Une nouvelle année de football prend fin en Estonie. Après le sacre surprise de l’ex-Infonet, devenu FCI Tallinn, les choses sont rentrées dans l’ordre, avec le onzième titre du Flora Tallinn, le club le plus titré depuis l’indépendance du pays. Si la bataille pour le titre a duré jusqu’à la fin de saison, la Premium Liiga n’a pas été surprenante dans son essence. Comme l’an dernier, le championnat s’est divisé en trois parties : les quatre gros clubs, le ventre mou et le promu luttant pour le maintien. L’écart entre le top 4 et le reste des équipes s’est d’ailleurs agrandi comme jamais auparavant. Pour la première fois, les quatre premières équipes du classement ont toutes dépassé la barre des 100 buts marqués ! Un écart de performances qui risque encore de se creuser l’an prochain, après l’annonce d’une fusion qui pourrait bien bouleverser l’ordre établi. Retour club par club sur cette année en Premium Liiga. 2017: un an de football en Estonie.

© jalgpall.ee

Un an de Premium Liiga

Flora Tallinn (90 pts)

Quel retour en force! Après une décevante 4e place l’an dernier, le Flora Tallinn a tout changé pour la saison 2017. Sur le banc tout d’abord, où Argo Arbeiter a cédé sa place au Néerlandais Arno Pijpers, déjà passé par le Flora et l’équipe nationale estonienne au début des années 2000. Le club a également fait le ménage au niveau de l’effectif, en laissant partir ses éléments étrangers pour se concentrer sur ses jeunes joueurs, uniquement estoniens, hormis le Géorgien Zakaria Beglarishvili, au club depuis des années.

Le très jeune effectif, où seuls quatre joueurs ont plus de 25 ans, est uniquement renforcé par des jeunes issus de l’équipe réserve (U21) du club. Comme lors de son dernier titre voilà deux ans, le Flora s’appuie donc sur sa formation. Avec le succès que l’on connaît, sous les ordres d’un Pijpers bien plus expérimenté que son prédécesseur. Devant, le Flora a brillé grâce à son attaquant-vedette Rauno Sappinen, meilleur buteur du championnat avec 27 réalisations (et 18 passes décisives), bien appuyé par Beglarishvili, auteur de 16 buts et 24 passes décisives. Sur le plan défensif, le nouveau capitaine Brent Lepistu (24 ans) a pris de l’envergure à la récupération, tout comme les jeunes Madis Vihmann et Joseph Saliste (tous deux 22 ans) en défense. Contrairement à l’année précédente, l’équipe a fait preuve d’une grande force de caractère, se montrant capable de tenir ses avantages en matchs, là où elle se faisait remonter un an plus tôt, où lors du match nul 3-3 face au Levadia, arraché grâce à deux buts en fin de match.

Rien n’annonçait pourtant une pareille réussite en début d’année. Pour le premier match officiel de la saison, le Flora est sèchement battu 5-0 par le FCI Tallinn en Super Coupe d’Estonie. Une défaite suivie de deux nuls 1-1 face au Levadia puis au Nõmme Kalju en ouverture de championnat. Un début morose qui s’accompagne d’une triste nouvelle : atteint d’une mononucléose, le prometteur milieu défensif Jan Kokla est contraint de mettre un terme à sa carrière à 20 ans à peine. Mais rapidement, tout se met en place, et le club connaît une série de 15 victoires consécutives, et de 24 matchs sans défaites ! Largement en tête à la mi-saison, le Flora flanche légèrement à l’automne, notamment après ses premières défaites, face au FCi (2-4) puis à Kalju (0-4). Le leader retombe sous la menace du Levadia jusqu’au bout, et doit attendre l’avant-dernière journée pour s’assurer du titre de champion. Un titre au final mérité, compte tenu notamment de la supériorité face à ses principaux concurrents Levadia (0V, 4N, 0D), Nõmme Kalju (2V, 1N, 1D) et FCI (3V, 0N, 1D).

