Temps de lecture 5 minutesCoupe du Monde 2018 – Serbie vs. Costa Rica : « Džon Ruiz », tico à la relance à Zvezda

Elle est là : la Coupe du Monde 2018. La vôtre … et la nôtre. Pour fêter cette compétition, chez nous, dans nos contrées russes, notre rédaction a décidé de faire les choses comme il faut en vous offrant différentes séries d’articles. Il est temps de passer à l’heure russe ! 

Ancien chouchou du Deportivo Saprissa, couvé durant 4 ans entre le nord de la France et la Belgique John Jairo Ruiz a trouvé en Europe de l’Est de quoi relancer sa carrière histoire de glaner de rares trophées sans jamais vraiment réussir à s’imposer, avant de s’occuper de son porte monnaie en Arabie Saoudite. Portrait d’un joueur toujours sur la tangente.

Là où partent les bateaux et s’envolent les rêves

John Ruiz est un boxeur américain né le 4 janvier 1972 à Methuen, dans l’État du Massachusetts aux États-Unis. Il devient champion du monde poids lourds WBA le 3 mars 2001 en battant… Ah non, satané Wikipedia. On ne parle pas ici de boxeur mais bien de John Jairo Ruiz. Donc, John Jairo Ruiz, le footballeur, est né lui le 10 janvier 1994 à Puntarenas, capitale de la province du même nom et plus grand port du Costa Rica. Là où viennent se charger les bateaux qui diffuseront le café costaricain aux quatre coins du monde. Là où partent les ferrys en direction de la Ilsa Tortuga ou Montezuma, une curieuse réserve de hippies à ciel ouvert. Puntarenas est une ville relativement prospère, mais dans laquelle la famille Ruiz se trouve particulièrement modeste, surtout quand les parents divorcent et que John reste seul avec sa mère et ses deux grands frères. Un départ qui le noie de tristesse, à tel point que sa mère décide de déménager à La Uruca, à proximité de la capitale San José pour lui changer les idées. La capitale où il rentre rapidement dans un des deux grands clubs du pays à savoir le Deportivo Saprissa, qui deviendra sa seconde maison.

© Alexander Otárola | aldia.cr

Talent précoce, il brûle les étapes et fait ses débuts en équipe première à seulement 17 ans, marque un but et profite de la blessure de l’attaquant titulaire pour se faire une place dans le 11 morado. Des performances qui lui ouvrent les portes des sélections nationales de jeune, où il dispute notamment la Coupe du monde des moins de 20 ans, en inscrivant 3 buts. Des performances qui attirent également l’oeil de clubs plus huppés, et notamment de plusieurs clubs européens comme le Barça, qu’il repousse, considérant être trop jeune.

C’est finalement le club de Lille, champion l’année précédente et tout juste troisième du championnat de France, qui vient frapper à la porte du jeune John Ruiz et de sa famille, toujours à ses côtés pour ses choix de carrière. La décision est finalement prise et le jeune ailier gauche s’envole pour l’Europe tandis que le LOSC débourse 1,2 million d’euros.

© losc.fr

Avec à peine une dizaine de matchs professionnels dans les jambes, il n’est bien entendu pas encore question d’en faire un titulaire dans le club nordiste qui met alors de longues années à digérer son titre et le déménagement au nouveau stade Pierre Mauroy. Dimitri Payet, Tulio de Melo, Gianni Bruno, Nolan Roux sont alors dans l’attaque des Dogues. John Jairo Ruiz tente d’apprendre à leur côté, bien qu’il joue plus souvent dans l’équipe réserve. Pour lui faire passer un petit cap, le LOSC fait ensuite jouer ses contacts locaux et c’est d’abord à Mouscron,de l’autre côté de la frontière, qu’il réalise sa première vraie saison en marquant la bagatelle de 14 buts en 24 matchs, de quoi lui offrir ses premières minutes en tant qu’international costaricain. De retour au domaine de Luchin, Ruiz aspire, logiquement, à un peu plus de temps de jeu, mais un nouveau changement dans ses plans a lieu avec le départ de Rudi Garcia et l’arrivée de René Girard. En conséquence, il passe une nouvelle saison avec la réserve, marquant lors des rares occasions qui lui sont données. Dans un club qui s’enfonce peu à peu dans la crise, le tico devenu un peu plus vieux dispute une nouvelle saison complète en Belgique, en prêt à Ostende (30 matchs, 6 buts).

