Chaque année, en parallèle de la Première Ligue, la Fédération russe organise un championnat espoir (« Molodiojnoïe Pervenstvo ») qui regroupe les mêmes clubs que sa compétition phare. L’occasion pour les centres de formation de s’affronter et de donner du temps de jeu à leurs jeunes. Cette année, les débats ont été particulièrement relevés, avec un scénario haletant qui a vu le Lokomotiv Moscou arracher le titre à la dernière journée devant le Rubin Kazan et le CSKA Moscou. Retour sur les moments forts du championnat, avec quelques pistes de réflexion sur le football de jeune en Russie et trois pépites issues de l’équipe championne, qui auront peut-être leur mot à dire lors de la Coupe du Monde 2018 !

Dans l’ombre de la Première Ligue

Le championnat espoir, c’est d’abord une ambiance bucolique | © wikimapia.org
Le championnat espoir, c’est d’abord une ambiance bucolique | © wikimapia.org

Pour les supporters russes les plus acharnés, une journée de Première Ligue commence toujours par le même rituel : le match des espoirs. En effet, le calendrier du championnat des moins de 21 ans est entièrement calqué sur celui des seniors, ce qui fait que la veille de la rencontre principale, les jeunes s’affrontent dans le stade de replis du club qui joue à domicile. Les plus superstitieux ont échafaudé de savants calculs pour tenter de comprendre de quelle manière le résultat des espoirs influence le match des équipes premières, sans grand succès pour l’instant.

Une première mouture de ce championnat a été lancée en 2001, mais ce n’est qu’en 2008 que la compétition a pris son nom actuel et imposé une limite de trois joueurs de plus de 21 ans dans chaque onze de départ. À noter que les clubs ont rarement recours à cette possibilité, l’intérêt étant quand même de donner de l’expérience à ses jeunes pousses. À ce jeu-là, le Dinamo et le Spartak sont les plus doués, avec cinq titres chacun depuis 2001. Autant dire que pour les deux dinosaures moscovites, une médaille dans cette catégorie d’âge sert bien souvent à panser les plaies d’une saison ratée.

Le Spartak détient aussi le record de titres chez les jeunes, à égalité avec le Dinamo |© spartak.com
Le Spartak détient aussi le record de titres chez les jeunes, à égalité avec le Dinamo |© spartak.com

Passé l’enthousiasme des premières éditions, le système a quand même fini par s’attirer quelques détracteurs. Beaucoup de journalistes et certains dirigeants critiquent ce championnat en vase clos qui maintient les espoirs dans le confort de leur catégorie d’âge, un cocon rassurant où ils ne risquent pas de croiser les grognards durs au mal qui sévissent dans les échelons inférieurs du championnat russe. Au bout du compte, les jeunes russes se retrouvent désavantagés par rapport à leurs collègues européens, qui sont jetés dans le grand bain bien plus tôt, via des équipes réserves intégrées aux divisions seniors (comme en Espagne), ou via un championnat national moins relevé où les clubs donnent une place de titulaire aux jeunes pour vivre de leur future indemnité de transfert. Les Russes se sont évidemment inspirés de la Primavera italienne, sans penser que l’Italie bénéficie d’un réservoir de jeunes de toute autre envergure, malgré ses difficultés récentes.

Pour sortir leurs jeunes de leur isolement douillet, certains clubs ont crée une véritable équipe réserve qui prend part au championnat senior, avec plus ou moins de réussite. Le Spartak et le Zenit, en particulier, ont réussi à faire monter leur deuxième équipe en FNL, et même à s’y maintenir ! D’autres, comme le Lokomotiv ou le CSKA, refusent catégoriquement d’entretenir une réserve en plus de leur équipe espoir, ce qui peut aussi se comprendre dans un contexte où l’argent se fait rare.

Ne parlez plus de réserve en FNL à Evgueni Guiner, le président du CSKA | ©  sport-express.ru
Ne parlez plus de réserve en FNL à Evgueni Guiner, le président du CSKA | © sport-express.ru

Le triomphe des cheminots

On comprend mieux les bonnes places glanées par le CSKA et le Lokomotiv : le Spartak et le Zenit ont tout misé sur leur réserve en FNL, tandis que le Dinamo a fait monter beaucoup de jeunes en équipe première pour tenter de se sauver. L’exploit des cheminots ne doit cependant pas être sous-estimé, puisque l’équipe est constituée dans sa grande majorité de joueurs nés en 1997 et 1998.

La saison avait pourtant mal commencé pour le Loko, qui ne parvenait pas à s’imposer avant la 4e journée, alors que ses concurrents directs signaient des succès impressionnants. Il faut dire que parmi les favoris habituels, le Rubin se distinguait en encaissant valise sur valise, permettant aux clubs moscovites d’engranger des points.

Le premier à s’écrouler est le Dinamo qui enchaîne 4 matchs sans victoire à la fin de l’été. Un retard qu’ils ne combleront ensuite jamais, malgré une série de 8 victoires consécutives au printemps. Le Spartak, lui, a réussi à tenir jusqu’au mois d’octobre, faisant même figure de favori jusqu’à leur deux revers contre les voisins du Dinamo et du Lokomotiv.

Le Spartak laisse filer de précieux points contre le Dinamo | © spartak.com
Le Spartak laisse filer de précieux points contre le Dinamo | © spartak.com

Ces déconvenues des deux spécialistes de l’épreuve profitent au CSKA, à Rostov et au Rubin, qui se mêlent aux premières places. Le Lokomotiv passe également à la vitesse supérieure pour rattraper son retard, avec une série de onze matchs sans défaite en fin de championnat. Le club des RJD écarte d’abord le Rubin le 2 avril en s’imposant 4-1 à Perovo, son stade de la banlieue de Moscou. Puis c’est le CSKA qui se présente pour un match décisif dans la course au titre. La rencontre a très vite tourné à l’avantage du Loko grâce à l’avant-centre Artyom Galadzhan, qui a inscrit un coup du chapeau. Les cheminots ont quand même réussi à se faire peur après l’expulsion de Drobnya, en encaissant deux buts de Ferapontov et Sokolov. Score final : 3-2.

