Le dimanche, c’est sacré. Mais pendant que certains décidaient de faire la sieste avec Michel Drucker ou devant OM-ASSE, nous étions au Letna de Prague, où le Sparta recevait Mlada Boleslav. Récit.

© Ghislain Corréa
© Ghislain Corréa

Sur le papier, l’affiche est aussi alléchante qu’une Pilsner fraîche. En effet, le troisième du championnat tchèque se rendait sur la pelouse du second, à l’occasion de la 18e journée de Synot Liga. Distancés par le Viktoria Plzen, champion en titre et vainqueur de Teplice l’avant-veille (1-0), les Grenats se devaient de signer un premier succès devant leurs fans en 2016. En face, Mlada Boleslav débarquait dans la capitale en costume d’outsider, eux qui ont pris place sur le podium au gré d’une encourageante phase aller.

 


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De quoi nous pousser à rejoindre la Generali Arena, que l’on appelait officiellement Letna Stadion jusqu’en 2003, pour assister au choc. Et dès la sortie du tramway, le décor est planté : maillots, écharpes et drapeaux à la gloire du Sparta tapissent les abords du stade, le tout enrobé d’une fine odeur de bière blonde. Les familles se pressent à l’intérieur de la boutique officielle, tandis que les habitués préfèrent s’accouder à l’une des innombrables buvettes qui jouxtent l’arène. Tous viennent supporter le club le plus titré de République Tchèque, donner de la voix et recevoir du plaisir. En somme, nous trouvons à Prague le football véritable que nous étions venus chercher. A une heure du coup d’envoi, pinte en main et sourire aux lèvres, nous prenons place dans l’antre des Rudí.

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Toutes écharpes dehors pour chanter l’hymne du Sparta | © Ghislain Corréa

Ainsi, nous faisons partie des 10 000 spectateurs à assister à la rencontre. Horaire familial oblige, le public praguois se montre calme en avant-match, et les Ultras ne rejoignent leur tribunes qu’à cinq minutes du coup d’envoi. Tout juste à l’heure pour entonner l’hymne de leur club, mais également pour rendre hommage à Pavel Srníček, ancien gardien de la sélection nationale tragiquement décédé en décembre dernier. Après une minute d’applaudissements chaleureusement respectée, le match peut démarrer. Et Letna de s’embraser…

D’entrée, le Sparta Prague met le pied sur ballon et dicte le rythme de la rencontre. Privés de David Lafata, leur capitaine et buteur emblématique (34 ans), les hommes de Zdeněk Ščasný utilisent la vitesse de Krejci et Sural pour déstabiliser la défense adverse. C’est d’ailleurs sur une frappe repoussée du premier que le second ouvre le score (1-0, 9e minute). Débarqué cet hiver du Slovan Liberec, Josef Sural inscrit là son deuxième but en autant de rencontres sous le maillot des Rudí, palliant à merveille l’absence de Lafata, pourtant meilleur scoreur du championnat. Dominateur dans le jeu, le Sparta se montre également dangereux sur coups de pied arrêtés, où le pied droit de Boreck Dockal fait des merveilles. Sur un énième corner, un ballon mal dégagé voyage dans la surface des joueurs de Karel Jarolim jusqu’à atteindre Costa Nhamoinesu, seul au second poteau. Instinctivement, le défenseur zimbabwéen arme une reprise acrobatique qui finit sa course au fond des filets (2-0, 22e). Les fans locaux exultent, et le speaker scande « COSTA » en s’évitant bien des soucis de prononciation. En un peu plus de vingt minutes, le match vient d’être plié…

Au premier plan, la fatigue des uns tranche avec l'enthousiasme des autres | © Ghislain Corréa
Au premier plan, la fatigue des uns tranche avec l’enthousiasme des autres | © Ghislain Corréa

Et Mlada Boleslav, dans tout ça ? Rien, ou pas grand-chose. D’importantes lacunes techniques obligent la défense à envoyer des longs ballons à destination de Magera, auteur de 10 buts en championnat mais inoffensif cet après-midi. A ses côtés, l’immortel Milan Baros (34 ans, déjà…) traverse le match comme un fantôme, bien loin de la forme affichée le week-end dernier, lors duquel il avait signé un doublé face à son club formateur du Banik Ostrava. Finalement, le seul sourire bleu et blanc vient des tribunes, où un supporter du MBK nous rappelle en rigolant que son club avait éliminé l’Olympique de Marseille de la C3, en 2006. A la mi-temps, ce joyeux luron disparaîtra subitement, en même temps que les espoirs de remontée de son équipe fétiche.

La pause est l’occasion de se rafraîchir, se ravitailler mais aussi d’échanger avec les supporters locaux. L’un d’entre eux, impressionné par les kilomètres parcourus depuis le sud-ouest de la France, nous offre immédiatement une bière. Avant de nous questionner, dans un anglais pas très catholique, sur nos croyances religieuses. Le Tchèque est accueillant, mais pas trop… Après avoir esquivé le débat sur la crise des migrants, nous reprenons place dans les gradins pour assister à une seconde mi-temps soporifique. Bien décidés à réchauffer l’ambiance générale, les ultras spartiates craquent une poignée de fumigènes, histoire de faire honneur à leur réputation.

Les Ultras du Sparta Praha | © Ghislain Corréa
Les Ultras du Sparta Praha | © Ghislain Corréa

Sur la pelouse, la seule étincelle viendra de Milan Baros. Déjà averti dans le premier acte pour une main volontaire, l’ancien attaquant de Lyon et Liverpool récolte un second avertissement pour un pied levé à hauteur de la jugulaire. Carton rouge et retour au vestiaire prématuré pour le meilleur buteur de l’Euro 2004, sous les quolibets d’un public praguois sans cesse plus bruyant. Plus rien ne sera marqué, et Letna peut sereinement se rendormir : Prague la royale a disposé sans forcer de Mlada Boleslav l’ouvrière, berceau des automobiles Skoda, offrant à son public un deuxième succès en une semaine après celui acquis en Ligue Europa jeudi soir (1-0 face aux Russes de Krasnodar). Au classement, les Grenats comptent toujours 3 points de retard sur le Viktoria Plzen, qu’ils recevront au mois d’avril pour un duel qui devrait décider du champion 2016. Mlada Boleslav, quant à lui, reste sur le podium grâce à la défaite du Slovan Liberec.

A la sortie du stade, les supporters rendent un dernier hommage à Pavel Srnicek | © Ghislain Corréa
A la sortie du stade, les supporters rendent un dernier hommage à Pavel Srnicek | © Ghislain Corréa

La nuit tombe peu à peu sur l’Europe Centrale, la Generali Arena se vide doucement et les fans du Sparta rentrent chez eux, en famille et le sourire aux lèvres. Et nous ? On quitte le pays avec le sentiment du devoir accompli. Celui d’avoir marché sur les traces d’un football coloré, populaire et festif. L’atterrissage en France promet d’être rude…

 

Vous pouvez retrouver les notes de Footballski pour le Letna sur ce « au stade » précédent contre le Banik.

 

Ghislain Corréa


Image à la une : © Footballski

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