Originaire de Géorgie, aux États-Unis, Joseph Efford a pas mal bourlingué avant de se faire un nom en Grèce, en deuxième division. Un itinéraire peu commun, qui l’a mené en Roumanie et en Espagne avant de devenir, à 23 ans, l’une des attractions du marché estival dans le paysage grec.

Entre Dacula, petite bourgade de Géorgie garnie d’un peu plus de 6 000 habitants et Héraklion, fourmillante en pleine saison, il y aurait presque un monde d’écart. Pourtant, c’est là, dans ce cadre idyllique offert par la Crète, que Joseph Efford s’est fait un nom. Au prix de nombreux efforts, et d’un certain sens de la détermination.

Le point de départ, lui, est à situer de l’autre côté de l’Atlantique. « Je jouais au foot par plaisir. Mon oncle et mon cousin m’ont initié, et j’ai commencé le foot à cause d’eux, à six ans à peu près. Après, j’ai aimé, et je suis devenu très bon », retrace Joseph Efford. La suite se déroulera au sein de la Dacula High School, dans le système scolaire américain. « Ce n’est pas vraiment une école pour le foot, mais plutôt un club, avec des académies par sport. C’est différent par rapport à l’Europe, mais les équipes de jeunes sont bonnes. Ce n’est pas comme les centres de formation, parce qu’on doit payer pour jouer », poursuit-il.

Encore adolescent, le jeune Joseph voit déjà loin. Très loin, même. « A l’âge de 12 ou 13 ans, j’ai commencé à rêver d’une carrière, et notamment au fait de venir en Europe », pointe-t-il, conscient qu’il lui faudrait, un jour, prendre la décision de rallier le Vieux Continent. Ce qui arrivera quelques années après, au moment où il doit trancher entre sa scolarité (dans un pays où cette thématique occupe une place très importante) et ses rêves. « Au dernier moment, j’ai refusé l’offre de scolarité pour aller en Europe jouer au football. C’était vraiment une décision difficile pour moi et ma famille à l’époque. On en a beaucoup parlé, parce qu’ils savaient à quel point l’éducation est importante aux États-Unis, sourit Efford. La décision était difficile, mais j’ai toujours su que c’était ce que je voulais faire, et que je n’aurais qu’une chance pour y parvenir. »

Préparation en Roumanie et problème de visa en Espagne

La première étape du périple le mènera dans un cadre bien différent : celui du football roumain, où son agent de l’époque lui dégote des essais. À peine majeur, Efford doit aussi gérer sa nouvelle vie européenne, qui lui réserve une première déception. « Au début, c’était dur de vivre loin de ma famille aussi jeune. Je devais m’adapter au langage, et il y a certaines nuits qui ont été très dures. Ce n’était pas aussi professionnel qu’aux États-Unis, mais je cherchais un endroit où démarrer ma carrière, évoque l’intéressé. J’étais à Botosani, et j’ai fait la pré-saison avec eux. Des choses se sont passées, et j’ai décidé de partir. »

Loin d’être résigné, Efford ne lâche pas et met le cap, cette fois, sur un cadre un peu plus chaleureux : celui de Majorque. « C’est un club très professionnel. C’était un grand saut par rapport à la Roumanie, et sur tous les aspects », se rappelle-t-il. Mais, là encore, son destin sera freiné, malgré la signature de son premier contrat. « Après avoir signé mon contrat, on était en train de faire les papiers pour que je puisse jouer, et ils ont mis ça en pause pendant quelques heures. Ensuite, j’ai dû attendre sept mois pour jouer mon premier match ! Sachant que c’était mon premier contrat, c’était très dur. J’ai quitté l’Amérique pour jouer en Europe, donc c’était vraiment compliqué de ne faire que s’entraîner pendant tout ce temps, et de ne pas être inclus dans les rencontres. J’ai une relation puissante avec Dieu, je suis chrétien. C’est ce qui me pousse à aller plus loin, à garder mon regard sur où il me fait aller. Et ça m’a beaucoup aidé durant toutes mes expériences, notamment quand les choses ont été difficiles. », explique Efford.

Après la Roumanie et l’Espagne, c’est finalement en Grèce qu’Efford a décollé © Intime

Révélation et confirmation en Grèce

Alors, après une apparition avec Majorque et un essai infructueux en Irlande, l’ailier américain décide de tenter sa chance en Grèce à l’été 2017, puisque le club d’Ergotelis lui propose un essai. Reparti de zéro, Efford sait que ses efforts finiront par payer un jour. « Je savais que si je pouvais avoir un contrat et jouer, peu importe où, je pourrais aller de l’avant », glisse-t-il. Son choix de la Grèce, dans un club qui a connu la première division locale, s’avérera payant. « On a un très bon environnement, surtout sur l’île de Crète. Tu es près de la mer, les terrains sont bons, donc c’était un endroit parfait pour commencer », embraye Efford.

