Tout a commencé à l’été 2011, lorsque l’investisseur Radoslaw Osuch a repris Zawisza Bydgoszcz, club méconnu et sans aucun palmarès. Son achat a été facilité par le maire de Bydgoszcz, Rafał Bruski, ambitieux pour le retour en seconde division du principal club de la ville de 350.000 habitants. Comme prévu, Osuch a injecté de l’argent dans le club du nord de la Pologne et en a rapidement récolté les fruits. Alors qu’une deuxième montée consécutive fut ratée à cause d’une défaite dans le dernier match de la saison, Zawisza finit champion dès la saison suivante, validant son ticket pour l’Ekstraklasa.
Un succès bien vite éclipsé par les affaires extra-sportives
En 2013, promu au plus haut niveau pour la première fois depuis 17 ans, la saison de Zawisza Bydgoszcz avait fait l’effet d’une bombe. Avec de solides performances contre des grosses cylindrées du championnat (Legia, Slask, Wisla), les bleus et noirs ont terminé la saison dans la première moitié de championnat, assurant leur place pour les play off. Alors qualifié pour la première fois de son histoire en finale de la Coupe de Pologne contre ses amis de Zaglebie Lubin, le club de Bydgoszcz voyait ses supporters boycotter le match en raison de leurs divergences de vues avec le propriétaire Radoslaw Osuch. Ceci malgré l’appel à la trêve du coach Ryszard Tarasiewicz, qui trouva que l’idée de boycotter le match le plus important de leur histoire était critiquable.
Comble de l’absurde, les fans de Zaglebie Lubin, par solidarité, sont également restés à la maison comme ils le justifièrent avec ce communiqué : «Cette décision est très difficile pour nous mais nous n’avons pas le choix. Nous ne voulons pas participer à ce cirque co-organisé par Mr Osuch et la fédération ». Si près de la gloire, le maire Bruski a été contraint de financer le soutien au stade national, payant les tickets de matchs ainsi que 20 membres du staff chargés d’emmener en mini-bus des familles et des étudiants à la capitale. Narodowy fut finalement rempli par 37.000 spectateurs, essentiellement des personnes neutres et Zawisza Bydgoszcz remporta le premier trophée de son histoire.
A vrai dire, ce boycott spectaculaire n’était pas le premier coup d’éclat des fans de Zawisza Bydgoszcz. En Novembre 2013, lors d’un match les opposant à Jagiellonia Białystok, ils se bastonnèrent violemment avec les fans de leurs adversaires. Critiqués par Osuch pour ces faits peu reluisants, ils décidèrent de remettre ça une semaine plus tard avec leurs amis de ŁKS Łódź contre les supporters visiteurs, à savoir ceux de Widzew Łódź. L’équipe de sécurité de Osuch avait bien tenté d’empêcher les personnes sans billets de ŁKS d’entrer dans le stade, mais environ 4000 fans de Zawisza Bydgoszcz décidèrent de s’en mêler, entraînant de graves échauffourées. Avec 4 policiers blessés et des dommages collatéraux au stade, ils furent contraints de jouer leur match suivant à huit clos.
Conflits à tous les étages
Dans les semaines qui ont suivi, le club décida d’agir et remit une cinquante d’interdictions de stade aux présumés fauteurs de troubles. Les prix des billets augmentèrent en flèche pour dissuader les hooligans de revenir et les ultras décidèrent de ne plus revenir au Krzyszkowiak Stade Zdzisław. Cela aura surtout eu pour effet de diminuer les recettes de la billetterie. Seules 500 personnes étaient venues assister au quart de finale de coupe à domicile contre Górnik Zabrze, ce nombre atteignant seulement le double quelques semaines plus tard pour la demi-finale. En ce qui concerne la finale, le club a été contraint de payer le transport aux familles et aux étudiants pour ne pas se retrouver sans soutien lors de ce match historique.