La joie des ultras du Flora © Madis Sinivee

Reste à voir maintenant si le Flora peut confirmer cette belle saison.  De gros doutes planent sur la prolongation de contrat de Lepistu, ainsi que sur un éventuel transfert de la star Sappinen. Il faudra encore compter sur la formation pour rester au sommet en Premium Liiga, et briller enfin en Ligue des Champions, deux ans après le camouflet du premier tour face au champion de Gibraltar.

Levadia Tallinn (84 pts)

A l’instar de son grand rival, le Levadia Tallinn a connu une saison étonnamment réussie. Car les interrogations n’ont pas manqué en début de saison. Après un bouleversement quasi-intégral de son effectif, bien malin était celui qui pouvait prédire quel serait le niveau de l’équipe pour la saison à venir.

La principale interrogation concernait le remplacement d’Anton Miranchuk, le jeune meneur de jeu russe reparti au Lokomotiv Moscou au terme de son année de prêt. C’est du côté de l’Angleterre que le Levadia s’est tourné, accueillant, toujours en prêt, deux joueurs de l’équipe réserve de Middlesbrough. Un choix à moitié concluant seulement : si le défenseur ghanéen William Opoku Asiedu n’a pas su s’imposer, jouant la plupart du temps avec l’équipe U21 évoluant en Esiliiga, l’attaquant brésilien Joao Morelli s’est montré précieux et efficace, avec 17 buts en 22 matches. Avant malheureusement de manquer une bonne partie de la seconde partie de saison sur blessure. Une absence qui s’est fait cruellement sentir lors de la défaite face à Viljandi !

Car le championnat s’est peut-être joué dès l’été. Le 28 juillet très exactement, et ce match que le Levadia perd, contre toute attente, 1-0 sur le terrain du Tulevik Viljandi. Une des rares erreurs du Levadia cette année. Car avec 84 points et deux petites défaites seulement (l’autre face au FCI Tallinn), le club compte autant de points que lors de son dernier titre en 2014. Mieux, le Levadia est tout simplement la meilleure attaque (106 buts) et la meilleure défense du championnat, avec 20 buts encaissés seulement ! Une force défensive illustrée notamment par son gardien Sergei Lepmets, qui a réussi 22 clean sheets sur 36 matchs. De quoi donner encore plus de crédit à la performance du Flora, qui le devance.

Personne ne s’attendait à la suite, qui arrive quelques heures à peine après le coup de sifflet final de la 36e et dernière journée de championnat. L’annonce du club fait alors un assourdissant coup de tonnerre dans le ciel du football estonien : le Levadia et le FCI Tallinn fusionnent ! « Nous voulons offrir un meilleur produit que celui actuel. C’est pourquoi nous unissons les clubs. Nous ferons équipe avec les meilleurs joueurs et l’entraîneur-chef Aleksandar Rogic (le Serbe du FCI qui succède à Igor Prins, démissionnaire au Levadia). Les objectifs ne se limitent pas au football estonien, mais à l’international: nous voulons atteindre la phase de groupe des compétitions européennes. C’est mon rêve. » C’est par cette déclaration que Viktor Levada, patron du Levadia, fait l’annonce choc. « L’objectif n’est pas nécessairement à atteindre pour 2018, ajoute-t-il. Il est à plus long terme. Nous avons réuni les meilleurs joueurs et nous voulons créer un club qui sera non seulement champion d’Estonie, mais également capable d’aller loin en Europe. Notre objectif sera d’abord de passer le deuxième et le troisième tour de qualification. » Pour rappel, le Nõmme Kalju a réalisé en 2016 le meilleur parcours d’un club estonien, en atteignant le 3e tour préliminaire d’Europa League. L’idée de passer quatre tours pour atteindre les groupes reste donc difficile à réaliser pour un club estonien. Avec l’addition des forces (notamment financière) des deux entités, c’est une superpuissance qui pourrait bien voir le jouer dans le football estonien (toutes proportions gardées bien sûr). De quoi donner des inquiétudes au Flora, qui reste le grand rival.

