Temps de lecture 5 minutesLe football dans les RSS : #68 le Turkménistan – AFC Asian Cup 2019, un nouvel élan pour la sélection turkmène ?

Durant cette année précédant de la Coupe du Monde, nous avons décidé de nous replonger dans l’histoire du football soviétique des différentes (quatorze, hors Russie) Républiques socialistes soviétiques d’Union soviétique avec quatorze semaines spéciales, toutes reprenant le même format. Nous finissons notre grande épopée avec le Turkménistan, dont nous vous parlons de sa participation à l’AFC Asian Cup 2019.

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Balkanabat, novembre 2017, dans l’ouest du pays. La réception du Taipei chinois est la dernière étape tumultueuse de cette longue campagne de qualification pour l’AFC Asian Cup 2019 organisée aux Émirats arabes unis. Le Turkménistan a l’avenir entre ses mains, un succès permet une miraculeuse qualification après celle obtenue en 2004 contre toute attente. Yagsyyew et Annadurdyyev font chavirer à deux reprises le Sport Toplumy Stadium, le Turkménistan retrouve l’élite du football asiatique.

Un changement de format profitable

Janvier 2014, l’AFC promulgue une nouvelle loi visant l’expansion et le développement de sa plus prestigieuse compétition, l’AFC Asian Cup. Vingt-quatre équipes joueront sous ce premier format, en janvier 2019, contre 16 auparavant. Une volonté de développer le football dans une région du monde où l’AFC Challenge Cup, la petite sœur de l’Asian Cup, cesse d’exister et laisse alors plus de places allouées aux « petites » nations. Un changement vu d’un bon œil pour les modestes équipes du continent asiatique, un peu moins par les plus grosses écuries du circuit qui sont directement qualifiées pour la compétition et disputent donc moins de matchs à enjeux.

Revenons à notre tendre Turkménistan qui reste sur des performances désastreuses sur la scène internationale. Éliminé dès le premier tour de l’AFC Challenge Cup disputé aux Maldives, avec notamment une défaite 3-1 contre l’ogre afghan, les hommes d’Amangylyc Kocumow n’ont pu faire mieux lors des éliminatoires de la Coupe du monde 2018 avec une troisième place synonyme de qualification pour le dernier tour qualification pour l’AFC Asian Cup. Un changement de format qui évite les périlleux tours préliminaires contre des petites équipes perdues au fin fond de l’Asie et jouant à fond chaque rencontre.

Un groupe assez relevé

Relevé est un grand mot à l’échelle des standards de la FIFA, mais pour le Turkménistan son groupe pour la qualification finale est délicat. 151e au classement FIFA, les Turkmènes doivent jouer contre Bahreïn et le Taipei chinois qui lui sont tous deux supérieurs sur le papier, ainsi que Singapour qui semble être l’adversaire le plus abordable. Malgré des performances en dents de scie, la fédération turkmène est claire, il faut se qualifier!

La campagne commence en mars 2017 par un long déplacement à Taiwan pour y affronter le Taipei chinois. S’appuyant sur un groupe qui se connaît parfaitement (la quasi-totalité de la sélection nationale évolue dans le championnat local), la sélection turkmène est plus connue pour son jeu rude et assez bourrin que pour sa finesse technique et sa délicatesse. Le meilleur joueur du pays, Ruslan Mingazov, héros national évoluant au Slavia Prague,  se fait remarquer non pas par jeu de passes, mais plutôt pour sa capacité à prendre un carton rouge dès le premier match. Mais sur le terrain, cela se passe plutôt bien pour les Turkmènes, le Turkménistan fait bonne figure et domine largement la rencontre. Annadurdyev et Mingazov font la différence en deux minutes, le Turkménistan s’impose 3-1 et se lance parfaitement pour la qualification.

