« On m’a demandé de prendre l’équipe et de la préparer pour les deux prochains matchs » déclarait Massimo Carrera après la victoire du Spartak (1-0) contre Krylia Sovetov. A ce moment là, le Spartak était sans entraîneur officiel, Dmitri Alenitchev ayant failli à sa mission de qualifier l’équipe pour la phase de groupe en Europa League (1-1 match aller et défaite 0-1 à l’Otkrytie Arena contre l’AEK Larnaca).
Une semaine après la saga Berdyev et les négociations infructueuses avec le tacticien turkmène, Massimo Carrera a été officialisé entraîneur du Spartak. L’Italien n’était arrivé au Spartak que depuis trois semaines en tant qu’assistant de Dmitri Alenitchev dans le domaine défensif. Mais les choses évoluent vite au Spartak. On s’attendait au début d’une période difficile avec l’arrivée d’un nouveau coach – qui plus est étranger – et de nouvelles méthodes, mais c’est tout l’inverse qui se produit. Le Spartak a joué quatre matchs sous les ordres de l’Italien (deux en tant que coach interimaire et deux en tant que coach officiel) et les effets se font déjà sentir avec trois victoires et un nul. Alenitchev semble être déjà un lointain souvenir…
Le retour de la tactique
La méthode Carrera, c’est tout d’abord le retour à la méthode italienne dans toutes les aspects du jeu. Aux entraînements, le travail tactique est beaucoup plus présent. Avec Dmitri Alenitchev, l’aspect tactique évoluait de match en match sans réellement savoir pourquoi. Durant la trêve estivale, Alenitchev a fait jouer l’équipe avec deux défenseurs centraux mais lors du premier match de RPL, l’équipe se présentait avec trois défenseurs centraux… Le plus inquiétant dans tout ça étaient les joueurs qui paraissaient perdus sur le terrain. L’entraîneur semblait ne pas réussir à transmettre son message et ses envies.
Avec Carrera, le travail tactique est quotidien. Les joueurs, à travers leurs interviews, ne s’en plaignent guère. Et ce travail se voit sur le terrain : les combinaisons sont plus fluides, les placements/replacements sont plus justes, etc. De plus, Carrera a replacé les joueurs-clés là où ils étaient les plus performants. Promes, par exemple, est plus dans la création offensive et plus seulement dans la finition. Zobnin, recruté cet été, apporte un bien fou sur le côté et sa convocation en sélection nationale n’est que la juste récompense de son bon début de saison. Ze Luis participe aux phases offensives et n’est plus ce point de fixation perpétuel devant qui l’empêchait d’être en mouvement et d’apporter sa vitesse.
Venu au Spartak pour solidifier une défense trop poreuse, Carrera semble avoir resserré les boulons derrière et avoir ouvert les vannes devant. Le Spartak est, après cinq journées, meilleure attaque avec 10 buts et co-meilleure défense avec le CSKA n’ayant encaissé qu’un but.
La hargne sur et en dehors du terrain
Côté intensité dans le jeu, c’est le jour et la nuit. Le jeu sous Alenitchev partait de l’arrière avec peu de verticalité. Il avait semblé rectifier cela en début de saison mais le jeu restait très lent. Quant au pressing défensif, il s’effectuait assez bas. Carrera a apporté cette intensité toute italienne qui est sa marque de fabrique: pressing haut et constant, de la verticalité et une sortie de balle plus rapide permettant des contre-attaques efficaces. Il faut dire qu’il a été à bonne école en étant l’assistant d’Antonio Conte à la Juventus et en sélection nationale Italienne.
Sur et au bord du terrain, Massimo est partout! Il harangue ses joueurs de la première à la 95e minute dans les replacements, les encouragements… Un Conte bis en puissance! Et ça contraste avec le calme d’un Alenitchev limite déprimant sur le banc. La victoire face à l’Anzhi (2-0) a montré cette dynamique positive qu’a insufflé Carrera au sein du groupe en voyant Promes foncer vers le banc pour fêter son but ou la joie et les encouragements de Carrera envers ses joueurs à la fin du match, célébrant la victoire.
Le chemin est encore long
Les résultats suivant, les supporters ont tout de suite adopté l’Italien. La saison n’en est néanmoins qu’à ses débuts et l’enthousiasme ambiant peut vite retomber avec des résultats en-dessous des attentes. Carrera devra être jugé lors des confrontations contre le Zenit ou le CSKA. La victoire 1-0 face au Lokomotiv, malgré les suspensions de certains joueurs, a montré qu’il faudra compter sur le club au losange cette année. Carrera a su trouver la formule (titulariser un Popov décisif, faire débuter Mauricio tout juste arrivé de la Lazio) pour passer l’obstacle du Lokomotiv version Semin.
Le Spartak a connu tellement d’entraîneurs lors de ces treize dernières années qu’il est préférable d’attendre et de voir dans les moments faibles l’impact qu’aura Carrera sur l’effectif. D’autant plus que certains comme Zuev grondent un peu sur leur faible temps de jeu… Carrera n’a connu le banc en tant qu’entraîneur principal qu’à la Juventus en 2012, lorsqu’il prend l’intérim de Conte, toujours considéré comme entraîneur mais en attente de son procès pour son implication dans le Calcioscommesse. Tout le reste du temps, il fut dans l’ombre d’Antonio Conte et le fait qu’il parte au Spartak au lieu de suivre son grand ami à Chelsea prouve qu’il souhaitait s’affranchir de cette position d’assistant. Il a désormais les clés du bateau et il devra prouver dans les bons comme les mauvais moments qu’il est tout aussi compétent que son illustre ami.
Par Vincent Tanguy
© Image à la une: Epsilon/Getty Images