On a discuté avec Sébastien Thill, joueur du Sheriff Tiraspol

Alors que le Sheriff Tiraspol joue en Ligue des Champions pour la première fois de son existence, nous nous sommes entretenus avec Sébastien Thill, un des joueurs francophones de cette équipe cosmopolite.

Source: Sébastien Thill

Bonjour Sébastien, tout d’abord, est-ce que tu peux te présenter ?

J’ai commencé tout jeune à Rodange où j’ai grandi, puis j’ai passé dix ans à Niederkorn. J’ai commencé en Une à Bettange, où j’ai passé trois ans, puis je suis revenu au Progrès Niederkorn. L’année dernière j’ai eu la chance de signer en Russie, à Tambov, mais il y a eu des problèmes de salaire donc je n’y ai passé que quatre mois, et maintenant je suis au Sheriff Tiraspol.

Comment tu passes du Luxembourg à la Russie ?

J’ai joué avec un joueur à Niederkorn et lui m’a appelé, m’a demandé si je ne voulais pas le rejoindre car le club cherchait un milieu. C’est comment ça que je suis arrivé là-bas. J’ai réfléchi avec ma famille, mes amis, ma copine… Le pays était fermé avec le coronavirus, il faut faire un visa pour y aller donc ce n’était pas une petite décision mais j’ai choisi d’y aller.

Tu arrives, tu as problèmes de salaires et le covid… Pas facile comme début…

Après le covid là-bas, c’était pas aussi strict. Ils ferment les frontières pour les touristes, mais à l’intérieur du pays ça allait. On jouait notamment avec des supporters dans les stades.

Au niveau de la vie locale ça donnait quoi ?

Je jouais à Tambov mais on jouait pas là-bas car ils n’ont pas de stade. On était à cinq heures de là, dans une petite ville avec un stade. Comme on y habitait, on n’avait pas trop de supporters car on était loin. C’est la Russie, j’aimais bien.

Du coup, la Moldavie, ça t’a pas trop dépaysé ? Tu arrives comment ?

J’ai pris un agent vers novembre je lui ai dit : «Il y a des problèmes ici, je veux partir.» En décembre, il m’a dit qu’il fallait qu’on se voit, qu’il avait un club pour moi. C’était le Sheriff et j’ai pris la décision de rejoindre ce club.  Quand je suis arrivé, j’ai vu que les gens parlaient tous russe, donc je me suis cru en Russie. J’ai commencé à m’intéresser au Russe récemment. C’est une langue assez compliquée, mais mon frère en Ukraine le parle, lui.

Et les installations… c’est hallucinant ! Beaucoup de clubs de première division en Europe n’ont pas ça. On a trois stades, huit terrains de football, une piscine, un hôtel, etc.

Moi ce qui m’a fait halluciner lorsque je suis allé à Tiraspol, c’est le stade pour l’hiver.

Le Stade pour les matchs importants. Source: Lazar van Parijs

J’ai fait deux mois de préparation dedans, et on y a joué pendant un mois. On est habitués, et il fait pas froid donc c’est agréable. On n’a pas de neige. A l’époque il n’y avait pas de supporters, on entendait tout.

Stade d’hiver. Source: Lazar van Parijs

Pour les supporters d’ailleurs, ça se passe comment ?

Pour les matchs de Ligue des Champions contre le Dinamo Zagreb et Crvena Zvezda, on avait environ 50% du public. Sinon c’est un peu plus compliqué. Pour le dernier match avant la Ligue des Champions, on a joué à l’extérieur et il y avait déjà plus de monde. A voir sur le long terme si la Ligue des champions nous amène des supporters.

Votre objectif pour la Ligue des champions ?

Faire de bons matchs, être un bon adversaire. Ne pas se prendre des gros scores et pourquoi pas viser la troisième place. L’année dernière, Ferencvaros a fait une belle Ligue des Champions, c’est un exemple. Après, on n’a rien à perdre, on va jouer libre.

Tu t’attendais à jouer aussi haut en arrivant ici ?

Non. Déjà, on a du passer quatre tours préliminaires. Tout le monde voulait jouer la Ligue Europa, mais c’est après Belgrade qu’on a commencé à y croire.

Je suis principalement le football serbe, et c’est aussi à ce moment que je vous ai découvert… J’ai trouvé que vous étiez compacts, sérieux. C’était surprenant. Vous avez empêché l’Etoile Rouge de Belgrade de jouer et derrière vous jouez avec des contre-attaques.

On les bloque dès le départ. Derrière on est costaud, et devant on a des gars qui vont vite. Contre Zagreb, on a fait un très gros match à la maison. On aurait même pu gagner un peu plus, on a mis de beaux contres et après on a géré au match retour.