Les choses vont pourtant se compliquer pour nos amis turkmènes. Quatre mois après sa première victoire, c’est un Turkménistan meurtri par l’absence de son maître à jouer Ruslan Mingazov qui reçoit le Bahreïn à Dasoguz. Pourtant costaud défensivement, les chevaliers noirs cèdent en seconde période et s’inclinent 2-1. Rien de bien rassurant surtout que, dans le même temps, le Taipei s’impose 2-1 avec notamment un but de Xavier Chen, Belge évoluant au KV Mechelen. Septembre arrive et une rencontre contre le Singapour doit avoir lieu. La victoire est impérative face à l’adversaire le plus faible du groupe et pour cela la fédération met le paquet. Un camp d’entraînement en Bulgarie est organisé, la sélection affronte plusieurs équipes de D2 et se tient prête pour ce rendez-vous. Malheureusement, la fédération ne s’est sans doute pas penchée sur les seize heures de vol avalées la veille du match ainsi que les retards à l’aéroport d’Istanbul et l’entraîneur adjoint, Baylyyev Rahmanguly, refoulé à la frontière suite à un problème de visa. Résultat des courses, les joueurs débarquent au bout du rouleau au Jalan Besar Stadium et ne peuvent faire mieux qu’un petit 1-1 avec un but égalisateur d’Annadurdyyew en toute fin de match. Sûrement une manière turkmène de remercier Singapour d’avoir importé 64,5 millions de dollars de produits du Turkménistan dans l’année.

Un mois plus tard, c’est déjà l’heure de la revanche du Turkménistan contre les modestes joueurs de Singapour. Les Turkmènes sont hors course pour la première place du groupe, Bahreïn est bien trop supérieur aux autres nations, mais la sélection est encore en lice pour accrocher une seconde place. Pour cela il faut obtenir de meilleurs résultats que le Taipei chinois qui joue sa chance à fond. Malgré un dernier match décevant à Kallang, les chevaliers noirs lavent l’affront du match aller et s’imposent 2-1 dans une rencontre à rebondissements. Menant tranquillement 1-0, les Turkmènes lèvent le pied et se font surprendre par un but d’Irfan. On s’attend alors à une nouvelle contre-performance et à voir le Taipei chinois se détacher au classement après sa victoire surprise contre Bahreïn … Mais une bonne étoile veille sur le Turkménistan et Orazsähedow permet à son équipe de remporter les trois points à la dernière minute!

Une finale contre le Tapei chinois

Le 14 novembre 2017 est le jour décisif dans la campagne qualificative du Turkménistan. La réception du Taipei chinois peut déjà être décisive alors qu’il reste encore deux matchs à jouer. Avec un point d’avance sur son adversaire du jour, les Turkmènes peuvent directement se qualifier pour la Coupe d’Asie 2019 en cas de succès. L’ambiance est tendue dans le petit stade de Balkanabat, 9500 spectateurs remplissent l’enceinte de 10 000 places, signe du nouveau lien entre la sélection et le public. Un ouf de soulagement est poussé dès la mi-temps, le Turkménistan fait la différence facilement grâce à Yagsyyew et Annadurdyyew qui permettent aux chevaliers noirs de rentrer aux vestiaires avec deux buts d’avance. Mais comme très souvent, les vert et blanc font preuve de faiblesse et souffrent énormément, surtout quand le Taipei chinois obtient un pénalty en fin de match et le transforme. On craint la fin de match catastrophique, le sélectionneur ronge ce qui lui reste d’ongles, mais finalement l’arbitre sri lankais délivre les locaux qui exultent. Quinze ans après, le Turkménistan renoue avec une compétition continentale majeure. Le dernier match à Bahreïn est anecdotique, la défaite 4-0 l’est également, les Turkmènes ont fait le boulot et obtiennent un vol direct pour les Émirats Arabes Unis!

Un nouveau départ pour le Turkménistan?

Cette qualification plutôt inespérée est d’excellent augure pour le football turkmène. Coïncidant avec les bonnes performances de son champion national, l’Altyn Asyr, sur la scène continentale, le Turkménistan commence tout doucement à émerger. Il y aura bien évident fort à faire dans un groupe constitué du Japon, de l’Ouzbékistan et du sultanat d’Oman, mais le Turkménistan va à coup sûr gagner en expérience. Une expérience des grands rendez-vous qui est vitale pour son futur footballistique et qui fait plaisir à un public qui s’intéresse de plus en plus aux matchs de sa sélection nationale, elle qui évolue devant 10 000 spectateurs de moyenne sur la campagne qualificative. Aux joueurs désormais de faire le boulot, à la fédération de continuer le travail de formation, à développer la Yokari Liga. Et au Turkménistan d’exister.

Antoine Jarrige


Image à la une :  SAM YEH / AFP

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