Suite à ce succès, les jeunes du Loko ont écrasé l’Amkar et le Zenit 4-1, se sont débarrassés des poisons Kuban et Rostov, avant de conclure leur fantastique saison par une victoire facile contre Saransk. Pour l’occasion, Miranchuk était redescendu en espoir afin d’aider ses anciens coéquipiers.

Chez les autres équipes, on peut relever la bonne saison de Rostov, qui suit en cela l’exemple de ses aînés. La jeunesse du Rubin s’est également bien reprise après un début de saison catastrophique, et s’est même offert le luxe de chiper la 2e place au CSKA. Les Daguestanais de l’Anji, en finissant 7e, ont également prouvé que le souhait de Kerimov de se concentrer sur la formation n’était peut-être pas que des paroles en l’air.

À Krasnodar, le Kuban parvient encore et toujours a finir devant la création de l’oligarque Galitsky, malgré les investissements réalisés par le FC Krasnodar dans la formation ces dernières années. Une suprématie locale qui ne devrait pas résister longtemps, l’équipe première du Kuban ayant été reléguée.

Anji – Rostov, les deux surprises de la saison à la lutte | © fc-anji.ru
Anji – Rostov, les deux surprises de la saison à la lutte | © fc-anji.ru

Enfin, dans le bas du tableau, l’Oural n’est pas à l’honneur, puisque Perm et Ekaterinbourg occupent les 13e et 14e place. Ufa et Samara ferment la marche, avec pour ces derniers une saison cauchemardesque qui se finit avec une différence de buts de -53 et des défaites douloureuses contre le Loko (5-0), l’Anji (7-0) et le Spartak (4-0). Si les Krylia Sovetov veulent s’imposer comme une équipe sérieuse de Première Ligue, il va falloir secouer un peu la formation.

 

Pos.ClubDiff.Pts.Pos.ClubDiff.Pts.
1Lokomotiv Moscou+37619FK Krasnodar-143
2Rubin Kazan+65810Zenit Saint-Pétersbourg+342
3CSKA Moscou+275811Terek Grozny-939
4Dinamo Moscou*+275612Mordovia Saransk*-1532
5Spartak Moscou+185113Amkar Perm-2130
6FK Rostov+65014Ural Ekaterinbourg-2824
7Anji Makhatchkala+174815Krylia Sovetov Samara-5319
8Kuban Krasnodar*+134716FK Ufa-2717

* Les relégués sont les mêmes qu’en Première Ligue : Dinamo, Kuban et Mordovia.

Trois joueurs à suivre

L’intérêt de ce genre de championnats étant bien sûr de dénicher quelques pépites avant tout le monde, on vous donne le profil de trois joueurs dans l’effectif du champion qui pourraient percer en Première Ligue dans les années à venir.

Artyom Galadzhan

Position : Avant-centre
Date de naissance : 22 mai 1998 à Novorossiisk
Pays : Russie
Taille : 180cm
Poids : 71kg

Le joueur-clef de l’attaque du Lokomotiv a déjà été inclus dans a liste des 50 meilleurs espoirs né en 1998 du célèbre quotidien britannique The Guardian. Autant dire qu’il est suivi comme le lait sur le feu par l’encadrement du Loko, qui devrait lui donner quelques apparitions en équipe première la saison prochaine. Avec 17 buts en 24 matchs chez les jeunes cette saison, il le mérite. Le site des fans du Loko « Loko.News » en a d’ailleurs fait une compil’ :

Georgy Makhatadze

Position : Milieu offensif central
Date de naissance : 26 mars 1998 à Rostov-sur-le-Don
Pays : Russie
Taille : 180cm
Poids : 69kg

Si Galadzhan est le finisseur, alors Makhatadze est sans conteste le créateur de l’équipe espoir. Il est le métronome de la circulation de balle au milieu du terrain, avec un talent certain pour trouver des ouvertures vers ses ailiers et son attaquant. Une vision du jeu que l’on aimerait bien voir à l’échelon supérieur. Le jeune international se distingue également par sa frappe de balle, qu’il n’hésite jamais à mettre à profit, même quand il se trouve au milieu du terrain. Voyez plutôt ce coup-franc improbable inscrit contre l’Afrique du Sud avec les – de 17 ans :

Ivan Galanin

Position : Milieu central
Date de naissance : 5 juin 1998 à Chernigov (Ukraine)
Pays : Russie
Taille : 173cm
Poids : 62kg

Galanin n’est ni le plus grand, ni le plus costaud des milieux de terrain, mais sans lui, ce n’est plus le même Lokomotiv. Son abattage au milieu du terrain est impressionnant pour un joueur de son âge, qui plus est pour sa première saison pleine avec les espoirs. Il est sans doute encore trop tôt pour parler d’équipe première, mais à l’avenir, les cheminots auraient peut-être intérêt à inclure ce profil atypique dans leur plan de jeu. Dans le cas contraire, on sera les premiers à envoyer une cassette aux Espagnols.

Adrien Morvan


Image à la une : © volgasib.ru

2 Comments

  1. thomas 13 juillet 2016 at 21 h 49 min

    Faut pas oublier toutes les equipes de bas de tableau qui truque leur match a chaque journée de championnat

    Reply
  2. Pingback: On a discuté avec Mohamed Konaté, avant centre Ivoirien évoluant au FK Ural Ekaterinbourg - Footballski - Le football de l'est

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