En plus des ultras, Osuch a aussi trouvé le moyen de se mettre en porte à faux avec SP Zawisza, une organisation séparée qui contribue à l’entraînement des jeunes du club. Le propriétaire accusa SPZ d’être un allié des groupes ultras renégats, et de proférer des menaces envers les propres entraîneurs de jeunes du club. Il appela la mairie à les empêcher d’utiliser les installations du club, avec des conséquences désastreuses en cas de refus. A ce sujet, il décida de se confier aux journalistes après la finale de Coupe : «Nous ne sommes plus en mesure de travailler correctement dans une atmosphère d’intimidation et d’agression verbale. Nos employés ont peur pour leurs vies. C’est pourquoi nous avons demandé aux autorités de la ville d’intervenir. Si le problème ne peut être réglé, nous pouvons déménager le club dans une autre ville.»
Après cet accomplissement, le bon fonctionnement du club s’est vu perturbé par la situation. Malgré ses succès, le coach Ryszard Tarasiewicz n’a pas renouvelé son contrat et a jugé préférable de partir loin de Zawisza Bydgoszcz, les tensions ayant joué un rôle certain dans sa décision. En raison des problèmes fortement médiatisés en Pologne, le club a dû se tourner vers l’étranger cet été pour remplacer le coach et les joueurs en partance comme le confirme Osuch :
«Les étrangers hispaniques peuvent plus facilement s’adapter à Bydgoszcz car ils ne comprennent pas tout ce que les hooligans crient aux joueurs. C’est triste, mais en embauchant de nouveaux joueurs, je dois prendre ça en compte».
Une nouvelle ère, de nouveaux échecs pour Zawisza Bydgoszcz
C’est ainsi que Jorge Paixão est arrivé pour entraîner après une période infructueuse à Braga, tandis que le club a recruté un certain nombre de joueurs en provenance du Portugal, du Brésil et du Cap-Vert pour renforcer l’équipe. Cette équipe new look a remporté le deuxième trophée de l’histoire du club, la Supercoupe de Pologne contre l’ogre du Legia Varsovie. Le parcours en championnat commença moins brillamment, avec seulement 3 points remportés en 7 matchs. Pire, pour sa première participation à la Coupe d’Europe, Zawisza fut balayé dès le deuxième tour préliminaire de l’Europa League par Zulte Waregem puis dès son entrée en lice en Coupe de Pologne par Podbeskidzie Bielsko-Biała. Fin août, Paixão fut licencié alors que le club occupait une des deux places de la zone rouge. Le jeune coach Mariusz Rumak, fraîchement débarqué de Lech Poznań, améliora légèrement les performances, ce qui fut toutefois insuffisant car Zawisza Bydgoszcz compte à la trêve 8 points de retard sur le quinzième Ruch Chorzów.
Les mauvais résultats sportifs n’ont pas d’emprise sur Osuch, régulièrement menacé personnellement. Le vandalisme de la maison qu’il partage avec sa femme Anita –présidente du club- n’est pas rare. Même le maire Bruski est sous le feu des critiques avec la certitude que s’il quittait son poste, Osuch lâcherait prise sur le club, ce qui faciliterait le retour dans les tribunes des supporters. De l’autre côté, le propriétaire a aussi des partisans, rassemblés au sein de la page facebook « pour la fin de la dictature des hooligans » qui comporte 2000 likes. Cependant, avec les pauvres performances qui semblent propulser le club tout droit vers la Pierwsza Liga, il semble ne pas y avoir de remèdes aux problèmes en vue.
D’autant plus que les menaces ne se sont pas limitées à Osuch et sa famille. Une nuit, certains fans bouillants se sont introduits dans le stade afin de déposer plusieurs délicates attentions : un cercueil adressé à chaque joueur. Sur chaque tombe, les initiales des joueurs étaient inscrites. Bien entendu, le propriétaire a également eu droit à la sienne. Si les joueurs n’ont pas répondu aux provocations, ces actes n’ont pas dû les mettre en confiance. Même en ne parlant pas et ne comprenant pas le polonais, nul doute qu’ils ont bien compris le message.
Avec leur politique qui est de rester à l’écart des tribunes et de menacer à tour de bras, les fans pourront peut-être avoir raison de l’entêtement d’Osuch. Méfiance tout de même que ce dernier n’emporte pas Zawisza avec lui, loin de Bydgoszcz…
Damien Goulagovitch
via l’article original paru sur IBWM
Autres sources :
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Bonjour,
L’article ne dit pas quelles sont les reproches des hoolgans envers le propriétaire ? Qu’est ce qui a changé ?