Un simple regard sur la liste des buteurs du championnat monténégrin vous mettra la puce à l’oreille. Kohei Kato, Masato Fukui, Takuo Ikeda, Toyoshima Yusaku, Ryota Noma, voici les noms de quelques joueurs japonais qui ont marqué cette saison au Monténégro. Alors que font ces Japonais dans un championnat si obscur ? On a creusé pour en savoir plus.

Le Japon produit chaque année environ 10 000 joueurs qui proviennent des lycées et universités. Sur ces 10 000, uniquement 500 peuvent évoluer au Japon.

Ce n’est pas un concours de circonstances qui a amené ces joueurs au Monténégro. Milutin Vukovic, spécialiste du football monténégrin, nous explique comment tout a débuté : « L’affaire a été montée par une seule personne: le coach et agent Pedja Stevovic est l’homme à qui on doit tout cela, celui-ci vivant au Japon depuis longtemps. Il a proposé le Monténégro à une agence qui envoie des joueurs japonais en Europe. » Tout a débuté à l’hiver 2013 avec une poignée de joueurs japonais et depuis tous les six mois, d’autres compatriotes viennent tenter leur chance au Monténégro.

Stevovic, qui travaille actuellement dans l’académie d’un club japonais, expliquait le dilemme subi par les joueurs japonais pour Soccerly.com : « C’est un challenge pour eux. Le Japon produit chaque année environ 10 000 joueurs qui proviennent des lycées et universités. Sur ces 10 000, uniquement 500 peuvent évoluer au Japon, que ce soit en J-League ou dans une division inférieure. Pour les autres, la destination est généralement l’Europe. J’ai proposé le Monténégro, les Japonais y ont réfléchi pendant un an et demi avant d’accepter. Mais le Monténégro a été proposé comme une destination qui doit servir de tremplin vers un meilleur championnat européen, pas comme un pays dans lequel les joueurs japonais vont faire fortune. Cela a convenu aux joueurs japonais. »

C’était la première fois qu’on voyait des joueurs asiatiques sur nos pelouses.

L’arrivée de nombreux joueurs japonais a malgré tout été une surprise pour les Monténégrins, comme le confirme Milutin : « Quand ils sont arrivés, c’était comme une vraie « colonie », tout le monde fut surpris que des Japonais viennent jouer dans notre championnat. C’était la première fois qu’on voyait des joueurs asiatiques sur nos pelouses. Dans un premier temps, ils se sont entraînés avec certaines équipes et puis quelques-uns ont signé des contrats. »

Venus avec un bon état d’esprit, les Japonais ont vite été adoptés par le public et le monde du football monténégrin : « Les réactions furent positives des deux côtés. Les Japonais sont sympas, agréables, très aimables et concentrés sur le jeu, donc il n’y avait aucune raison pour que les médias monténégrins écrivent des choses négatives les concernant. Les fans les ont aussi acceptés pour les mêmes raisons. Et le fait est qu’ils ne sont pas venus ici juste pour prendre de l’argent ou fuir la pauvreté comme certains joueurs africains. Ils sont en quête d’aventure et le Monténégro est une étape importante dans leur carrière. » Il faut également souligner que les joueurs japonais viennent à leur frais et payent tout de leur poche tant qu’ils ne signent pas de contrat avec un club monténégrin.

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Milutin ajoute que les joueurs japonais ne sont pas seulement des faire-valoir pour les joueurs du cru : « Franchement, certains sont bons. Masato Fukui joue chez le champion Sutjeska, il a gagné 2 titres avec eux et demeure l’un des meilleurs joueurs de l’équipe. Il y a aussi Kato, qui joue à Rudar et effectue une belle saison pour l’instant. Cependant le meilleur Japonais qui a joué au Monténégro est Taku Ishihiara qui jouait à Mladost Podgorica. Après quelques bons matchs dans les phases préliminaires d’Europa League, il a été recruté par Greuter Furth. En fait, on a plein de bons joueurs japonais dans nos championnats, du poste de gardien à celui d’attaquant. » Aujourd’hui, il y aurait une vingtaine de joueurs japonais dans les trois divisions du football monténégrin. La cote du Monténégro a augmenté auprès des joueurs japonais après les belles expériences vécues par les pionniers. La petite entreprise de Stevovic se permet ainsi d’être aujourd’hui plus exigeante dans ses critères de sélection pour les joueurs voulant tenter l’aventure.

Ishihara, l'exemple à suivre. Aujourd'hui en Allemagne.
Ishihara, l’exemple à suivre. Aujourd’hui en Allemagne.

Pour le championnat monténégrin, la venue des joueurs japonais est donc très positive : « Notre championnat n’est pas très fort et ces joueurs étrangers peuvent amener de la qualité. Les Japonais sont les seuls étrangers à l’heure actuelle, dans le passé nous avons eu des Brésiliens, des Camerounais, des Argentins… C’est sympa de voir d’autres cultures et styles de football s’exprimer sur nos terrains. »

Pour Milutin, la venue des Japonais n’est que la continuité d’une relation vieille de deux décennies entre le Japon et le Monténégro au niveau du football : « Je pense que les Japonais connaissaient déjà le Monténégro et ses joueurs avant cette arrivée de joueurs dans notre championnat. Des joueurs et entraîneurs monténégrins ont travaillé au Japon donc des liens se sont créés entre les deux pays. »

Et l’histoire ne devrait pas s’arrêter de si tôt : « En janvier dernier, il y avait 16 joueurs japonais. Certains ont réussi leurs essais et sont encore là aujourd’hui. Je pense qu’ils apprécient notre championnat et je suis certain que d’autres Japonais vont suivre dans le futur pour jouer au Monténégro. »

 

Tristan Trasca

Thanks to Milutin !

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