Nõmme Kalju (78 pts)

Comme souvent, les Panthères roses de Kalju ont fait confiance à la stabilité. Hormis les départs des historiques Hidetoshi Wakui et Jorge Rodrigues (retraite), ainsi que de l’attaquant Ats Purje, reparti tenter sa chance en Finlande, peu de mouvements sont à citer. Équilibrée, joueuse et agréable à suivre, comme souvent depuis l’arrivée de Sergey Frantsev sur son banc, cette équipe a joué à son niveau et n’a pas grand-chose à se reprocher.

Comme chaque année, excepté lors du titre en 2012, Nõmme Kalju occupe le wagon de tête, sans pour autant être un réel concurrent à la victoire finale. Et comme souvent, l’écart qui sépare l’équipe de la première place se joue face aux concurrents directs. Cette saison encore, Kalju n’a pas réussi à faire le poids face au Flora et au Levadia (1V, 3N, 4D). Si le collectif a été dans l’ensemble performant tout au long de l’année – pas moins de dix joueurs ont marqué au moins cinq buts ! – quelques individualités n’ont pas réussi autant qu’attendu. Igor Subbotin est le premier visé. Après avoir marché sur la Premium Liiga avec le maillot du Levadia, l’ailier-attaquant est revenu au pays après six mois passés en deuxième division polonaise. Avec huit buts et six passes décisives, son apport est un peu en-deçà de ce qu’on aurait pu attendre de lui. Même constat pour le Brésilien Carlos Geovane (cinq buts), d’ores et déjà libéré par le club. Au rayon des réussites, notons les très bonnes saisons du Brésilien Liliu (16 buts, huit passes), de l’Italien Uggè, toujours aussi solide en défense ou encore de l’inamovible Artjom Dmitrijev au milieu.

© Hendrik Osula

Parmi les réussites, deux éléments vont quitter le club cet hiver. L’arrière droit Karl Mööl (25 ans) et le milieu russe Artur Välikaev ont en effet été laissés libres par le club de se trouver un meilleur contrat à l’étranger. Le club va donc devoir se renforcer pour concurrencer encore ses rivaux de la capitale. A défaut de la rejoindre d’ailleurs. Car Nõmme Kalju a été contacté pour joindre le Levadia et le FCI dans le projet de fusion. Une proposition finalement écartée par les banlieusards. Pour une raison culturelle tout d’abord, l’identité du club ne cadrant pas totalement avec celle des deux clubs très pro-russes. Une identité que le club à la meilleure affluence du pays ne souhaite pas galvauder. D’autre part, ce dernier possède des infrastructures parmi les meilleures du pays, largement suffisantes pour tenir son rang dans le top 3 de Premium Liiga. Il vient d’ailleurs de terminer la construction d’une deuxième tribune dans son Hiiu Staadion, qui pourrait lui permettre d’augmenter encore son affluence.

FCI Tallinn (65 pts)

« Nous avons réussi à atteindre nos objectifs en remportant le championnat et la coupe. J’ai décidé de me retirer pour plusieurs raisons. J’ai vécu tous les aspects non-professionnels du football. J’y ai dépensé toute mon énergie, mon temps libre et mon argent. Je suis fatigué. » Lors de l’annonce de la fusion entre le Levadia et son club, le FCI, Andrei Leškin n’y a pas été par quatre chemins. Cette annonce ressemble à une bénédiction après quinze ans d’existence pour ce qui n’était au départ qu’un club d’entreprise. Car l’année a été plus que difficile…

Au lendemain de son premier, et donc unique, titre national, le FCI s’est montré bien décevant en 2017. La victoire en Super Coupe offrait bien des promesses, qui se sont vite révélées impossibles à tenir. Le club a pourtant réussi à faire venir les meilleurs buteurs des deux dernières saisons, Jevgeni Harin et Albert Prosa, l’ancien du Flora, revenu d’une courte expérience en Finlande. Un retour réussi pour lui, avec pas moins de 27 buts cette année, ce qui fait de lui le meilleur buteur du championnat ex-aequo avec Rauno Sappinen.

