Certaines carrières de footballeur ne sont pas comme les autres. Alors, quand on est tombé sur celle du Guinéen Fousseni Bamba qui a joué dans déjà 7 pays à seulement 26 ans, on s’est dit qu’on devait s’intéresser de plus près à lui. Découverte d’un joueur au parcours atypique.

Peux-tu te présenter en quelques mots?

Je m’appelle Fousseni Bamba et je suis né 19 avril 1990 à Bingerville en Côte d’Ivoire, d’une mère ivoirienne et d’un père guinéen. J’ai la nationalité française et je suis international guinéen depuis octobre 2015. Je joue actuellement en Géorgie à Zugdidi.

Tu es né à Bingerville en Côte d’Ivoire, quand es-tu donc arrivé en France?

J’ai débarqué en France à l’âge de 11 ans avec mes parents en région parisienne. J’ai commencé à jouer au football avec les U15 Lilas et j’ai ensuite joué dans plusieurs clubs de niveau régional. A 18 ans, j’ai commencé à jouer avec les U18 nationaux de Côte d’Ivoire et j’ai découvert la CFA.

Comment es-tu arrivé à jouer au foot?

C’est simple, dans la famille on est tous foot! Mon père est un grand fan du Brésil et de la France, on est donc baigné dedans depuis tout petit. C’était logique qu’on suive cette voie-là, j’ai un frère qui joue en Russie à Orenbourg, un autre joue en région parisienne au niveau PH.

En 2012, à 22 ans tu quitte Viry Châtillon pour la Hongrie, direction Szeged en D2 hongroise. Comment ça c’est fait? Tu avais d’autres offres?

A cette époque, j’avais pas mal de clubs professionnels français qui me suivaient. Lens et Lorient étaient intéressés par moi mais c’est Strasbourg qui était en Ligue 2 à l’époque qui semblait me vouloir. Je suis allé là-bas faire quelques tests, tout semblait être OK mais finalement ça ne s’est pas fait… C’est alors que j’ai reçu une offre venant de Hongrie, la fin de mercato d’hiver approchait rapidement, j’ai donc décidé de tenter ma chance.

Pourquoi avoir choisi la Hongrie?

Tout d’abord j’ai eu un peu peur d’aller en Hongrie. C’est pas facile quand t’es jeune de prendre la décision de partir dans un pays que tu connais pas, avec une langue que tu ne maîtrises pas… Mais il y avait quelqu’un à Szeged qui connaissait mon frère, Yacouba, qui joue à Orenbourg. Ce fut un soulagement pour moi de savoir ça et j’ai décidé de me lancer dans l’aventure! Les débuts ont été particulièrement difficiles puisque je suis arrivé en plein mois de décembre dans un hiver glacial, avec des conditions plus qu’extrêmes auxquelles je n’étais pas habitué… Le foot est totalement différent de ce que j’ai vécu en France, surtout au niveau des entraînements où ça joue beaucoup plus physique.

A la base j’avais un contrat de 3 ans mais le club avait de grosses difficultés financières. Ils ont profité de mon statut particulier car j’étais considéré comme un jeune là-bas, du fait que je n’avais pas 23 ans, pour me faire passer par un contrat amateur de un an.

11 matchs et 1 but plus tard, tu pars à Gloria Bistrita en Roumanie, pourquoi ce choix?

A vrai dire, mon contrat était terminé, le club ne voulait pas me prolonger et le Gloria était le seul club à me faire une offre concrète donc je suis parti en Roumanie.

Tu découvre alors l’élite du football roumain, que penses-tu du niveau?

De tous les championnats que j’ai pu faire, le championnat roumain est le plus relevé. Il y a un manque d’argent évident et ça pose beaucoup de problèmes pour le développement du football local mais il y a un vivier assez impressionnant de très bons jeunes joueurs prometteurs. J’ai eu la chance de jouer contre des équipes comme le Steaua et le Dinamo Bucarest, des équipes de niveau continentale.

En Roumanie et Hongrie quand tu joues dans la capitale ça va, les gens ont l’habitude de voir des gens de couleur mais quand on en sort c’est autre chose… Quand je me baladais dans les villes, tout le monde voulait me prendre en photo, c’était assez perturbant. C’était pas vraiment du racisme, d’ailleurs je n’en ai jamais vraiment connu en Europe de l’Est mais bon, je ne pouvais pas sortir à cause de ça.

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Fousseni sous les couleur de l’Agia | © Archive personnelle de Fousseni Bamba

Une saison plus tard, tu retournes à l’UJA Maccabi. Tu voulais revenir en France?

A la fin de mon contrat avec le Gloria, j’avais la possibilité de signer dans un club bulgare. Je suis parti faire des tests mais bon ça ne s’est pas fait à cause d’un simple problème de date. J’avais absolument besoin de jouer alors je suis rapidement retourner en France pour trouver un club et c’est comme ça que j’ai fini au Maccabi.

L’aventure en France ne dure pas puisque tu décides de rejoindre Chypre et l’Agia Napa…

Un autre club de National m’avait fait une offre mais celle venant de Chypre était bien plus intéressante! J’ai fais mes bagages et je suis parti pour l’Agia Napa. De nombreux joueurs de Ligue 1 jouent là-bas, ça m’a donné confiance en moi.

