La European Club Association (ECA) est une association représentant les intérêts des clubs de football en Europe. L’ECA représente 214 clubs Européens et existe afin de protéger et promouvoir le football des clubs. Olivier Jarosz est Membership Manager à l’ECA également personne de liaison avec « les clubs Footballski« .
Pourrais-tu te présenter à nos lecteurs et indiquer ton rôle à la European Club Association ? Quels sont tes principaux champs d’actions ?
L’ECA est un organisme indépendant qui représente les clubs au niveau européen et qui offre aussi ses services en conseil sur le football, tant sur l’aspect sportif qu’entrepreneurial. Je suis en relation et j’officie comme une des personnes de contact parmi nos 214 membres issus des 53 associations membres de l’UEFA, et même si je ne fais de distinction, je porte une attention particulière aux clubs membres des « moyennes » et « petites » Associations Nationales qui sont définies par le classement UEFA. Parmi celles-ci on compte à peu près 80 clubs issus des pays d’Europe Centrale, de l’Est et du Caucase.
Je suis également en charge du groupe de travail lié à la jeunesse ainsi que du Comité Féminin où nous traitons les aspects associés d’un point de vue de clubs.Ces divers groupes de travail de l’ECA fournissent des conseils et son soutien actif au Comité Exécutif et aux membres ECA représentant celle-ci au sein des comités ou groupes de travail de l’UEFA, la FIFA et même au de l’Union Européenne. Les groupes de travail permettent aux clubs membres de s’investir dans l’association. Les discussions et les décisions résultant des groupes de travail permettent également à l’association de se positionner par rapport à des dossiers spécifiques.
Tu es un expert des clubs de l’Est, d’où cet intérêt ?
Personnellement, je n’aime pas tellement l’expression expert ou spécialiste, mais je dirais que j’ai acquis par mon histoire personnel, mes intérêts, mes origines une sensibilité qui fait que je naturellement plus proche des clubs de cette région spécifique. Déjà très jeune, j’ai eu la chance de pouvoir voyagé dans les pays de l’Europe centrale. En fait, féru d’histoire de géographie et de football ,j’ai toujours associé les villes d’abord avec … un club de football.
Mon rôle à l’ECA est surtout de promouvoir l’échange entre clubs, et les clubs dit de l’Est ne se connaissent pas assez du à leur ‘isolement’ puisque dès août de chaque année, la plupart de ces clubs ne participent plus aux compétitions européennes, qui sont par mon expérience,une des portes d’ouverture privilégié sur les échanges interpersonnels. Ainsi c’est bien à travers l’ECA et les nombreuses rencontres et réunions que nous organisons que nous sommes devenus un pont, une liaison essentielle et peut-être même à certains égards unique. Avoir une sensibilité de l’Est permet peut être de nouer des contacts plus spontanément, peut-être que les gens se disent, il est des « nôtres », et non plus avoir de complexe car il peut nous comprendre. Ce qui me surprend encore aujourd’hui,et ce même bien au-delà du monde du sport, c’est que l’Est est encore parfois associé à des images qui datent de la guerre froide. A mon avis cela crée encore beaucoup d’incompréhension. D’un autre côté, je peux comprendre cela puisque dans nos cultures slaves (slave signifie mot commun: slovo) l’accent est toujours mis sur le bon vivre, la simplicité au sens positif. Regardez par exemple les cérémonies de mariages. A ‘l’ouest’ c’est un contrat entre deux parties où l’on s’amuse ensuite en soirée, dans nos pays c’est un rituel particulier suivi par une joie de vivre.
« Les clubs l’Est ne peuvent pas se reprocher directement les erreurs du passé. En effet, pendant les régimes communistes les clubs étaient majoritairement organisés sous forme associative dirigé par le parti central qui utilisait le sport purement à des fins d’instrumentalisation»
A ton avis quels sont les champs ou les clubs de l’Est ont des progrès à faire ? Où est le retard par rapport aux clubs des grands championnats du BIG 5 ?
Tout d’abord, je mentionnerais que les clubs de l’Est ne peuvent pas se reprocher directement les erreurs du passé. En effet, pendant les régimes communistes les clubs étaient majoritairement organisés sous forme associative dirigé par le parti central qui utilisait le sport purement à des fins d’instrumentalisation du parti, où le sport ne jouait finalement qu’un rôle supplétif, laissant dans le management des clubs un fracture de leadership. Les gens à l’ouest ne se rendent vraiment pas comptent de cette fissure qui reste et qui ne s’applique bien évidemment pas qu’au football. Ma conception que je peux schématiser ci-dessous est qu’en Europe de l’Ouest de l’après-guerre les clubs se sont organisés petit à petit comme des structures autonomes capables de générer des revenus commerciaux. Les clubs de l’Est, ont seulement commencé à se développer sur ce modèle à partir des années 90 mais cela à créer un fossé assez difficile à rattraper.