Harin, Prosa, trois 9 et 51 buts à eux deux. © johannespaultamm.ee

Preuve des difficultés rencontrées, Aleksandr Puštov, fidèle lieutenant de Leškin, quitte son poste d’entraîneur en juillet, après cinq longues années passées à la tête d’un club avec lequel il a tout connu, du football amateur jusqu’au titre national. C’est une défaite 2-0 à Malte lors du premier tour préliminaire de Ligue des Champions qui finit par avoir raison de lui. Une désillusion européenne qui vient s’ajouter aux difficultés rapidement rencontrées en Premium Liiga. Car après la Super Coupe, le FCI est rapidement et lourdement retombé sur terre. Sans Harin, blessé, l’équipe ne prend que six points lors des cinq premières journées. Déjà trop peu pour espérer concurrencer le trio de tête. Pire, les matchs face aux autres équipes de la capitale tournent systématiquement au cauchemar. Il faut attendre la 23e journée pour que, enfin, le FCI s’impose face à une équipe de tête, en l’occurrence le Levadia. Au final, la Coupe d’Estonie, remportée face au surprenant Tammeka Tartu (2-0) reste le seul point positif de cet exercice 2017.

Avec la fusion, le FCI devrait former une solide entité, le FCI Levadia, avec son voisin. Deux clubs détenus par des businessmen issus de la minorité russe qui avaient tout pour s’entendre. Côté FCI, le président Leškin laisse volontiers la barre à ses homologues du Levadia, tout en garantissant un soutien financier. Le club quitte également son terrain pour le Kaadrioru Staadion du Levadia, mais voit son entraîneur serbe Rogic rester sur le banc de la nouvelle équipe. Côté joueurs, impossible de savoir pour le moment qui fera partie du groupe aux côtés des éléments du Levadia.

Trans Narva (45 pts)

Le meilleur des “autres.” Vingt points derrière le quatuor de tête, le Trans Narva est l’une des belles surprises de l’année 2017. Le club proche de la frontière avec la Russie a pourtant démarré cette saison sans les principaux piliers de son équipe. Roman Nesterovski et Kiril Nesterov ont ainsi rejoint le FCI Tallinn, tandis que d’autres sont partis sous des cieux aussi divers que la Russie ou… le Tadjikistan !

C’est donc dans l’inconnu, avec une équipe rajeunie, que le Trans Narva a entamé sa saison de Premium Liiga. Mais de quelle manière ! Le premier match se solde par une victoire 5-1 sur le terrain de Paide. Malgré des défaites logiques face aux clubs de la capitale, les bons résultats s’accumulent, et le club profite même du mauvais démarrage du FCI pour passer quasiment toute la première moitié de saison à la 4e place du classement. Ainsi épargnée de la lutte pour le maintien, l’équipe a passé une saison très détendue. Les problèmes rencontrés avec son meilleur buteur, le Biélorusse Dmitri Kovb, parti au mois d’août, en milieu de saison, n’ont même pas troublé sa tranquillité.

Le match Narva-Levadia de la 35e journée, qui prive les visiteurs du titre.

Pour la saison prochaine, le club de Narva devrait rester dans le groupe des « autres. » Pour autant, il pourrait bien profiter de la situation. Avec la fusion FCI-Levadia, une place européenne va se libérer, et donc devenir atteignable. De plus, le club de la région Ida-Viru, à l’extrême nord-est du pays, pourrait bien profiter de la disparition de son voisin de Sillamäe pour récupérer quelques joueurs à moindres frais. Peut-être l’occasion de forcer son destin et jouer autre chose que le ventre mou du classement.

Paide Linnameeskond (38 pts)

En progression constante depuis quelques saisons, les Vagabonds de Paide sont tombés de haut cette année. Renforcée par plusieurs anciens éléments du Flora, sur le terrain comme au sein du staff, l’équipe comptait grignoter encore un peu de son retard sur le top 4. Elle a été pour cela l’une des équipes les plus actives sur le marché des transferts en début d’année, comptant sur une masse salariale importante. Certains éléments sont ainsi payés plus qu’au Flora !

