très mal. Puis j’ai pensé à mes compatriotes qui jouent en Ukraine et en Russie. S’ils pouvaient survivre, c’est que je pouvais aussi le faire en Croatie, où il fait beaucoup moins froid », a déclaré l’attaquant une fois la période d’adaptation passée.
Malgré des débuts sportifs tout aussi délicats, il parvient petit à petit à percer jusqu’à la saison 2003-2004, celle de la consécration. Eduardo tourmenta toutes les défenses avec des dribbles à foison, des buts à la pelle et une technique délicieuse. Loué pour ses qualités humaines, il était même devenu amoureux de la Croatie, au point de devenir citoyen croate à l’automne 2004 et d’épouser une fille de Zagreb. La seule chose qu’il détestait encore n’était pas la neige mais son flocage de maillot, nom aussi utilisé par la presse : « Au Brésil, j’ai toujours été Dudú ou au moins Eduardo. Da Silva est le nom de jeune fille de ma mère, il est inutile de m’appeler comme ça ! »
Une première Coupe du Monde à 31 ans
Dix ans plus tard, Dudú a l’opportunité de jouer une Coupe du Monde dans son pays natal, mais contre lui. Ce que personne n’a jamais fait avant lui pour des débuts en Coupe du Monde. Tout comme n’importe quel garçon jouant au ballon rond au Brésil, le natif de Rio de Janeiro a rêvé de porter un jour le maillot de la Seleçao. Cependant, le destin a préféré le tourner vers un tout autre pays. Depuis 2004, Eduardo a représenté la Croatie à l’échelle internationale avec 29 buts en 62 matchs, ce qui en fait le deuxième meilleur buteur du pays, derrière l’actuel président de la fédération, Davor Suker.
Néanmoins, Eduardo n’a encore jamais joué de Coupe du Monde à ce jour. En 2006, son omission de l’équipe a provoqué l’indignation en Croatie. Le sélectionneur d’alors, Zlatko Kranjcar (père de Niko), a préféré emmener Ivan Bosnjak, un joueur médiocre qui était alors le coéquipier d’Eduardo au Dinamo. En 2010, l’équipe croate n’a pas réussi à se qualifier pour la Coupe du Monde. L’homme n’a pas eu beaucoup plus de chance lors des championnats d’Europe. En 2008, alors au sommet de son art avec Arsenal, il rata l’Euro en raison d’une terrible fracture à la jambe, dont il ne s’est jamais vraiment remis. En 2012, hors de forme, il était dans le groupe mais joua un rôle marginal en Pologne.
« Accepter l’invitation à jouer pour la Croatie a été la meilleure décision que j’ai prise de ma vie, » déclarait-il récemment à Radio Globo. « Mais je n’aurais jamais imaginé que, en tant que brésilien, j’aurais une chance de disputer le match d’ouverture de la Coupe du Monde. Dans le football, l’impossible devient possible » En effet, la vedette Mario Mandzukic étant suspendu, 3 attaquants vont se disputer le rôle de titulaire en pointe : Nikica Jelavic, qui réalise une mauvaise saison avec Hull City, Ivica Olic, concurrent sérieux mais souvent utilisé comme un ailier par Niko Kovac, et Eduardo, auteur d’un but toutes les 116 minutes avec le Shakhtar.
Ainsi, Dudu, comme il est affectueusement surnommé, a une grande chance de réaliser son rêve impossible et débuter contre le Brésil en ouverture de la Coupe du Monde. Si c’est le cas, il chantera les deux hymnes nationaux, comme il l’a confirmé à Radio Globo. « Ce serait un sentiment étrange mais cela me rendrait fier » a-t-il dit. Fier de ses deux patries.
Damien Goulagovitch
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