La trêve est arrivée, le football russe marque une pause et durant ce premier semestre, certains joueurs ont livré une copie spectaculaire. Il est temps de revenir sur les exploits de ces hommes, qui ont illuminé un match pour des raisons sportives, mais pas que…
Samuel Gigot : le Spartiate enflamme le derby
Spartak-CSKA, les Rouge et Blanc sont à domicile et prêts à en découdre avec leur rival : le derby s’annonce bouillant !
Si l’équipe de Kononov traverse une période en demi-teinte, avec notamment deux rencontres compliquées face au FC Thune en phase de qualification pour la Ligue Europa, elle peut compter sur des joueurs de qualité : Bakaev, Schürrle ou encore Til mais ce 19 août, ce n’est pas un élément offensif qui apporte le scalp des Koni…
Le coup d’envoi est donné à 21 heures, et le premier coup de massue ce arrive à 22h14. En effet, à la 59e minute, les Gladiateurs partent en contre-attaque, Samuel Gigot passe le ballon à Guus Til, qui le transmet à Bakaev, ce dernier remonte le terrain et décale André Schürrle sur la gauche. L’allemand centre légèrement en retrait sur la tête de… Samuel Gigot.
Le défenseur qui a orchestré le début de l’offensive, se retrouve à la conclusion, lui qui a traversé toute la pelouse du stade, n’a pas fourni ces efforts en vain : sa tête plongeante transperce les filets.

La rencontre est loin d’être finie pour les deux équipes de la capitale : trois minutes plus tard, l’ancien joueur de La Gantoise est à deux doigts d’enfoncer le clou sur corner mais cette fois Akinfeev place son pied droit entre le cuir et la ligne blanche. Peu après, les Hommes du peuple se procurent une nouvelle occasion à l’aide d’une superbe frappe de Bakaev en dehors de la surface, arrêtée à nouveau par le portier russe.
Le Spartak risque de s’en mordre les doigts, surtout que le CSKA est loin de s’avouer vaincu, et pour preuve, les visiteurs égalisent à la 67e sur une frappe en dehors de la surface, légèrement touchée par un joueurs du Spartak : Gigot.
La climatisation est installée, les supporters des Armeytsy jubilent et allument des fumigènes : grave erreur.
Le match connaît un temps d’arrêt à cause de cet événement et la dynamique positive dont pouvaient profiter les hommes de Goncharenko suite à l’égalisation est évaporée. En revanche, les hôtes se ressaisissent et refusent de laisser filer les trois points : 79e minute, corner pour le Spartak, léger cafouillage dans la surface, la balle traîne près du but, mais un homme se déchire et va la mettre dans les cages adverses. Cet homme s’appelle Samuel Gigot.
Le Français est l’auteur d’un doublé, le Français plaît aux Russes et le Français court célébrer auprès de son public, qui est en ébullition totale.
Le but est étrange, les caméras sont partiellement masquées par la fumée, mais la situation est très nette : 2-1, le Spartak Moscou mène.
Le CSKA se procure par la suite deux grosses occasions, le Spartak en a également une à la 96e, mais le score n’évolue pas et le héros du match est, sans contestation possible, Samuel Gigot.
Il a totalement enflammé l’Otkrytie Arena, quoique non, nous ne sommes plus dans un stade de football, nous sommes sur un champ de bataille, probablement sur les Thermopyles et cette fois ce sont les Spartiates qui triomphent, menés par le Léonidas d’Avignon.
Evgeni Chernov : le sens du sacrifice
Avec 4 victoires, 2 nuls et une défaite, le FK Rostov réalise un bon début de saison, mais il doit confirmer à l’extérieur face à une équipe jouant la Ligue des Champions et possédant de grosses ambitions sur le plan local cette saison : le Lokomotiv Moscou. De plus, les Moscovites possèdent le même nombre de points, la rencontre est donc, d’autant plus importante : il est l’heure de montrer laquelle des deux équipes méritent le plus de rester sur le podium.
Près de 20 000 spectateurs sont venus voir du football dans la RZD Arena, et ils vont être servis : peu avant la mi-temps, Chernov, le héros du jour, tire un corner qui se transforme en passe décisive. Shomourodov reprend parfaitement le ballon de la tête et viens le loger au fond des filets.

41e minute, 1-0, les visiteurs peuvent rentrer aux vestiaires l’esprit tranquille. En seconde mi-temps, Rostov ne se relâche pas et continue à presser les locaux : une récupération dans la surface des Jaune et Bleu et une attaque organisée par Shomourodov et Ionov : ce dernier réalise une passe contrée par Rifat Zhemaletdinov, mais s’avérant décisive pour l’attaquant ouzbek, qui reprend et place le ballon entre les jambes de Guilherme.
