L’Europe du foot se mobilise contre l’Est et gueule scandalisée après les événements dégueulasses intervenus en tribunes lors de Dynamo vs. Chelsea, à savoir le passage à tabac de personnes noires dans la tribune ultras du Dynamo Kiev, et la remise d’un dossier par le centre SOVA et le réseau FARE sur les actes racistes dans le football russe. Mais les responsables au pays de Dostoïevski considèrent « qu’il ne faut pas créer un problème à partir de rien » quand l’Ukraine du foot, elle, crie au complot. Oui, oui, au complot.


Voir aussi : Ultras Dynamo Kiev, un mode de vie – Partie I


Si l’on reste sur ce dernier cas, comment un même événement peut conduire à deux visions si diamétralement opposées ?

Une histoire de normes qui n’a malheureusement plus grand-chose à voir avec le foot…

Qui de mieux placer pour nous expliquer la position des instances du football ukrainien que le vice-président de la FFU (Fédération de Football Ukrainienne), Ihor Kotchetov ?

« Avant tout, il faut dire, qu’il est trop tôt pour parler de racisme. Leur présence dans ce secteur où se trouve toujours le groupe Ultra « Roditchi » était une surprise pour tous. Des personnes de ce type ne s’y étaient jamais rendues. Des informations de première main nous disent qu’ils n’avaient pas de billets et qu’ils avaient en main des fumigènes. Peut être bien que tout ça était une provocation planifiée. » expliquait-il à zn.ua

Voilà, voilà. Au-delà de la véracité toute relative de l’argument de la provocation, il faut lire entre les lignes pour bien comprendre que dans tous les cas, les victimes du soir sont aussi les coupables aux yeux des autorités ukrainiennes. Quoi qu’il arrive, le vice président rejette l’argument raciste en bloc. Ce n’est pas la première fois en Ukraine, en Russie ou en Biélorussie qu’on ne comprend pas que ce genre d’actes puissent être qualifiés de racistes. Il faut le dire, on a du mal à comprendre ce qu’est le racisme par-delà le feu rideau de fer. Si l’on creuse un peu, on se rend compte que la dichotomie entre vision européenne occidentale et européenne orientale du racisme prend racine bien plus tôt. Où ça ? Dans les programmes scolaires par exemple. Dans un tas de pays russophones, les théories d’un anthropologue russe Aleksandr Zubov qui explique tranquillement que l’humanité est divisée en plusieurs races (Europoïdes, Negroïdes, Mongoloïdes…) sont encore enseignées.

Il faut le dire, on a du mal à comprendre ce qu’est le racisme par delà le feu rideau de fer

Ne jouons pas les condescendants et feuilletons tranquillement certains livres de biologies français des 60’s, on y trouvera des conneries similaires. La différence se joue dans l’évolution des moyens éducatifs. Nos manuels scolaires ont changé, les théories à l’intérieur également. Ce n’est pas forcément le cas en Russie ou en Ukraine.

Cette situation qui instaure la différenciation des races comme un savoir commun de base est une première explication du mur d’incompréhension se dressant entre les populations des stades slaves et les instances régissant le football européen.

Sanctionner les bonnes personnes et pas la masse

C’est à ce moment-là qu’il faut revenir aux dires de notre bon Ihor Kotchetov.

Il reconnaît implicitement qu’il ne fait pas bon pour des personnes « de ce type » de traîner aux alentours du secteur des Ultras Roditchi. Car logiquement, la division est claire dans son esprit. Des personnes de type négroïdes n’ont pas grand-chose à faire dans un secteur contrôlé par un groupe revendiquant les droits des europoïdes. Un truc scandaleux pour nous, pas pour lui. Ni pour une bonne partie des populations ayant grandi avec l’enseignement local.

Vous comprenez là où on veut venir ou vous êtes déjà sur le point de nous dénoncer à la LICRA ? Pour que les choses puissent réellement changer, il faut une prise de conscience de l’ensemble de la société et vous comprendrez aisément que le problème n’est pas vraiment au centre des préoccupations ukrainiennes actuelles… Ou russes d’ailleurs.

Alors tant que des Kotchetov tiendront des discours obscurantistes, la lumière n’aura que peu de chances d’irradier les parcages ultras. De la même façon, infliger une sanction bête et méchante au club ne changerait pas grand-chose. L’opinion générale aura même tendance à élever au rang de martyre, des ultras (devenus vertueux depuis Maïdan dans le cas ukrainien) injustement punis selon leur eux.


Voir aussi : Euromaidan: le rôle citoyen des Ultras ukrainiens et la futilité du football


La sanction doit toucher les instances dirigeantes des footballs concernés dans un premier temps pour pouvoir dans un second temps impacter celles des pays. Mais là, on rêve un peu, on vous l’accorde.

Mourad Aerts


Photo à la une : © White-Blue.kiev.ua

3 Comments

  1. Éric 4 novembre 2015 at 19 h 23 min

    Je ne connais rien au foot, par contre je vais régulièrement en Ukraine et en Russie. Et vous confondez les deux qui sont quasiment en guerre. Les ultras ukrainiens préféreraient se crever les yeux que de lire Zoubov ou Douguine. Ça ne veut pas dire qu’il n’y a pas de racisme en Ukraine, mais il puise à d’autres sources, comme les collabos ukrainiens pro nazis de la 2e guerre mondiale. Par ailleurs, article très intéressant.

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    1. Mourad Aerts 4 novembre 2015 at 22 h 46 min

      Je comprends. Par contre attention la personne qui est à la base de ma démonstration c’est surtout le vice président de la FFU.
      Les ultras ukrainiens et russes divergent par la suite mais les deux pays ont une base éducative similaire. C’est dans les (vieillissants) livres de SVT des deux pays qu’il faut aller chercher.

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  2. antonin 6 novembre 2015 at 11 h 54 min

    Merci Mourad, explication très juste. J’ai d’ailleurs discuté avec des étudiants africains qui étudient à Vinnytsia (Ukraine) et ils m’ont affirmé que parfois ils étaient confrontés à une forme de racisme presque « naïve ». Exemple : une fille ukrainienne stoppe notre étudiant dans la rue et lui affirme : oh je vous adore vous les nègres, vous savez si bien danser. » Elle ne voulait pas le blesser au contraire, mais cela vient plus d’un manque d’éducation, ou d’un manque de renouvellement des moyens éducatifs (manuels datant de l’époque soviétique).

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