La longue trêve hivernale ukrainienne qui marquait jadis la mi- saison marque désormais la « presque fin » de la saison régulière. En effet l’Ukraine a adopté cette année un nouveau format de compétition divisé en deux parties. Nous avons donc quitté les terrains enneigés le lundi 12 décembre sur un Dynamo-Shakhtar prolifique en buts (3-4 pour Donetsk) qui marquait la fin de la dix-huitième journée. 18 rounds disputés sur 22, avant que ne se prépare la seconde phase du championnat. Malgré un système remanié pour relancer l’intérêt du championnat, le Shakhtar Donetsk s’est déjà quasiment assuré du titre après avoir passé à la moulinette tout ce petit monde.

Pour rappel, la 22ème journée marquera la fin de la première partie du championnat qui se scindera ensuite en deux pour la seconde phase. Les six premiers se rencontreront entre eux au sein du groupe « Europe » et les six derniers au sein du groupe « relégation ». Ce nouveau système ne constitue pas réellement des playoffs puisque toutes les équipes garderont leurs points déjà acquis pour la seconde phase.

Shakhtar Donetsk (1er), ça plane pour Fonseca.

Le Shakhtar avait toutes les raisons de douter en début de saison. Battu par le Dynamo sur les deux derniers exercices, voilà que la légende Mircea Lucescu annonce son départ pour le Zenit Saint-Petersbourg. Douze années au club, 22 titres dont une Coupe de l’UEFA, what else ?

Pour pallier le départ de ce coach emblématique, Rinat Akhmetov s’est attaché les services du portugais Paulo Fonseca, alors entraîneur du SC Braga. Le début de saison va commencer par deux revers, le premier à la mi-juillet avec la Supercoupe d’Ukraine perdu aux tirs aux buts face à Kiev. Avec en prime un dernier tir raté piteusement par Yevgen Seleznyov, devenu entre temps quasi-indésirable en Ukraine après un transfert à Krasnodar en Russie. Le second va prendre des allures de faute professionnelle avec une élimination en tour préliminaire de la Ligue des Champions face aux Young Boys de Berne, encore aux tirs aux buts, dans un match qu’ils n’auraient jamais dû perdre.

Heureusement pour les mineurs, la mayonnaise va finalement prendre, et bien prendre même. Le mois de juillet oublié, le Shakhtar va lancer la machine pour finalement tout écraser en cette première moitié de saison, invaincu avant la trêve, dans toutes les compétitions. 50 points pris sur 54 possibles en championnat, 18 sur 18 en Europa League, tout roule pour Fonseca et sa bande, qui caracolent logiquement en tête de la Premier Liga ukrainienne avec un gouffre de 13 longueurs d’avance sur Kiev. Les points acquis lors de la première phase du championnat étant conservés pour la seconde, on ne voit pas comment le Shakhtar pourrait laisser filer le titre avec une telle avance.

En revanche l’énorme déception vient de cette Europa League que le Shakhtar a laissé filer ce jeudi soir après une défaite 2 à 0 à domicile face au Celta Vigo alors qu’une belle campagne européenne se profilait pour Paulo Fonseca et les siens.

Côté joueurs, l’argentin Facundo Ferreyra se classe meilleur buteur du club (second du championnat) avec 8 réalisations en 11 matchs. Pour pallier les départs en attaque de Yevgen Seleznyov (Karabükspor) et d’Eduardo (libre), le club du Donbass s’est attaché les services du très convoité Gustavo Blanco-Leschuk, actuellement troisième meilleur buteur du championnat en provenance du Karpaty Lviv. A noter aussi dans les changements à venir, le Shakhtar jusque-là exilé à Lviv, jouera désormais ses matchs à domicile au Metalist Stadium de Kharkiv. L’opération avait été tenté en première partie de saison face au Dynamo et fût une réussite dans l’ensemble du point de vue des supporters. Rappelons que le club du Donbass s’était plaint à de nombreuse reprise de l’ambiance à l’Arena Lviv, dans une ville plus encline à supporter le club de la capitale.

Dynamo Kiev (2ème), au bord de la crise de nerf.