Les joueurs du Lokomotiv, au départ sonnés, reprennent rapidement du poil de la bête et semblent déterminer à décrocher au moins le nul, c’est ainsi qu’à la 81e minute, Anton Miranchuk marque sur une passe de Joao Mario, l’ancien joueur de l’Inter réalisant sa première action décisive dans son nouveau club.
Gonflés à bloc, les locaux poussent et inondent les Caucasiens de plusieurs vagues offensives, mais ces derniers résistent et obtiennent même des contre-attaques à la 86e et à la 90e qui sont mal exploitées.
90e minute, relance étrange du portier de Moscou. Ce dernier envoie un ballon sur Howedes, qui voit le cuir rebondir sur sa jambe et arriver dans les pieds de Shomourodov : seul face au gardien, il a l’occasion de clôturer le match et de signer un triplé, mais son lob passe juste à côté des cages, ils risquent de le payer.
Une minute après ces séquences très chaudes aux abords de la surface du Lokomotiv, les joueurs de Yuri Semin repartent à l’attaque et obtiennent l’occasion du match, mais ils font face à l’une des interventions défensives les plus hallucinantes qui existent : Fedor Smolov devance le gardien de Rostov et place une tête dans le but vide…qui ne rentre pas !
Evgeni Chernov arrive à repousser le cuir à l’aide de sa jambe droite et se retrouve à terre. Mais la sphère revient dans les pieds de Luka Dordevic ; le numéro 22, à deux mètres d’un but quasiment vide n’a plus qu’à « pousser » le ballon, mais Chernov, contrairement à ce que la situation laisse présager, n’a pas dit son dernier mot ; après avoir réalisé un premier sauvetage, il pousse sur ses appuis, arrive à se projeter en arrière et à repousser la frappe du Monténégrin par on ne sait quel miracle !
Le score n’évolue pas après cette séquence dantesque, Rostov s’impose deux buts à un, se retrouve à la première place du championnat et Evgeni Chernov devient l’homme du match avec sa passe décisive et son double arrêt.
Zelimkhan Bakaev : l’Ingouche à la vision d’aigle
14 octobre 2019, Domenico Tedesco prend le poste d’entraîneur au Spartak Moscou et a pour mission de redresser le club moscovite, qui vient de subir 5 défaites d’affilées sous les ordres d’Oleg Kononov.
L’Italien obtient son premier point face au Rubin Kazan cinq jours plus tard, mais le plus dur arrive : Un derby face au Lokomotiv, qui est sur une série de 5 victoires, un bilan totalement à l’opposé.
Le natif de Rossano arrive donc à la RZD Arena avec une composition légèrement remaniée, dont le principal changement réside dans le positionnement de Zelimkhan Bakaev.
L’ailier droit se retrouve milieu offensif, et même si cette position ne lui est pas totalement inconnue (il a pas mal joué dans l’axe durant son prêt à l’Arsenal Tula), bon nombre de questions se posent à la vue de ce placement : n’est-il pas trop solitaire pour jouer dans un rôle qui demande une grande qualité de passe ? Va-t-il se ré-habituer d’un claquement de doigt ?

L’ancien Canonnier va répondre en deuxième mi-temps, et sur le terrain :
56e minute, le Spartak part en contre-attaque, Ezequiel Ponce donne le ballon à Bakaev, ce dernier patiente légèrement et remet dans un tempo absolument parfait la balle à l’ex-Lillois, qui profite d’une sortie peu académique de Guilherme, pour lober le gardien russe et ouvrir le score, 1-0 pour les visiteurs.
Vingt-deux minutes plus tard, Roman Zobnin est lancé par l’argentin auteur du premier but, continue sa course côté gauche, lève la tête et voit l’appel du numéro 10. Le milieu de terrain délivre alors une passe assez moyenne à deux doigts de sortir, mais Zelimkhan se déchire pour récupérer la balle et la glisser à Jordan Larsson, qui passe devant Corluka et place le ballon entre le poteau et la main du portier du Lokomotiv. 2-0, le sort des Rouge et Vert commence à être scellé, et leur déroute n’est pas terminée.
La pitié semble être une notion qui échappe à Bakaev : deux minutes plus tard, il accélère sur le côté droit, rentre légèrement dans l’axe et place un ballon quasi-parfait à l’attaquant suédois qui contrôle puis envoi une frappe croisée du pied gauche. La balle tape le poteau puis rentre dans les cages, ne laissant aucune chance au numéro 1 du Loko.
