Quand on évoque Sarajevo, on a tous en tête l’image d’une ville meurtrie et des centaines de jours de siège. Aujourd’hui, Sarajevo est une ville qui tente de panser les nombreuses blessures de la guerre, sans toutefois oublier les horreurs de ce conflit. Changement radical de décor dans ce FootballskiTrip.


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Nous sommes à peine remis de nos aventures de la veille qu’il nous faut déjà plier bagage, direction Sarajevo, capitale de la Bosnie-Herzégovine. Mostar a su nous séduire avec sa vieille ville tortueuse et pleine de vie, c’est désormais au tour de la capitale de faire le boulot. Considérée comme étant l’une des villes les plus importantes des Balkans, elle a eu une histoire plus que mouvementée. Assez récente, avec une création d’origine ottomane à la fin du XVème siècle, elle est surtout connue pour les événements du siècle dernier, citons l’assassinat de l’archiduc François Ferdinand en 1914, l’organisation des Jeux Olympiques d’Hiver soixante-dix ans plus tard et un siège de plus de 1 000 jours entre 1992 et 1996.

Aperçu des paysages bosniens entre Mostar et Sarajevo © Antoine Gautier / Footballski

On est loin des sept heures de route vécues samedi, le voyage est cette fois beaucoup plus rapide. Nous optons pour le bus (le seul train partant à 6h45 du matin) et c’est parti pour trois heures à travers la Bosnie. Encore une fois, les paysages nous bercent et à la sortie d’un tunnel Sarajevo s’ouvre devant nous. Au premier regard, nous n’avons pas l’impression d’être dans une capitale ! Située dans une cuvette, la ville s’étend de tout son long entre deux montagnes. Séparée en deux par la Miljacka, la ville dénote entre son côté moderne et ses façades d’immeubles criblées d’impact de balles et d’obus. Première constatation dès notre arrivée à la gare routière : derrière nous, la tour de télévision qui servait de refuge aux snipers et qui fut totalement ravagée pendant la guerre, est désormais ultra-moderne. Juste à côté, un tramway qui n’a pas été rénové depuis les Jeux Olympiques. La ville est d’ailleurs toujours aussi fière d’avoir pu organiser cette compétition : on aperçoit les télésièges et infrastructures sur une montagne, la patinoire dans la ville, ainsi qu’un panneau souhaitant la bienvenue aux visiteurs datant de 1984 !

C’est dans cette atmosphère particulière – et après avoir mangé quelques cevapi – que nous prenons la direction de notre auberge qui est, malheureusement pour nous, située dans les hauteurs de la ville. Hors de question de prendre les taxis qui adoptent des prix faramineux pour les touristes, ce sera avec le vieux tramway et nos jambes, que nous ne ménageons pas depuis le début du séjour. La pente est raide, et le trajet difficile quand on ajoute sacs et valises. Le temps se gâte à Sarajevo, à part le beau soleil de Bihac, nous ne sommes pas chanceux avec la météo en Bosnie ! En bonne ville montagnarde qu’elle est, la capitale ne nous épargnera pas. C’est donc avec un pull-over que nous partons l’explorer, tant bien que mal. La pluie est fine et redouble d’intensité, le match de ce soir va être sympathique ! Surtout que plus on se rapproche de l’heure du match, plus il fait frisquet. Mais bon, nous ne sommes pas venus pour chômer et nous nous mettons en route pour l’enceinte du Zeljeznicar, située de l’autre côté de la ville. Nous empruntons une nouvelle fois le tramway et découvrons surpris que, malgré sa façade des années 80, on peut y avoir le wifi gratuit. Vive la modernité.

Le match

Nous nous rapprochons du stade et voyons de plus en plus de maillots bleus. Le Zeljeznicar Sarajevo est le club des cheminots, le Lokomotiv local. Fondé en 1921, il a notamment remporté un championnat de Yougoslavie en 1972, atteint la demi-finale de la coupe de l’UEFA en 1985 et est à ce jour le club qui a gagné le plus de championnat de Bosnie-Herzégovine. Face à lui ce soir, le Krupa na Vrbasu, petit club de Republika Srpska qui dispute seulement la troisième saison de son histoire dans l’élite. Un match déséquilibré sur le papier mais on croise les doigts pour une petite surprise, notamment avec les conditions climatiques. Nous arrivons enfin au Stade Grbavica, qui lui aussi a connu une histoire bien mouvementée. Bien touché lors de la guerre, il en a gardé des séquelles jusqu’en 2012 puisqu’en plein hiver le toit de la tribune sud s’effondre suite aux dégâts et au mauvais entretien. En bien meilleure forme aujourd’hui, il dispose notamment d’une toute nouvelle pelouse. Un véritable changement pour le Zeljeznicar qui évoluait jusque-là sur un champ de patates.