Sa vie à l’Est

La carrière à l’est de John Jairo Ruiz commence alors à l’aube de la saison 2015-2016, quand il est envoyé pour un nouveau prêt, le troisième en cinq ans, au Dnipro Dniepropetrovsk. Preuve que son talent ne s’est pas perdu en route, le club ukrainien est alors à l’apogée de son histoire et vient de disputer la finale de la Ligue Europa, défait 3 buts à 2 par le FC Séville. Dans cette équipe de stars, il est donc peu évident de se faire une place, et pourtant il se bat et dispute 14 matchs, inscrivant six nouveaux buts. Non conservé par le Dnipro au final et arrivant au bout de son contrat avec Lille, le choix du joueur de poche costaricain se porte finalement sur l’Etoile Rouge. Un choix qui l’éloigne peut être des plus gros championnats mais un choix loin d’être par défaut.

Le plus important pour moi était, en choisissant le club dans lequel j’allais poursuivre ma carrière, que Zvezda a de grandes ambitions, veut jouer la Ligue des Champions, et cela était crucial pour moi. Je pense que je peux aider l’équipe pour cela. Tous les autres clubs m’ont parlé d’argent, alors que seul Zvezda se concentrait sur le projet sportif et les ambitions de l’équipe. Je tiens à remercier toutes les personnes que j’ai contactées au cours de la période précédente, elles ont toutes été très gentilles avec moi et m’ont aidé à prendre la bonne décision – John Jairo Ruiz au site internet du FK Crvena Zvezda

Malheureusement, il arrive une nouvelle fois après la fête, les Crveno-Beli étant éliminés dès le troisième tour de qualification de la Ligue des Champions par Ludogorets, avant de tomber face à Sassuolo pour la qualification en Ligue Europa. Ruiz joue néanmoins une trentaine de matchs cette saison-là, inscrit six buts et fait deux passes décisives, dont une dans le derby face au Partizan. Une constance dans les performances qui lui permet même de goûter de nouveau aux joies de la sélection nationale, essentiellement pour la Coupe d’Amérique Centrale à l’automne 2017. Par ailleurs, le Costaricien s’habitue rapidement, lui et sa famille, à la douceur de vivre belgradoise.

Avant de venir à Belgrade, je savais seulement qu’il y avait un excellent et très chaud derby. En dehors du football en revanche, je ne savais pas grand chose du pays. Maintenant je peux dire que Belgrade est une très belle ville. J’adore cette ville et son histoire. J’aime l’atmosphère qu’il y a, les gens qui sont toujours sympas. Ca me rappelle le Costa Rica, des gens sympathiques et toujours prêts à aider. Après six mois à Belgrade, je ne me sentais vraiment plus comme un étranger. Seule la langue que je ne comprends pas me rappelle que je ne suis pas à la maison. – John Jairo Ruiz

© Nebojsa Parausic / Mondo.rs

Une qualité de vie que l’ailier gauche ne retrouve certainement pas en Arabie Saoudite, là où il évolue désormais. L’arrivée de Vladan Milojevic sur le banc de Zvezda met en effet un terme à sa courte aventure serbe. Le technicien serbe est dès le départ franc avec lui, il ne compte pas sur lui pour la saison. Ruiz fait alors ses bagages, pour une nouvelle destination, un peu plus à l’Est. Cette fois-ci, plus question de regarder le projet sportif, à 24 ans et après cet enchaînement de désillusions, il finit par privilégier l’aspect financier. Considéré comme un sélectionnable potentiel dans les 23 Costaricains appelés par Oscar Ramirez pour la Coupe du monde, il finira par la regarder depuis sa chambre.  « La vérité c’est que c’était une très bonne offre [venant d’Arabie Saoudite], je ne vais pas vous dire non, de toute façon les gens parlent beaucoup. Je pense que c’était une bonne décision. Au final, personne ne sait que je suis passé par l’Ukraine et la Serbie » conclut le joueur. Une histoire de rendez-vous manqués on a dit.

Antoine Gautier


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