On pensait le Dynamo quasi intouchable avec ces deux titres consécutifs mêlés aux ennuis du Shakhtar, les voici en crise après une première moitié de saison (ou presque) franchement raté. Treize longueurs de retard sur Donetsk, trois défaites et quatre matchs nuls en championnat, plus une dernière place en phase de poule de la Ligue des Champions. Trop de faux pas cumulés qui contrastent avec la saison parfaite du Shakhtar. L’échec est collectif à Kiev, à commencé par l’état major du club, responsable des derniers mercato. Même si le sujet reste encore tabou, il apparaît clairement que la crise économique ukrainienne frappe actuellement les finances du club. Les dossiers Mbokani et Belhanda sont des échecs du point de vue financiers. Le club était même en litige avec Anderlecht pour des arriérés de paiement. Le cas Teodorczyk fait aussi beaucoup parler dans la capitale. Prêté dans ce même club d’Anderlecht, l’on a vu l’attaquant polonais véritablement exploser. Du pain béni pour le club belge qui s’est empressé de lever l’option d’achat ridicule (autour de 4M€). Tout ce petit monde qui s’éclate à l’étranger tandis que la recrue Oleksandr Gladkiy (arrivé de Donetsk) n’en fini plus de décevoir, devenant même la cible privilégiée des supporters après des ratés monumentaux dans des matchs importants. Même constat pour l’autre recrue, Artem Gromov, qui n’a su se montrer sur le terrain. Si Junior Moraes caracole en tête du classement des buteurs avec 10 réalisations, c’est bien l’arbre qui cache la forêt tant il a déçu cette saison, tout comme bon nombre de joueurs offensifs.

Face à cette impuissance aussi bien en championnat qu’en Europe, Sergiy Rebrov, au bord du précipice, n’a d’autres solutions que de lancer dans le grand bains des jeunes pousses affamées. C’est ainsi qu’on a pu apercevoir de quoi sera fait l’avenir à Kiev avec les débuts prometteurs de Zurab Ochigava (21 ans) et Oleksandr Tymchyk (20 ans) en défense, Pavlo Orikhovsky (20 ans) au milieu de terrain mais aussi et surtout Viktor Tsygankov (19 ans), très très attendu dans la capitale. Les supporters du Dynamo n’ont sans doute pas été déçus par le jeune Tsygankov qui s’est toute de suite lancé, sans peur et sans complexe. Lui qui, à terme, devra remplacer poste pour poste Andriy Yarmolenko a sans doute déjà conquis les cœurs, inscrivant même 4 buts et 6 passes en 17 apparitions. Autre bonne pioche pour Rebrov, à défaut de mieux, le jeune Artem Besedin (20 ans) qui a su saisir sa chance à la pointe de l’attaque avec 4 réalisations en 12 rencontres. L’avenir pourrait s’éclaircir pour le Dynamo avec quelques éléments intéressants issus du cru. En revanche si la jeunesse pousse aux portes de l’équipe une, c’est une tout autre histoire pour les cadres historiques. C’est avec le cœur lourd que les supporters ont appris la retraite du gardien de légende Oleksandr Shovkovskiy à 41 ans, après 23 saisons au club. Cette annonce fut suivit dans les semaines suivantes par la non prolongation du contrat d’Oleg Gusiev, autre légende de club, après 13 années de bons et loyaux services.

https://twitter.com/footballskiFR/status/808415240287375360

Du côté du mercato, exit Yevgen Makarenko (non prolongé), remplacé par le hongrois Tamas Kadar en provenance du Lech Poznan. Le défenseur central Aleksandar Pantic viendra renforcer la défense, en provenance de Villareal. Le brésilien Danilo Silva devrait aussi quitter l’effectif pour rentrer au pays. Le club enregistre aussi le retour de prêt du buteur Roman Yaremchuk, auteur d’une très bonne première moitié de saison avec Oleksandria.

Si le parcours en championnat fut décevant, celui en C1 le fut encore plus. Une dernière place mérité, marqué par une fébrilité dans le jeu et surtout un manque d’élan offensif. Très critiqué à ce sujet, le coach Rebrov aura surement sauvé sa tête en décembre dernier avec ce dernier match de Ligue des Champions remporté 6 à 0 face au Besiktas. Déjà éliminé de la compétition, les ukrainiens avaient joué sans complexe pour finalement étriller cette équipe turque. C’est bien le seul point positif a retenir pour le Dynamo qui n’aura plus rien a joué en championnat, si ce n’est se défendre contre le Zarya. La coupe d’Ukraine restera le dernier objectif à porté pour cette équipe décevante cette saison.

Zarya Lugansk (3ème), valeureux troisième.