Comme tout bon stade des Balkans, on retrouve de nombreux commerces au sein même du stade, sous les tribunes, dont la boutique du club où l’on peut se procurer une magnifique édition de maillot hommage au premier titre de champion de Bosnie du club, en 1998. L’heure du coup d’envoi approche. Nous prenons place dans une tribune bien vide. Il faut dire que nous avons eu la bonne idée de choisir la tribune sans toit. Les Ultras sont assez loin de la pelouse, l’atmosphère semble bien tristounette, surtout quand on voit une banderole déployée pour un supporter décédé il y a seulement quelques jours. Les locaux ont eu le bon flair et sont directement allés sous la tribune couverte, les touristes, comme nous et deux Français un peu plus loin, sont exposés à la pluie et au vent. Les deux tribunes couvertes sont bien remplies, les 22 joueurs entrent sur la pelouse sous le bel hymne du FK Zeljeznicar reprit par tout le stade.

© Antoine Gautier / Footballski

Dès le coup d’envoi, les locaux se montrent très dangereux. Un retourné stoppé par le gardien de Krupa, une tête sur la barre et un face à face finalement remporté par l’attaquant des cheminots dès la septième minute. Le rythme est assez impressionnant, le tout dans une ambiance particulière : aucun chant ultra n’est lancé avant la 26ème minute, moment auquel les supporters se mettent à chanter en l’hommage du supporter disparu en allumant 26 fumigènes (en référence à son âge). C’est dans cette ambiance de recueillement que Zeljeznicar gère sa première mi-temps, car à part les dix premières minutes de folie, les locaux s’endorment progressivement. La mi-temps est sifflée par l’arbitre sous la colère des joueurs de Krupa qui réclament une main dans la surface non sanctionnée. 1-0 à la pause, l’heure de nous mettre rapidement à l’abri.

© Antoine Gautier / Footballski

Le tour du stade d’avant match nous a permis de repérer un petit burekcilnica qui va nous sauver la vie. Frigorifiés, nous profitons de ce petit moment de bonheur chaud et fondant pour reprendre des forces et attaquer une seconde période que nous espérons plus chaude. Direction cette fois la tribune sud, couverte, pour nous mélanger avec les locaux. Des locaux plutôt inquiets du déroulement du second acte. Car Zeljeznicar est imprécis, s’endort et est surtout mis en danger par les contre-attaques de Krupa menées par leur excellent capitaine, largement au-dessus techniquement.

Une transversale, un face à face gagné par le portier de Zeljeznicar et finalement un but pour Krupa alors qu’il ne reste que vingt minutes ! Les grognements sont nombreux au sein des supporters, surtout quand Krupa manque l’immanquable en toute fin de match. Alors qu’il a le but ouvert et qu’il est complètement seul, l’attaquant ouvre trop son pied et ne cadre pas ! Zeljeznicar peut s’estimer heureux avec ce match nul, mais au vu du début de match on s’attendait à une ribambelle de buts pour le club de la capitale. Score final 1-1, mention spéciale aux latéraux des Cheminots qui n’ont pas réussi un seul centre de tout le match (y compris à l’échauffement). On espère voir un autre match à Zagreb la semaine prochaine…

LES NOTES

Standing du stade (3/5) : un mix entre semblant de modernité avec un écran géant dernière génération au-dessus d’une tribune sans siège à vingt mètres du terrain. Le stade Grbavica a du vécu et il reste encore beaucoup à faire pour obtenir une meilleure note.

Disponibilité des billets (5/5) : aucun souci pour trouver des billets, disponibles directement au stade ou dans certaines boutiques de la ville. Méfiance toutefois attention quand c’est derby.

Tarifs (4/5) : cinq euros pour une place en latérale, bon marché.

Ambiance (3/5) : l’hommage des supporters et les conditions n’ont pas aidé. On imagine qu’on doit approcher de la note maximale lors du match contre le FK Sarajevo.

Risques (4/5) : nous étions assez surpris de voir peu de policiers par rapport à la veille pour un match de D2. L’ambiance reste néanmoins bon enfant.

Accessibilité et transports (4/5) : un bon quart d’heure de tram depuis le centre-ville et une dizaine de minutes à pieds, le stade est plutôt simple à trouver.

Boissons (3/5) : le café a fait beaucoup de bien en seconde période. La buvette n’a rien de particulier au sein du stade, vous avez toutefois un excellent burek à l’extérieur de l’enceinte.

Quartier environnant (1/5) : si vous êtes nostalgique de la guerre de Yougoslavie le coin est fait pour vous : barres d’immeubles, éclats de balles. Plutôt lugubre.

Antoine Jarrige & Antoine Gautier à Sarajevo pour Footballski


Image à la Une © Antoine Gautier / Footballski

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