La gestion ne s’est cependant pas révélée idéale. Et la succession du serial-buteur Vjatšeslav Zahovaiko n’a pas été réglée. Jusqu’à l’an dernier, le caractériel attaquant tenait à bout de bras l’équipe dont il était le capitaine. Devenu son entraîneur cette année, il est le premier à ne pas parvenir à trouver la solution. D’autant plus qu’après quelques départs, son équipe connaît plusieurs blessures, dont celle de son capitaine et maître à jouer Andre Frolov, qui rate une dizaine de matchs.

Le jeune latéral Michael Lilander, l’une des rares satisfactions de l’année du côté de Paide. © Liisi Troska

Si la fin de saison marque une légère amélioration, tant dans le jeu qu’au niveau des résultats, l’ensemble est bien inférieur qu’à celui de la saison précédente (dix buts de marqués en moins et 20 buts encaissés de plus). Un dénouement qui devrait pousser le club à réduire la voilure. L’écart avec les meilleures équipes ne semble pas prêt d’être réduit. Peu de bonnes nouvelles donc.

Tammeka Tartu (37 pts)

La situation du Tammeka Tartu est relativement similaire à celle de Paide. Avec le départ à la retraite de son meilleur buteur Kristian Tiirik, le club a eu bien du mal à trouver le chemin des filets. Malgré un modeste bilan de 40 buts marqués en 36 journées, le club de Tartu n’a jamais été inquiété pour son maintien, grâce notamment à de bons résultats face à ses concurrents directs. Le jeunes effectif réussit même la belle performance d’atteindre la finale de Coupe d’Estonie, où le FCI s’est révélé trop fort pour être battu.

Après la finale perdue en Coupe d’Estonie. © jktammeka.ee

Mais pour cette saison, les principaux objectifs du club n’étaient pas sur le terrain, où il n’avait pas grand-chose à jouer à part le maintien. Si l’année 2017 est bonne, c’est surtout sur le plan du développement interne du club. A la suite de sa grande opération de crowdfunding, le club a inauguré son nouveau terrain artificiel, le Tartu Sepa Tänava Staadion. Toujours très actif dans le domaine du marketing, le club a mis en place le projet Tammeka 2020, dont les trois grands objectifs sont la formation de 1 300 enfants chaque année, la meilleure affluence moyenne du championnat avec plus de 1 000 spectateurs par match, et une place dans le top 3 de Premium Liiga. Des objectifs très ambitieux, mais pas totalement irréalistes pour la ville de Tartu, deuxième ville du pays avec ses 100 000 habitants, qui a toujours eu une grande passion pour le football, ce qui n’est pas le cas de toutes les villes du pays. Comme toujours dans les Pays Baltes, tout ne sera peut-être qu’une question d’argent.

Sillamäe Kalev (36 pts)

« Malheureusement, nous devons reconnaître le fait que nous ne participerons pas à la prochaine saison de Premium Liiga. Nous avons tout essayé pour résoudre nos problèmes financiers, mais nous n’avons pas l’argent pour jouer dans le championnat d’Estonie en 2018. » C’est par ces mots que le président Aleksandr Starodubtsev annoncé la disparition de son club. Après plusieurs années de lutte, Sillamäe Kalev doit donc céder face à ses problèmes financiers, qui n’ont cessé d’augmenter après notamment le retrait de ses principaux sponsors : le Port de Sillamäe et le pétrolier Alexela.