Actuellement à mon avis les défis se trouvent à 5 niveaux :
- La détection et la formation et des talents demande à être plus performante, en effet elle reste aléatoire et résulte parfois comme un coup de chance. Actuellement, dans beaucoup de pays de l’Est il n’y a pas de vrai système quoiqu’on en dise.
- Le rôle réel de la place des centres de formations. Si pour beaucoup de clubs cela reste en pratique le seul moyen de survie financier et de fonctionnement, très peu d’entre eux ont réussi à mettre en place une méthodologie sportive dans la formation à l’instar d’un GNK Dinamo Zagreb, qui il faut le reconnaitre à une académie des plus performante si on se tient au nombre de joueurs vendus à l’étranger (à lire dans le ECA Youth Report).
- L’appât du gain. A la fois, des dirigeants, des joueurs et les agents qui parfois trop gourmand, mènent les négociations avec les clubs plus prestigieux uniquement dans une logique pécuniaire.
- Au-delà de l’aspect lié à l’histoire, la géographie et la taille des pays a une importance sur les clubs. Dans un grand nombre de ces plus petits championnats un voir deux clubs dominent généralement. Cela n’aide pas au développement du championnat dans son ensemble et pénalise le développent de la pyramide sportive entière.
- C’est un vrai défi du management. Le football est très aléatoire et beaucoup de clubs manquent de vision et de leadership. De nombreuses décisions parfois engageant la survie du club sont prises, pour un résultat potentiellement intéressant, mais fortement hypothétique. Quand on parle de football moderne (sport, business et communauté), il est essentiel de définir un plan stratégique et une structure adapté pour réaliser les plans.Toutefois, je nuancerais ces 5 éléments en rappelant que certains clubs ont fait de grands progrès dans la détection de talents et de scouting. Par exemple, le KKS Lech Poznań, les joueurs ‘scoutés’ jouent régulièrement dans l’équipe première, avec pour critère de réussite ceux-ci jouent au moins la moitié des matchs l’année de son achat. Deuxièmement,de nombreux clubs également ont saisi l’importance de la plus-value de la formation des jeunes et mis en place des nouvelles méthodes qui s’inspirent des grands clubs (ex : MSK Žilina). Troisièmement, on voit que dans les négociations des joueurs, l’aspect purement financier est de plus en plus mis de côté au profit de la progression et du développement sur le moyen terme (ex : transfert de Krystian Bielik du Legia Varsovie à Arsenal). Quatrièmement, les ligues de ces pays se professionnalisent et cela incite les bonnes pratiques de fonctionnement. Enfin, le management, dans un certain nombre de clubs a été professionnalisé, généralement suite à une crise, ce qui est d’ailleurs un puissant élan pour amener le dirigeant à prendre du recul et, par exemple, investir dans de jeunes joueurs, leur donnant une chance d’être les graines portant les fruits de demain.
Pour des raisons évidentes, bon nombre de clubs ont la tête dans le guidon, car en manque de staff, les clubs doivent se focaliser sur l’essentiel à savoir les résultats sportif du weekend. Or le football c’est aussi du business, la relation avec la communauté, les fans/supporters, c’est également offrir des services de qualité pour fidéliser.
Les clubs gagneraient en efficacité s’ils étudiaient mieux leur environnement, leurs avantages, apprivoiser leurs inconvénients.
L’ECA publie des nombreux rapports qui visent à échanger des expériences entre clubs. Votre dernière analyse est sur le Management des clubs ? Quels sont les recettes que les clubs Footballski peuvent s’inspirer ?
Il n’y a évidemment pas de recette magique, mais en tout cas je pense que les dirigeants des clubs devraient discuter et approfondir leur propre stratégie et adapter leurs structures. Les différentes initiatives de l’ECA ne sont pas des leçons à donner mais plutôt permettre aux clubs d’échanger des informations. En travaillant de près avec les dirigeants entre autre du Dynamo Kiev, Ferencvárosi TC ou encore FK Sarajevo (À lire : On a discuté avec Dino Selimovic, directeur général du FK Sarajevo ) sur ce projet j’ai observé certes les défis mais également les méthodes qui peuvent faire grincer des dents, pour ceux qui aiment le statu quo. En effet,pour des raisons évidentes, bon nombre de clubs ont la tête dans le guidon, car en manque de staff, les clubs doivent se focaliser sur l’essentiel à savoir les résultats sportif du weekend. Or le football c’est aussi du business, la relation avec la communauté, les fans/supporters, c’est également offrir des services de qualité pour fidéliser.