Sur le terrain, il tâtonne un peu, prend ses marques, et réalise une première saison (le cru 2017-2018) encourageante, avec 7 buts en championnat et un autre en coupe. « En ce qui concerne le football, ça a été un peu dur de s’adapter au niveau, que ce soit tactiquement ou techniquement. En Amérique, c’est plus physique, en misant sur la puissance, la vitesse. Il m’a fallu du temps pour m’y faire, analyse-t-il. Après cette première saison, j’ai commencé à bien me sentir. Les gens ont commencé à me voir différemment. »

En dehors du pré, Efford peut compter sur l’appui de son coéquipier James Stamopoulos, natif de Toronto et bi-national. « Il m’a aidé tout au long de ma première saison. Il parlait anglais couramment, et ça m’a été d’une grande aide, notamment pour la traduction », pointe son compatriote américain. Qui entame une véritable montée en puissance, qui se manifestera lors de la saison suivante, achevée à une frustrante quatrième place, à quelques encablures des barrages de promotion, et avec un quart de finale de coupe perdu face à l’Asteras, club de Superleague, après avoir éliminé l’OFI Crète et surtout battu l’Aris en phase de poules. « C’était très dur, parce qu’on était très près de la promotion et des play-offs. À la fin, on était tous déçus. Mais j’étais content de ma saison sur un plan personnel. La coupe, c’était une très bonne expérience, et je pense que ça m’a aidé à me faire un nom et une réputation, explique l’ailier de 23 ans.

Efford a réussi à se faire un nom avec la tunique d’Ergotelis © Intime

Personnellement, sa saison se passe encore mieux que la première, avec 13 buts toutes compétitions confondues. Comme un pari réussi, en somme. « Le club a fait ce que je demandais au début en arrivant : me donner du temps de jeu et me faire progresser avant d’aller au niveau supérieur », explique-t-il. Et le niveau supérieur, justement, Joseph Efford a bien failli le rejoindre à l’été 2018, après deux saisons intéressantes avec Ergotelis. Mais il n’en sera rien. « J’avais des offres, mais ce n’était pas ma décision de rester. Certaines offres étaient bonnes pour le club, mais pas pour moi, et d’autres l’étaient pour moi, mais pas pour le club. On a dû arriver à un accord : rester une saison de plus », souffle-t-il.

2020, l’heure du grand saut

Le voilà donc reparti pour une troisième saison au deuxième échelon du football grec, dans cette Superleague 2 très hétérogène, où les clubs relégués de première division croisent le fer avec des clubs en faillite. « Le niveau est bon. Ce n’est pas le plus haut, c’est sûr, mais pas le plus bas non plus. C’était le bon endroit pour commencer, mais je pense que je suis prêt pour le niveau supérieur maintenant », estime d’ailleurs Efford. Qui ne sera pas trop perturbé par ce transfert avorté.

Car avant que le Covid-19 ne frappe et ne gèle tout, le natif de Dacula, resté en Grèce avec sa femme pendant le confinement face à la situation inquiétante aux USA, tournait à plein régime, et sans doute à son meilleur niveau : 11 buts en 19 journées de championnat, rien que ça. « La saison actuelle était ma meilleure jusqu’ici. Je me sens très bien, et je sens que je progresse continuellement. Ce qui a le plus changé, c’est ma mentalité. Notamment le fait de faire attention aux petits détails », juge celui qui, au bout de deux ans et demi, est devenu le deuxième meilleur buteur de l’histoire du club en compétition officielle avec 31 buts.

Après trois saisons, le temps d’aller voir ailleurs est venu pour Efford © Intime


Alors, avec une fin de contrat au terme de ce mois de juin, Joseph Efford est prêt pour le grand saut. En Grèce, ou à l’étranger. « Le futur est plutôt prometteur. J’ai parlé avec mon agent, et il est en contact avec plusieurs clubs. Certains ont déjà soumis des offres, et on est en train de négocier le volet financier. Maintenant, on attend de voir si quelque chose d’autre peut venir, évoque celui qui a, selon la presse grecque, suscité de l’intérêt dans plusieurs pays. À la fin de ces trois saisons, je suis vraiment satisfait de mon évolution. J’ai beaucoup appris, j’ai beaucoup progressé dans mon esprit et ma manière de jouer, notamment grâce aux entraîneurs de l’Ergotelis. » Car le moment de tirer profit de ces sacrifices et ce parcours plutôt atypique est sans doute venu.

Martial Debeaux

Image à la Une : Intime

1 Comment

  1. Anonyme 6 août 2020 at 6 h 52 min

    Hello,
    Quand j’imagine qu’un jeune de mon âge est devenu l’une des attractions du marché estival dans le paysage grec, je me dis que je n’ai pas fait grand-chose dans la vie ! 😀 Tout de même, j’ai suivi un peu l’évolution de Joseph Efford et j’ai également lu des articles le concernant, et je trouve qu’il le mérite.

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