Quatrième l’an passé, le Zarya s’est donc offert une petite campagne européenne cette saison tout en continuent sa belle progression jusqu’à faire douter le grand Dynamo. Aussi touché par la guerre, le club de Lugansk s’en sort plus que bien au niveau sportif avec une troisième place bien mérité. Place que le club ne lâchera pas depuis la première journée, chipant même la seconde au Dynamo par deux fois cette saison. Malgré deux défaites face à la bête noire qu’est le Dnipro, le Zarya s’est offert en septembre le scalpe du champion en titre, sur son terrain, avec une but à la 93ème minute face à un Dynamo malade, qui ne fait plus peur. Seul ombre au tableau, la sortie prématurée de la Coupe d’Ukraine, crève-cœur pour cette équipe finaliste l’an passé. Une élimination dès les huitièmes de finale, aux allures de revanche pour le Dynamo avec un lourd 5 à 2 en prolongation (2-2 à la fin du temps règlementaire).

Pour ceux qui est de l’aventure européenne du Zarya, le miracle n’a pas eu lieu dans un groupe très relevé avec le Fenerbahçe, Manchester United et le Feyenoord Rotterdam. Cette équipe de Lugansk pourrait bien embêter encore plus d’une fois le Dynamo Kiev d’ici la fin de saison. A noter aussi la perte au mercato d’hiver d’Oleksandr Karavaev, le meilleur élément de cette équipe avec 6 buts et 5 passes décisives, parti au Fenerbahçe début janvier.

Oleksandria (4ème), la belle surprise.

Le Petit Poucet Oleksandria fait partie de ces clubs qu’on prend plaisir à suivre. Petit budget, petit stade, petite ville, mais vrais compétiteurs sur le terrain. Promu l’an passé en D1, le FK Oleksandria s’été déjà hissé au sixième rang, synonyme d’opportunité européenne. Malheureusement l’aventure aura tourné court avec une double défaite en tour préliminaire face au Hajduk Split cet été. Le début de saison est lui un peu chaotique avec trois défaites sur les quatre premières rencontres avant de lancer la machine. Cette quatrième place actuelle récompense logiquement une équipe qui n’a peur de personne et qui produit du jeu malgré les faibles moyens à disposition. Les trois seuls clubs à avoir défaits Oleksandria sont le Shakhtar, le Dynamo et le Zarya, le trio de tête. Le club a su miser sur des jeunes joueurs en devenir et notamment un duo d’attaquants Yaremchuk/Ponomar. Oui mais voilà, l’actuel meilleur buteur du club (6 réalisations) Roman Yaremchuk n’a pas souhaiter prolonger son prêt jusqu’à la fin de la saison. Le jeune attaquant prêté par le Dynamo Kiev a préféré rentrer au bercail pour tenter sa chance avec l’équipe première de la capitale. Un coup dur pour le club d’Oleksandria qui devra se passer de son meilleur élément pour le reste de la saison. Si la troisième marche du championnat reste très probablement inaccessible pour le club, le maintien de cette quatrième position est à leur portée, même sans leur meilleur attaquant rentré à Kiev.

Olimpik Donetsk (5ème), en embuscade.

Avec un point de retard et un match en moins (match face au Karpaty reporté en raison des conditions météos), l’Olimpik Donetsk tient Oleksandria dans son viseur. Auteur d’une saison plutôt discrète comme à son habitude, l’Olimpik devrait sans trop de difficultés terminer dans la première moitié de tableau et donc jouer la seconde partie de championnat pour une possible place en Europe. Parmi les bons éléments l’on notera les 5 réalisations du milieu de terrain Anton Postupalenko et les quatre d’Andriy Bogdanov, l’ancien du Dynamo. Sauf faux-pas exceptionnel, le reste de la saison ne sera que du bonus pour cette équipe de Donetsk.

Vorskla Poltava (6ème), Chernomorets Odessa (7ème), Zirka Kropyvnytskyi (8ème), Stal Kamianske (9ème) & Volyn Lutsk (10ème), l’habituel ventre mou.

Le célèbre ventre mou, que tous les championnats possèdent, ne devrait pas beaucoup changer d’ici à la fin de la première partie de saison. La sixième et dernière place qualificative pour la partie « Europe » devrait se jouer entre le Vorskla et le Chernomorets, égalités avec 23 unités chacun. Derrière, le Zirka Kropyvnytskyi (anciennement Zirka Kirovograd), le Stal Kamianske (anciennement Stal Dniprodzerzhynsk) et le Volyn Lutsk devrait plus ou moins rester dans cet ordre avec un écart de quatre points entre chaque club. Mathématiquement, Lutsk est d’ores et déjà condamné au groupe « relégation ».

