Bien que relativement méconnu en Europe de l’ouest, Nicolae Dobrin est une des plus grandes légendes de l’histoire du football roumain. Voire même le plus grand pour certains, dont je fais partie. De par son parcours, son talent, son état d’esprit, il aura marqué à jamais l’histoire.
Dobrin est né le 26 août 1947 à Pitesti. Il resta une grande partie de sa vie dans sa ville natale, évoluant quasi exclusivement au Dinamo Pitesti (qui deviendra FC Arges Pitesti en 1968). Dobrin est Pitesti. Pitesti est Dobrin.
Il fut un milieu offensif comme on en fait plus: maître du dribble, expert de la feinte, des caviars donnés à ses coéquipiers, sans oublier une aisance remarquable sur coups de pieds arretés.
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Petit retour sur la carrière de Gâscanul (« Le jars ») en quelques lignes
Alors qu’il n’avait que 12 ans, quelques joueurs du Dinamo Pitesti, les héros de Nicolae à cette époque, le voient jouer dans la rue. Ils tombent subitement sous le charme de ce gamin talentueux qui bluffe tout le monde. Il s’engage au club et fait ses débuts en équipe première en juillet 1962 face à Stiinta Craiova (l’ancêtre de l’Universitatea Craiova), alors qu’il n’est âgé que de 14 ans et 10 mois. Une telle précocité technique et tactique est vraiment exceptionnelle. Dobrin emmènera le FC Arges à ses deux seuls titres de champion, en 1972 et 1979. Il restera fidèle à son club de 1959 à 1983, terme de sa carrière de joueur. Une seule exception, la saison 1981-1982, où il évoluera sous les couleurs du CS Târgoviste.
« Lorsque Dieu inventa l’homme, il créa Adam et Eve. Lorsqu’ensuite il inventa le football, il créa Nicolae Dobrin ». Dicton populaire.
Ses débuts en sélection eurent lieu en juin 1966, alors qu’il n’a pas encore 19 ans, face à la RFA. Par la suite, il contribuera grandement à la qualification de la Roumanie pour la Coupe du Monde 1970 au Mexique, première participation à une phase finale de coupe du monde depuis 1938, la seule de l’ère communiste. Au Mundial 1970, il aurait dû former une paire offensive de premier plan avec Florea Dumitrache, l’un des plus grands buteurs roumains de l’histoire. Mais Dobrin ne jouera aucune minute dans la compétition, en conflit avec les dirigeants de la fédé et en particulier avec le sélectionneur Angelo Niculescu qui, piqué dans son orgueil pour une embrouille à la con, le mit à l’écart. Placée dans le groupe de la mort, la Roumanie n’avait pas besoin de cette absence et n’a logiquement pas franchi le premier tour (défaites 0-1 contre l’Angleterre, 2-3 contre le Brésil contre une victoire 1-0 face à la Tchécoslovaquie).
Dobrin sera également quart de finaliste de l’Euro 1972, éliminé par la rivale Hongrie à l’issue de 3 rencontres d’anthologie, dont un match d’appui fantastique perdu à la 89ème minute.
Un transfert avorté
Un des moments clés de la carrière de Nicolae Dobrin est son transfert avorté au Real Madrid. Nous sommes en 1972. Le FC Arges vient de remporter son premier titre et joue donc à l’automne la prestigieuse Coupe des Champions.
Le tirage au sort leur offre un gros morceau: le légendaire Real Madrid (c’était pas des fiottes à l’époque). Arges l’emporte 2-1 à domicile, avec une superbe prestation de Dobrin, buteur d’un soir et surtout organisateur de jeu génial. Le retour à Madrid se solde par une défaite 1-3 mais là encore, Dobrin impressionne ses adversaires. Le Real Madrid tient absolument à le recruter. A 25 ans, le joueur est au sommet de son art.
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Le président du Real Madrid, le mythique Santiago Bernabeu en personne, se rend à Bucarest afin de proposer 2 millions de dollars ainsi que des aménagements pour le stade de Pitesti. Le club donne son accord mais la décision finale doit être prise par Nicolae Ceaucescu, qui voit généralement d’un mauvais oeil la fuite des talents vers l’ouest. Bien évidemment, il refuse. Bernabeu augmente encore ses offres. Jusqu’à 4 millions de dollars, une somme colossale pour l’époque. Mais le Conducator reste inflexible, ne voulant pas créer un précédent, ni un appel d’air pour les départs à l’étranger des footballeurs roumains. Ceaucescu n’avait pas besoin de ce fric et surtout toutes les professions qui pouvaient contribuer à la gloire et à la fierté de la nation roumaine, que ce soient sportifs de haut niveau, artistes ou encore médecins, devaient absolument rester au pays. Bernabeu aurait déclaré à Ceaucescu: « Jamais une telle somme n’a été offerte pour un joueur. Si vous la refusez, ca veut dire que vous êtes complètement fou ».
Dobrin ne joua jamais à l’étranger, bien que le Real soit revenu à la charge quelques années plus tard. Ce non-départ resta un de ses plus grands regrets.
La gueule du grand champion
L’épilogue de la saison 1978/1979, qui voit le FC Arges remporter son 2ème et dernier titre, est un moment d’anthologie du football qui contribue à la légende de Dobrin. Le Dinamo Bucarest et le FC Arges sont à la lutte et se rencontrent à Bucarest. A la 90ème minute, les deux équipes sont à égalité 3-3, le FC Arges est virtuellement champion. Le ballon sort, tout le monde croit que l’arbitre siffle la fin du match. Mais en fait, non. Dobrin va le voir, et lui dit: « Si tu ne siffles pas maintenant, je marque encore un but ». Chose promise, chose due; dans la minute qui suit, Dobrin offre la victoire à son équipe.
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Printul din Trivale (« Le prince de Trivale ») arrêtera sa carrière de joueur lors de la saison 1982/1983, où il était devenu entraîneur/joueur puis entraîneur à temps plein. Sa carrière se terminera sur 408 matches en 1ère division (111 buts), 25 matches de Coupe d’Europe (8 buts) et 48 sélections (6 buts) auxquels sont venues s’ajouter de nombreuses distinctions (dont 3 fois joueur de l’année en 1966, 1967, 1971).
Il démissionnera de son poste d’entraîneur en 1985, partira un an entraîner le FC Botosani puis reviendra au bercail pour y monter une école de football (qui a vu passé Adrian Mutu, entre autres). Il fera ensuite un intermède de quelques semaines pour sauver le CS Târgoviste de la relégation. Dès lors, directeur technique à vie du FC Arges, il se forgera une réputation de sauveur et reprendra les rênes de l’équipe fanion pour quelques matches lors des fins de saisons difficiles. Toujours avec succès. Il intégrera également durant une courte période le staff de l’équipe nationale, s’occupant de l’équipe B au début des années 90. Le stade de Pitesti deviendra le « Nicolae Dobrin Stadion » en 2003.
Nicolae Dobrin, prince du football, nous a quitté le 26 octobre 2007 à Pitesti des suites d’un cancer du poumon. L’annonce de son décès fut un véritable choc pour le football roumain mais toucha également la Roumanie toute entière. Des milliers de personnes ont assisté à ses funérailles.
« Lorsque Dieu inventa l’homme, il créa Adam et Eve. Lorsqu’ensuite il inventa le football, il créa Nicolae Dobrin ». Dicton populaire.
Jean-Niculae Surdu-Mutu (Tuicacadémie)
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Dobrin a fost un zeu !