Les clubs gagneraient en efficacité s’ils étudiaient mieux leur environnement, leurs avantages, apprivoiser leurs inconvénients. Regardez, un club comme Jagiellonia Białystok, c’est le seul club de l’Ekstraklasa polonaise dans le nord-est. Varsovie se trouve à plus de 200 km ! Si elle ne possède pas les avantages de la capitale (concentration des sponsors, pouvoir d’achat des supporters…) pourtant, elle semble être efficace dans la détection de joueurs en Biélorussie voisine ou Lituanie. NK Maribor en Slovénie est également un exemple similaire. Tiens, regardez Podbeskidzie Bielsko-Biała à 7 joueurs slovaques. L’argument du management du club, lors de signature de contrat, est simple. « Tu vas jouer dans le championnat polonais mais tu pourrais résider en Slovaquie » (NdlR : Bielsko se trouve à 50 km de la frontière). Je trouve que c’est ça la force et l’avantage à saisir ! En tout cas je suis convaincu que pour que l’industrie du football devienne véritablement une industrie qui soit attentive à son intégrité, ait une économie de base viable, crée de la valeur ajoutée et maintienne ses liens forts avec sa communauté et la société au sens large, afin de devenir meilleure, les clubs doivent comprendre qu’ils doivent individuellement identifier ce qui les rend uniques et différents, à la fois en leur cœur et au sein de leur environnement.
En observant de très près les clubs comme le Shakhtar Donetsk, FK Sarajevo, Legia Varsovie, Rubin Kazan, Ferencvárosi TC pour ne nommer que quelques-uns et la montée en gamme du professionnalisme qu’ils véhiculent, ils deviennent des modèles d’inspiration pour toute une région qui vit du football. Le beau jeu ne suffit pas, maintenant l’étape et de s’organiser efficacement.
Quels est la particularité des clubs de l’Est ? Du positif ?
Je pense avant tout que les clubs de l’Est ont la faculté de faire beaucoup avec des staffs extrêmement réduits. Les droits domestiques sont faibles, les revenus du sponsoring encore marginaux, et le pouvoir d’achat des supporters trop faible pour qu’ils achètent une édition d’un maillot originale chaque saison. D’autant plus que les copies peuvent s’acheter pour 5€ …
Pourtant la locomotive est en marche, et les clubs essayent de l’attraper et employaient divers méthodes sur le court terme et comptent le facteur chance (participation à la ligue des champions…). Le seul problème c’est que parfois la poule aux œufs d’or, c’est un boomerang qui revient en force et ça peut leur être fatale (Artmedia Bratislava, Unirea Urziceni, …). Alors que faire ? Essayer d’avoir une vision à moyen et long terme, construire dans la patience, mettre en place une stratégie réaliste et adéquate. Impossible ? En observant de très près les clubs comme le Shakhtar Donetsk, FK Sarajevo, Legia Varsovie, Rubin Kazan, Ferencvárosi TC pour ne nommer que quelques-uns et la montée en gamme du professionnalisme qu’ils véhiculent, ils deviennent des modèles d’inspiration pour toute une région qui vit du football. Le beau jeu ne suffit pas, maintenant l’étape et de s’organiser efficacement.
Vous pouvez retrouver Olivier et l’ECA via Twitter et Facebook
P.Clanol
Bravo Footballski! vous grandissez! Si vous commencez a faire des interviews avec des personnes des institutions sportives c’est bonbon! Bravo
Je ne voyais pas sous cette angle, mais c’est une très bonne analyse du Monsieur.
En tout cas cette perspective n’est pas assez connu, voir discuté, et mérite d’être plus souvent présenté. En tout cas une nouvelle fois pas mal footballski! car ce genre d’analyse de fond et en même temps sommaire sont vraiment utile pour mieux comprendre les clubs footballski. Continuez!!!!
Bonne analyse car en tant que supporetre on regarde souvent le travail du coach mais on oublie que l´efficacite dún club est du a son entourage et a son management. En Allemagne on voit que la puissance des clubs est certes lie a la puissance economique mais sutorut a la qualite de la classe dirigeante. Bref, les clubs doivent regarder un plus sur le moyen-long terem est pas juste espere des resultats sportifs dún coup.
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