Dnipro (11ème), Karpaty Lviv (12ème), les bonnets d’ânes.

Les mauvais élèves de cette promotion 2016-2017 sont sans surprise le Dnipro (désormais l’on dit juste Dnipro) et le Karpaty Lviv. Mauvais élèves bien malgré eux puisqu’une nouvelle fois encore leurs saisons ne se jouent pas seulement sur le rectangle vert mais aussi et surtout dans les bureaux de la FIFA. A l’étage commission disciplinaire. Le Dnipro n’en finit plus de traîner sa peine avec un effectif passé à la moulinette et rajeuni par la force des choses. L’exercice en cours avait pourtant commencé de la meilleure des manières avec un 5-0 passé à Lutsk en ouverture. La suite sera bien moins glorieuse avec un enchaînement de défaites et de matchs nuls accompagnés de deux enquêtes de la FIFA pour des arriérés de paiement dus à l’ancien entraîneur espagnol Juande Ramos ainsi qu’à l’ancien défenseur Danilo. Après plusieurs mises en garde, le couperet finit par tomber par deux fois. Six points sont retirés au Dnipro en octobre puis six autres en décembre. Au total donc, 12 points sur les 18 engrangés cette saison. La FIFA continue de lorgner sur le club ukrainien et ses problèmes financiers récurrents. L’ombre d’une possible relégation administrative plane toujours au-dessus de la tête du club. Une sanction qui pourrait être synonyme de disparition pour le Dnipro. Côté terrain maintenant, le club s’est pourtant trouvé une nouvelle victime, après le Shakhtar l’an passé, c’est au tour du voisin de Lugansk. Brillant troisième, le Zarya s’est en effet incliné par deux fois contre le Dnipro. Parmi les satisfactions, l’on notera les performances de l’inamovible capitaine Ruslan Rotan et du jeune attaquant polyvalent Denys Balanyuk, auteurs de quatre réalisations chacun. Autre point à relever, le club est toujours en course en Coupe d’Ukraine avec une qualification pour les demi-finales à venir.

L’autre bonnet d’âne de la classe et lanterne rouge du championnat n’est autre que le Karpaty Lviv. Même topo ou presque pour le club de l’ouest ukrainien qui cumule les déceptions sportives et les ennuis financiers. Même démarrage pour le Karpaty, qui commence la saison par un brillant 3-0 infligé à Kamianske fin juillet. Il faut ensuite attendre le mois de novembre pour voir à nouveau une victoire (1-0 face à Poltava). A l’inverse du Dnipro sanctionné en cours d’exercice, le Karpaty avait vu sa sanction tomber avant le début de la saison et s’était donc plus ou moins préparé à entamer la compétition avec un handicap de six points. Même son de cloche de la part de la FIFA qui réclame le paiement de salaires impayés notamment envers l’international Bosnien Semir Štilić, passé au club en 2012. La saison du Karpaty s’annonce bien morose avec ces points de retard, les difficultés financières et une élimination précoce de la Coupe en huitièmes de finale, sorti par le FC Poltava, club de seconde division. Une éclaircie à pourtant vu le jour à Lviv cette saison avec la confirmation de l’avant-centre argentin d’origine ukrainienne Gustavo Blanco-Leschuk, troisième meilleur buteur de la compétition avec 7 réalisations et 3 passes décisives. Malheureusement pour les fans, l’enthousiasme est de courte durée après les déclarations du président à l’aube du mercato d’hiver. Le Karpaty doit vendre pour renflouer les caisses, éternel recommencement pour ce club. Résultat des courses, Gustavo Blanco est cédé au Shakhtar Donetsk pour 400 000 malheureux euros, tout comme le prometteur défenseur Vasyl Kravets (19 ans) prêté au CD Lugo (D2 Espagnol) avec une option d’achat qu’on imagine obligatoire mais dont le montant reste inconnu. Et enfin pour finir, le troisième larron, Volodymyr Kostevich est cédé au Lech Poznan pour 350 000 €.

La baisse massive des affluences dans les stades n’est que le triste reflet du niveau de ce championnat qui est en chute libre depuis les affaires politiques qui secouent le pays. Les figure de proue que sont le Shakhtar et le Dynamo devront se montrer dans les grands rendez-vous européens s’ils veulent redorer le blason de la désormais Liga Pari-Match.

 

Rémy Garrel


Image à la une : © ua-football.com

Leave A Comment

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.