Avec lesquels tu dispute une bonne saison avec 27 matchs!

Oui, ce fut la meilleure de ma carrière! Je me suis très bien senti dans mon club et j’avais de très bonnes relations avec mes coéquipiers et le président. Chypre c’est le paradis, y a le soleil, la mer et le football! J’ai pu rencontrer de nombreux joueurs français comme Camel Meriem et Diallo qui joue actuellement à Nancy. C’était de bons moments.

Un an et demi plus tard, nouveau changement et direction la Biélorussie et Slutsk.

Lors de ma seconde saison à l’Agia Napa, j’ai été approché par le staff de la Guinée qui était dirigé à l’époque par Luis Fernandez, j’ai eu la chance de faire ma première sélection contre le Maroc. Au point de vue championnat, cette saison était nouvelle pour le championnat chypriote puisque que celui-ci prenait un nouveau format. Je me suis dit, si l’équipe descend je partirai car je ne veux pas rester trois mois sans jouer, surtout pour la sélection. Un format qui nous fut finalement défavorable puisque nous sommes descendus. Je devais trouver un autre club et à ce moment le seul mercato ouvert était celui d Biélorussie, j’ai donc décidé de partir pour Slutsk.

Tu as joué seulement six mois là-bas, tu as affronté le BATE?

Le niveau en Biélorussie est correct mais l’équipe qui sort du lot c’est le BATE même si le Dinamo Minsk c’est pas mal non plus. Le BATE à domicile c’est impressionnant, une véritable forteresse. De toutes les équipes que j’ai pu affronter au cours de ma carrière, c’était la meilleure.

L'aventure Biélorusse ©Fousseni Bamba
L’aventure biélorusse | © Archive personnel de Fousseni Bamba

Puis direction la Géorgie et Zugdidi, ça te disait d’aller jouer là-bas?

Jamais je ne me suis dit dans ma vie que j’allais un jour jouer en Géorgie, je ne m’attendais pas à partir là-bas, cette destination c’était vraiment la dernière en Europe dans ma tête. Quelques clubs d’Afrique du Nord et du Maghreb étaient intéressés par moi mais je voulais rester en Europe. De plus, le projet m’a assez plu à Zugdidi, surtout le projet du nouveau stade. Après je ne suis là que pour 4 mois, après on verra bien.

Comment trouves-tu le foot géorgien?

Le niveau est vraiment limite, limite. C’est sûrement le niveau le plus faible auquel j’ai eu affaire dans ma carrière pro. Les infrastructures c’est moyen aussi, je vais pas vous le cacher mais Zugdidi c’est pas vraiment le top!

Vous connaissez un début de saison difficile… Quels sont vos objectifs cette saison?

L’objectif est simple, surtout avec la nouvelle formule: le maintien! Après, si on peut viser plus haut pourquoi pas, mais ça sera difficile.

On a pu voir le Dila Gori-Zugdidi en août dernier avec les Ultras de Zugdidi et on a pu voir la ferveur qui y règne! Heureux de jouer devant un tel public?

C’est vrai que je ressens une vrai ferveur dans ce club. Les gens me reconnaissent dans la rue, parfois me disent des choses incompréhensibles en géorgien mais sont toujours là pour nous. Ils viennent souvent aux entraînements nous mettre la pression, surtout depuis que nous accumulons les mauvais résultats.


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Ton frère évolue en Russie à Orenbourg, et toi quels sont tes projets?

Actuellement je cherche un club stable n’importe où en Europe qui me donnera une chance de jouer. Il y a Ufa en Russie qui est intéressé par moi, mon visa est déjà prêt et j’espère vraiment pouvoir signer là-bas. J’ai également été supervisé par un club israélien lors d’un match à Zugdidi mais il n’y a rien de bien concret actuellement.

Pas trop dur d’être un joueur de couleur quand on joue à l’est? Tu as déjà subi du racisme?

A part l’histoire des photos, pas trop. Peut-être avec les entraîneurs quand ils font des choix et qu’ils privilégient les locaux, mais bon ça c’est pas sûr!

Tu semble être un amoureux de l’est, quel a été ton pays préféré jusqu’à présent?

J’ai bien aimé la Roumanie mais Chypre restera ma destination favorite! Les plages, la vie là-bas, mais aussi les supporters… C’est vraiment quelque chose de magique.

Au niveau international, tu as disputé 9 matchs avec les espoirs Ivoiriens et 2 matchs avec la sélection de Guinée. Pourquoi ce choix?

La Côte d’Ivoire m’a offert la possibilité de jouer en espoir mais je n’ai jamais eu ma chance en équipe première… Comme mon père est guinéen, la sélection m’a approché et m’a donné l’opportunité de devenir international, ce que je ne pouvais pas refuser. Ces deux matchs, ce fut que du bonheur! Maintenant je n’ai qu’un rêve, participer à une CAN avec la Guinée.

Pour finir, tu as des anecdotes sur ta carrière ou sur la vie à l’est?

Si il y a bien une chose qui m’a marqué à l’est, ce sont les taxis! Ils sont pas trop nets là bas, les prix augmentent parce que tu es étranger et la conduite c’est souvent l’horreur! Mais bon ça fait parti du folklore local.

Antoine Jarrige


Image à la une : © Archive personnel de Fousseni Bamba

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