Ca se passe comment dans le vestiaire ?

On a une équipe de tous les pays, avec les Sud-Américains un peu plus ensembles, les Africains francophones, ceux qui parlent russe, etc. Mais tout le monde se comprend bien, on rigole bien ensemble. On a un esprit d’équipe avant tout. On se bat tous ensemble. Quand on a un anniversaire, on y va tous par exemple.

Qu’est ce qui t’a impressionné le plus à Tiraspol ? Tu passes ton temps libre comment ?

Le complexe sportif, c’est vraiment quelque chose d’immense. Après, la ville, c’est pas très grand. Il y a de beaux petits coins mais c’est pas très grand.

On a toujours entrainement le soir, donc souvent je dors beaucoup, puis je vais manger et après on a un team meeting deux heures avant l’entrainement, où l’on regarde l’entrainement. Certains joueurs vivent directement sur le complexe. On peut s’inscrire aussi pour y manger. Je peux recevoir à manger trois fois par jour.

Tu as voyagé un peu en Transnistrie ?

Quand on a un jour de libre, je prends un hôtel à Chișinău et j’y passe une journée. Sinon on a entrainement tous les jours donc c’est compliqué. En fait, quand mes coéquipiers ont du temps libre, c’est quand je pars équipe nationale.

Comment tu définis le niveau du championnat moldave ?

C’est un championnat qui progresse. Je vois une différence avec l’année dernière. Il y a deux mauvaises équipes qui sont parties. On est plus qu’à huit équipes. Tu as nous en champions et trois en qualifications de Ligue Europa Conférence. Les équipes en haut de tableau deviennent meilleures.

On voit de plus en plus de jeunes Moldaves au Sheriff, tu peux nous en dire plus ?

Dès qu’il manque des joueurs, on ramène des jeunes. Dans la ligue, on voit aussi de bons jeunes joueurs. C’est un bon championnat tremplin pour se montrer.

Tu te vois rester à l’est ?

Moi j’ai encore mon contrat ici mais après on verra. Je suis un peu loin de ma famille et de ma copine, mais ça ne me dérange pas du tout. J’aime bien l’aventure. Découvrir une nouvelle culture. Ici c’est très différent de ce qu’on a chez nous.

Vous travaillez comment avec Vernydub ?

On travaille beaucoup avec la video, c’est plutôt carré. Dès qu’on fait une petite faute il nous le dit pour qu’on ne la fasse plus. Et il faut le dire, on travaille beaucoup. Mais beaucoup de tactique. Je progresse dans le jeu, en championnat on a toujours la balle, donc forcément on progresse. C’est un plaisir d’avoir le ballon. On prend toujours match après match. Même si on a la Ligue des Champions, on va d’abord penser au championnat.

Tu sens l’effervescence de la Ligue des Champions ?

Oui ! Avant notre qualification, il n’y avait que les journalistes de Tiraspol. Maintenant il y a toi, un journaliste allemand est également venu pour voir un match avant la Ligue des Champions. Pour les billets, des amis ont envie de venir voir. Et quand je vais chez le coiffeur, je lui paye un billet pour venir voir le match.

La vie nocturne on en parle ?

Passion karaoké ! Comme en Russie, ils aiment trop ça. Moi je ne suis pas trop fan, je préfère aller en boite. Mais globalement je sors pas trop.

Comment ça s’est passé cette coupure internationale ?

Je pense on a fait du plutôt bon travail. On a fait un premier gros match où l’on a gagné face à l’Azerbaïdjan, puis un peu plus compliqué face à la Serbie. Et lors du dernier match amical face au Qatar, on a fait tourner, on a mis des jeunes et on a fait un match nul. On a de la chance avec mes frères.

Le football luxembourgeois s’améliore, que ce soit en club ou en sélection. Comment tu l’expliques ?

Il y a de plus en plus de Luxembourgeois qui partent jouer à l’étranger et maintenant, en sélection, il y a beaucoup de joueurs qui jouent dans de bons clubs. Tous les ans, on s’améliore.

Terminons avec l’actualité, comment avez-vous préparé le match face au Shakhtar et comment es-tu avant d’affronter le Réal Madrid ?

On a preparé ce match comme les autres, on a étudié l’adversaire et essayé de jouer sur leurs points faibles. Jouer face au Real est un enorme plaisir. C’est génial de jouer contre les meilleures équipes. Il faut profiter au maximum et tout donner sur le terrain.

Merci à Sebastien Thill pour sa disponibilité.

Tous propos recueillis par Lazar Van Parijs.

Leave A Comment

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.