A l’intersaison, le club a ainsi perdu ses principaux éléments : le serial-buteur Evgeny Kabaev (Bohemians Praha), Denis Tjapkin (Nomme Kalju) et le jeune défenseur central Igor Dudarev, parti au Levadia. Des départs qui s’avèrent difficiles à compenser. Les arrivées se font tard, ce qui provoque un début de saison calamiteux. Sillamäe ne compte ainsi qu’une petite victoire sur les onze premières journées de championnat. Rapidement, le club doit dégraisser. Le Lituanien Mindaugas Kalonas et le Français Kassim Aidara sont libérés après une poignée de matchs, faute de possibilité de payer leurs salaires. Au fur-et-à-mesure de la saison, l’effectif de l’équipe devient ainsi de plus en plus mince. Au point de ne compter plus que 13 joueurs sous contrat en fin de saison. Des jeunes sont régulièrement appelés en équipe première, qui n’a parfois que quatre remplaçants sur le banc au lieu des sept autorisés.

Malgré tout, le club obtient sans trembler son maintien dans l’élite, dans le sillage des 18 buts d’Alexander Volkov. Sportivement du moins. Le 4 novembre, 111 spectateurs assistent au match Sillamäe Kalev – Tulevik Viljandi. Pour une dernière défaite (0-1). Deux jours plus tard, le président Starodubtsev jette l’éponge. Le club évoluera l’an prochain au niveau amateur, en 4e division.

Le tout dernier match de Sillamäe en Premium Liiga. © Capture d’écran Youtube/PremiumLiiga

Viljandi Tulevik (28 pts)

De retour en Premium Liiga après une saison passée en Esiliiga, le Viljandi Tulevik a, comme tout promu, passé une saison difficile, tout en atteignant son objectif qui était le maintien. Un objectif qui s’est d’ailleurs révélé moins compliqué que prévu à atteindre, vu le faible niveau affiché par la lanterne rouge Pärnu. C’est donc avec une pression tout relative que L’Avenir de Viljandi a pu aborder la plupart de ses matchs. Tant mieux, car, comme chaque année, une bonne partie de l’effectif a subi l’écart de niveau entre l’Esiliiga et la Premium Liiga.

Les difficultés se sont pourtant accumulées pour les Jaune et Noir. Son meilleur joueur, l’expérimenté défenseur international Sander Post, a tout d’abord été nommé à la tête de la sélection nationale U17, ce qui l’a privé d’une bonne moitié des matchs de son équipe. Ce sont ensuite les blessures de plusieurs joueurs qui ont handicapé Viljandi.

© Brit Maria Tael

Heureusement, les prêts de jeunes tels que Herol Riiberg, venu du Flora, se sont montrés positifs. A tel point que, débarrassé de toute pression, le Viljandi Tulevik a tenu tête aux meilleures équipes. Il est ainsi passé tout près de la victoire par deux fois face au Flora, mené à chaque fois au score jusque dans les dernières minutes. Mais c’est face au Levadia que Viljandi a frappé fort, avec une victoire 1-0 durant l’été. Une victoire qui prive en grande partie le Levadia du titre. En continuant sur sa lancée, le Tulevik pourrait profiter de l’expérience emmagasinée par ses jeunes pour hausser encore son niveau de jeu l’an prochain. Il faudra cependant faire sans Aivar Lillevere, son entraîneur qui a posé sa démission en novembre, épuisé, après plus de quatre années passées à la tête de son club de toujours. Un vrai coup dur pour le club.

Pärnu Vaprus (8 pts)

Malgré l’inauguration du tout nouveau Rannastaadion l’an dernier, le football va bien mal à Pärnu. En 2016, le club local, Pärnu Linnameeskond, a sauvé sa peau de justesse, à l’issue du barrage de fin de saison, avec un statut semi-professionnel. Insuffisant pour le club, qui est mis en faillite en janvier. Quelques semaines avant la reprise du championnat, c’est une nouvelle entité qui lui succède, Pärnu Vaprus. Vaprus, un terme qui signifie bravoure/courage en français. Tout un symbole.

En manque de moyens, le club a donné leur chance dans l’élite à de jeunes, voire très jeunes joueurs, âgés parfois de 16 ans. Des jeunes pour qui la tâche était bien trop ardue. Durant cette année cauchemardesque, les claques se sont accumulées : 1-11 contre le FCI, 0-10 contre le Flora, et même un 0-9 face à Sillamäe. Le résultat final de huit points n’est toutefois pas un record en Premium Liiga (le Rakvere Tarvas n’en avait obtenu que trois l’an dernier), tout comme les 146 buts encaissés sont encore loin de feu l’Ajax Lasnamäe, qui en avait encaissé 153 en 2007, puis 192 (!!) en 2011.

