Arrivé à l’aéroport de Katowice, je savais que j’avais rendez-vous avec l’histoire. L’Histoire même, celle du football polonais. En effet le club du Gornik (mineurs) détient le record de victoires en championnat de Pologne. 14 titres, tous acquis sous la période communiste. Ils partagent ce record et ce fait avec les voisins du Ruch Chorzow. Voisins ? Oui, car durant les 25 minutes que séparent en train Katowice de Zabrze, on a le temps de passer par Chorzow; la région industrielle de Silésie ayant été longtemps le poumon du football polonais.
Zabrze est une ville industrielle, tout ce qu’il y a de plus banale, sans même un centre historique. Elle n’était tout d’abord qu’un village dortoir pour mineurs avant de recevoir le statut de ville assez tard. C’est en 1948 seulement que son club va être créé, au moment où la ville venait d’être rattachée à la Pologne. Car, oui Zabrze, ou plutôt Hindenburg se trouvait sur la démarcation Allemagne/Pologne. Katowice était déjà polonaise au contraire de sa petite voisine restée germanique. Son stade a été construit en 1934 par les Allemands et était connu sous le doux nom de « Adolf Hitler Kampfbahn« ; il deviendra ensuite plus sobrement « Stade municipal » pour accueillir les exploits du Gornik ponctués par une défaite en finale de C2 devant Manchester City en 1970.
Aujourd’hui, tout a changé. Le stade est devenu Stade Ernest Pohl du nom de la star du club dans les années 50 mais on ne distingue plus l’ombre d’un trophée depuis des années. Pire, les spectateurs sont confinés dans les 3 000 places ouvertes au public. En effet le stade est en reconstruction depuis 2011, mais à cause de malversations et banqueroutes, les travaux ne se terminent toujours pas et la nouvelle version du stade qui devait accueillir plus de 30 000 spectateurs se fait longuement attendre. Sportivement, cette saison ressemblait plus à ce que les gens ont connu ici, du moins au début de saison. Par la suite, les mineurs sont retombés dans l’anonymat du ventre mou avec une seule victoire sur les onze derniers matchs. Les problèmes sont en partie dûs à la situation financière : l’an dernier, le club ne remplissait pas les critères pour participer à une coupe d’Europe (cela s’est légèrement amélioré récemment) et les meilleurs joueurs sont vendus, souvent en Chine comme Zachara cet hiver.
En face, c’est le GKS Belchatow qui se présente. Venus d’une petite ville un peu plus au nord, ce club promu (mais ayant disputé 5 des 6 dernières saisons en Ekstraklasa) est aussi en chute libre avec une victoire lors des treize dernières journées, et une défaite cuisante à domicile face à la lanterne rouge Bydgoszcz 4 buts à 1 alors que les verts ont bâtis leur réputation sur une défense hermétique.
Une fois la ville découverte, le stade trouvé, le billet acheté, la carte d’identification reçue; c’est l’heure de pénétrer dans l’enceinte ! La tribune est pleine mais le spectacle du reste du stade vide est triste pour une ville aussi passionnée par son équipe. Côté compos, on note une grande colonie slovaque devant avec Jez, Grendel et Gergel mais surtout l’inusable capitaine Radoslaw Sobolewski, 38 ans et ancien du Wisla. En face, rien de bien connu pour un non-initié mais une paire d’attaquants légère et rapide composée de Mak et Piech.
Peu de choses à signaler dans ce match, l’ambiance est détendue en tribune pendant que la Torcida chante à l’autre bout de la tribune. Seul Arkadiusz Piech, ancien de l’ennemi juré Ruch Chorzow en prend pour son grade. Raillé à chacune de ses chutes, cela poussera même le speaker a demander du respect pour les joueurs des deux camps. Les occasions seront peu nombreuses et le début de match ne permettra donc pas pour le moment à la légende Stanislaw Setkowski d’agiter beaucoup sa cloche comme il le fait depuis cinq décennies; mais c’est l’arrière latéral Rafal Kosznik, homme le plus dangereux en première mi-temps qui va libérer le stade à la demi-heure de jeu en suivant bien une action qu’il conclue d’une frappe puissante. 1-0. Le capitaine Sobolewski va lui par contre se blesser et laisser sa place à Radoslaw Kurzawa (non non, aucun lien de parenté). Ce dernier s’est d’ailleurs entraîné à la mi-temps … au jeu de tête devant les cages, ce qui peut paraître surprenant pour un numéro 6. La mi-temps permettra aux supporters de se détendre avec un hot-dog tout en raillant la mascotte locale !
En deuxième mi-temps, les visiteurs vont profiter d’une équipe du Gornik refroidie par la pause pour se montrer dangereux, notamment sur coup-franc par Pozniak mais ils ne parviendront pas a égaliser et Marek Zub va jouer son va-tout en faisant ses trois changements assez rapidement (on notera l’entrée du Russe Komolov, ancien du Zalgiris Vilnius) mais cela va s’avérer préjudiciable car Piech, une nouvelle fois au sol, et une nouvelle fois raillé, ne pourra pas tenir sa place plus longtemps et obligera son équipe à terminer à 10.
C’est le nouvel entrant, défenseur ukrainien, Oleksandr Shevelyukhin qui, resté aux avant-postes suite à un coup de pied arrêté, va sceller le sort du match par une frappe anodine à ras de terre qui va pourtant tromper Trela. Dès lors le match va se finir sur un faux-rythme. Le Gornik s’est donc relancé avec cette victoire 2-0 alors que Belchatow va devoir batailler dans la poule de relégation pour prolonger son bail en Ekstraklasa. La tribune se vide dans le calme et la bonne humeur. Le seul point positif pour les habitants du fait des travaux du stade est que les supporters adverses ne sont pas invités et les bagarres ont momentanément disparues des abords du stade Ernest-Pohl. Enfin sauf contre les rivaux du Ruch…
Le résumé vidéo du match est ici:
[youtube R7f7s1UueAI]
En tout cas, après ce match et comme vous pouvez le voir, je resterai pour toujours un Gornik !
Adrien Laëthier
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