Le score est de 3-0, le fils d’Henrik Larsson signe un doublé, et Zelimkhan Bakaev réalise 3 passes décisives.
Si les visiteurs étaient venus avec de nombreux doutes dans le stade du Lokomotiv, ils repartent avec le plein de confiance, pouvant espérer démarrer une nouvelle dynamique tout en n’oubliant pas de remercier leur milieu né à Nazran, lui qui a distribué toutes les offrandes du match.
Dzyuba-Karpin : des retrouvailles savoureuses
Il ne s’agit pas de parler d’une simple rencontre entre deux clubs avec un joueur qui a brillé, mais plutôt d’évoquer deux personnalités du football qui ne se supportent pas : Valeri Karpin et Artem Dzyuba.
L’ancien entraîneur du Spartak Moscou a eu le géant russe sous ses services, mais il ne l’a jamais réellement apprécié, estimant qu’il n’en avait pas besoin. Il était donc peu utilisé chez les Rouge et Blanc et avait même été envoyé en prêt au FK Rostov, où Dzyuba a montré de belles performances.
Le 1er juillet 2015, l’attaquant signe au Zenit, club ennemi du Spartak, et beaucoup de supporters moscovites voient ce transfert comme une trahison, mais pour Dzyuba il s’agit plutôt d’une libération après avoir été sous les ordres de Karpin et d’Emery, deux coachs qu’il n’apprécie pas et qu’il n’a pas hésité à critiquer en public.
Dzyuba a en effet très mal vécu cette période , estimant que Karpin voulait « saboter » sa carrière et ne peut s’empêcher de lancer quelques piques envers son ancien entraîneur. Une véritable tension existe entre les deux hommes et les gens savent qu’il ne vaut mieux pas qu’ils se croisent dans un couloir.
Mais le 19 décembre 2017, Karpin prend la tête du FK Rostov, après avoir notamment été au Torpedo Moscou et au RCD Majorque.

Au fil des mois, l’ancien joueur du Celta Vigo construit une équipe solide, rivalisant avec les gros clubs de Moscou et le Zenit. 19 octobre 2019 : Rostov (2e) affronte le Zenit Saint-Pétersbourg (4e), plus de 58 000 personnes sont venues voir ce qui semble, d’un point de vue innocent un match équilibré.
En réalité, les gens sont venus voir un combat au sommet : Karpine face à Dzyuba, un ancien grand joueur de la sélection russe face au nouveau capitaine de la Sbornaya.
L’homme que Dzyuba considère comme coupable de l’avoir fait stagner se trouve sur le banc adverse. Alors certes, entre 2017 et ce mois d’octobre, il y a eu quelques rencontres entre les deux clubs, mais soit Dzyuba n’était pas dans l’effectif des Zénitiens, soit la rencontre n’avait pas la même saveur. En tout cas, pas celle de deux géants qui s’affrontent.
Mettons tout de suite fin au suspens : la Gazprom Arena se transforme en abattoir avec Artem Dzyuba dans le rôle du boucher. Le résultat est sans appel, les locaux écrase le FK Rostov 6-1.
Celui que les Russes surnomment Dzyubinho sur un ton de moins en moins ironique,réalise un triplé et délivre deux passes décisives face à son ancienne équipe. Durant cette boucherie, il donne l’impression d’écraser les défenseurs adverses, ces derniers incapables de rivaliser avec le colosse. A aucun moment de la rencontre, les visiteurs n’ont la moindre occasion de renverser la tendance, le score affichant deux à zéro au bout de seulement vingt minutes de jeu.
Il est logiquement le grand artisan de cette victoire et permet à son équipe de récupérer la deuxième place qu’occupait le club du Caucase. Après le match, le numéro 22 du Zenit est très détendu, répond aux différentes questions en sortant quelques blagues et n’évoque pas le « thème Karpin » , comme si sa soif de vengeance fut assouvie, du moins pour l’instant…
En supplément
Si ces performances sont légèrement moins impressionnantes par leurs scénarios ou par leurs importances, elles méritent tout de même d’être citées:
- Khoren Bayramyan (FK Rostov) : Deux buts et une passe décisive dans la victoire face au CSKA Moscou (3-1).
- Aleksandr Sobolev (Krylya Sovetov) : Doublé face au CSKA Moscou qui permet à son équipe de remporter le match sur le score de 2-0.
- Ivan Ignatiev (FK Krasnodar) : Lors de la victoire 3-0 face à Sotchi, il inscrit les deux premiers buts.
- Georgi Melkadze (FC Tambov) : Marque les deux buts de son équipe face à Rostov et offre la victoire sur un score de 2-1.
Kondrateï Filatoff
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