La découverte de l’élite a été bien difficile pour les jeunes de Pärnu. © Brit Maria Tael

Mais ce n’est pas tout. Après avoir perdu son joueur le plus expérimenté, l’international Martin Vunk, écarté des terrains dès l’été, le club de Pärnu est éliminé de Coupe d’Estonie par Narva United, une équipe de 4e division. S‘ensuit une invraisemblable série de 16 défaites consécutives en championnat. Au final, Pärnu Vaprus n’a ainsi pris qu’un seul et unique point sur les 20 derniers matchs de championnat ! Des résultats indignes d’une équipe de première division.

En cette fin de saison, l’avenir du football à Pärnu est plus que flou. Si la fusion FCI-Levadia et la disparition de Sillamäe sauvent Vaprus de la relégation, personne ne sait encore si le club repartira la saison prochaine. Une situation morose, bien loin de celle du club de football féminin de la ville, qui domine outrageusement le championnat estonien depuis des années.

Le XI de l’année

© soccernet.ee

Gardien: Mait Toom (Flora).
Défenseurs: Karl Mööl (Kalju), Madis Vihmann (Flora), Joonas Tamm (Flora), Joseph Saliste (Flora).
Milieux: Joao Morelli (Levadia), Zakaria Beglarišvili (Flora), Brent Lepistu (Flora), Jevgeni Kobzar (Levadia).
Attaquants: Rimo Hunt (Levadia), Rauno Sappinen (Flora).

Les buts de l’année

Comme chaque année, la Premium Liiga permet aux fans d’élire chaque mois le plus beau but. Ils sont tous réunis ci-dessous, et concourent tous pour l’élection du plus beau but de l’année 2017 en Estonie. Petit bonus: c’est l’occasion rêvée d’apprendre les mois de l’année en estonien.

Et l’année prochaine?

Comme expliqué plus haut, la Premium Liiga va connaître un énorme bouleversement en 2018 avec la fusion du FCI et du Levadia. Une fusion qui devrait donner naissance à une nouvelle place forte du football en Estonie. Si l’idée est bonne sur le plan européen, cette super-puissance pouvant s’offrir les moyens d’exister un peu sur le plan continental, elle devrait augmenter encore l’écart entre les trois meilleures équipes du pays et les autres. Un écart déjà important. Pour la première fois cette année, les quatre premières équipes du classement ont marqué plus de 100 buts chacune, quand toutes les autres ont terminé avec une différence de buts négative.

Avec cette fusion et le retrait du Sillamäe Kalev, il n’y aura pas de relégation cette année. Une aubaine inespérée pour Pärnu Vaprus, à condition d’améliorer le niveau de jeu. Il y aura donc deux promus l’an prochain, et le match de barrage entre le Tulevik Viljandi et le deuxième d’Esiliiga a été annulé au dernier moment.

Avec la modification du statut des équipes réserves, qui sont devenues U21, les réserves des grands clubs de Tallinn n’ont, pour une fois, pas dominé la deuxième division. Il a ainsi fallu attendre la toute dernière journée pour connaître le champion d’Esiliiga. A l’aube de cette dernière journée, deux équipes sont à égalité en tête du classement : Maardu Linnameeskond et le Kalev Tallinn. Hasard du calendrier, ces deux équipes se rencontrent justement lors de la dernière journée. A l’issue d’un match remporté 2-1, c’est Maardu qui s’adjuge le titre, au terme de sa seconde année seulement en Esiliiga. Une petite surprise. Sans avoir remanié son effectif, le club a nettement amélioré son niveau. A la pointe d’un effectif qui a beaucoup progressé, l’attaquant Vitali Gussev s’est montré intraitable avec 38 buts marqués en 31 matchs.

© Jana Pipar / EJL

Malheureusement, le club de Maardu n’est pas encore assuré d’avoir les moyens de participer à la Premium Liiga. Le club estime qu’un budget de 200 000 euros est nécessaire pour mener à bien la nouvelle saison, un montant bien supérieur à celui de cette année. Pour exemple, la mairie a décidé d’offrir au club une récompense de 5 000 euros pour son titre de champion d’Esiliiga cette année…

Bien que deuxième cette saison, le Kalev Tallinn semble mieux armé pour réussir dans l’élite l’an prochain. Unique club estonien à avoir évolué une saison dans l’ex-championnat d’URSS, le Kalev renaît de ses cendres sous l’impulsion d’un grand nom du football estonien : Joel Lindpere. Contrairement à Maardu, Kalev possède un effectif très jeune (21 ans de moyenne d’âge) et de solides appuis techniques et financiers. Ce qui lui a permis de faire venir plusieurs joueurs du niveau supérieur cette année, et de hausser un peu ses ambitions. Toujours avec prudence toutefois : « Nous avançons étape par étape, a ainsi déclaré Lindpere. Si quelques chose se produit, ce sera un changement minime, en fonction de la position du club, de ses capacités et de ce que nous devrons apporter. » Le premier changement a déjà eu lieu voila quelques jours, avec un changement d’entraîneur et la nomination d’Argo Arbeiter, l’ex-technicien du Flora. Rien que ça!

Joel Lindpere, en bonne compagnie avec le Scouser Ragnar Klavan. © Facebook Kalev

Seul bémol : le nombre de spectateurs. Malgré un jeu offensif et une série quasi-exclusive de victoires en seconde moitié de saison, le club n’a que rarement attiré plus d’une centaine de spectateurs. Le choix de quitter le vénérable Kalevi Keskstaadion pour un terrain artificiel n’y est peut-être pas pour rien. Il est en tout cas bien triste pour tous les groundhoppers et autres touristes footballistiques amoureux de belles pierres.

Pierre-Julien Pera et Marcel Dieterle


Image à la Une : © Tairo Lutter

4 Comments

  1. Matthieu Cadène 27 novembre 2017 at 19 h 19 min

    Bonjour. J’aimerais avoir votre avis svp, sur la saison du français de Kalju, Reginald Mbu Alidor. C’est assez dur de trouver des infos sur lui, du coup je m’adresse directement au spécialiste ^^.

    Reply
    1. Pierre-Julien Pera 27 novembre 2017 at 21 h 21 min

      Bonsoir,
      Toujours très sûr Reginald. Malgré une longue absence durant quasiment toute la première moitié du championnat, il est redevenu indispensable à Kalju dès son retour. Vraiment solide dans son rôle de récupérateur, endurant, travailleur. Il ne lui reste plus qu’un an de contrat, du coup il ne serait pas surprenant de le voir rejoindre un championnat plus huppé d’ici l’été prochain. Dans un an au plus tard.

      Reply
      1. Matthieu Cadène 30 novembre 2017 at 14 h 39 min

        Merci beaucoup pour la réponse. Je trouve ça néanmoins bizarre qu’il soit resté si longtemps en Estonie. Dans les interviews qu’il donnait après sa première saison, il rêvait déjà de quitter le pays. Et finalement, il y sera resté plusieurs années. Des explications à cela ? Pas de meilleurs offres, ou une acclimatation qui s’est mieux passée que prévu ?

        Reply
        1. Pierre-Julien Pera 1 décembre 2017 at 10 h 45 min

          Je ne peux pas te répondre avec certitude, mais étant donné qu’il a toujours dit en interview vouloir viser un championnat plus huppé, je suppose que c’est plutôt par manque d’offre concrète. Même si niveau acclimatation, il semble s’être fait à l’Estonie. Au cas où, ça c’est la dernière itw que j’aie entendu de lui: https://www.franceculture.fr/emissions/le-magazine-de-la-redaction/estonie-un-musee-pour-guerir-du-passe-0

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